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L’urgence du bien-être humain

La crise sanitaire a durement affecté les populations en Europe et dans le monde. Les restrictions, contraintes et mesures coercitives nous ont rendus plus sensibles au besoin de liberté précisément parce qu’elle nous a cruellement manqué.

Depuis près d’un an, la lutte contre la pandémie a été, et est d’ailleurs encore, la plus importante voire la seule préoccupation des États dans le monde, au point d’oblitérer toutes les autres.

Se soumettre aux injonctions des gouvernements, fondées sur les avis des “experts”, est devenu la règle. S’y opposer voire seulement les contester est passé progressivement de l’incongruité à la transgression. Insidieusement, une expression formatée s’impose dans les médias et inspire les discours politiques, le corollaire étant un musellement de facto du “free speech”.

Mon propos n’est pas, bien entendu, de m’insurger contre les efforts indispensables déployés pour enrayer la pandémie, mais d’attirer l’attention sur les dérives autoritaires qui, en d’autres circonstances, seraient nettement moins justifiées et pourraient déboucher sur la censure de toutes critiques et ainsi mettre à mal la liberté d’expression.

Qu’adviendra-t-il lorsque la Covid et ses variants seront maîtrisés ?

Les populations, après une aussi longue période d’isolement forcé (qui n’est d’ailleurs pas terminée), d’absence de contacts sociaux, de misères morale, physique et/ou matérielle ou tout simplement de désarroi face à une situation exceptionnelle, aspirent, avant tout, à retrouver une vie familiale libérée de toutes entraves, les amis, le travail voire du travail, la mobilité de naguère, les espaces culturels, bref une vie plus apaisée.

Comment y arriver sinon en facilitant, dans un premier temps, les investissements, le redéploiement des activités entrepreneuriales et commerciales et la restauration de l’emploi qui en découle, permettant d’assurer la sécurité matérielle et de retrouver une autonomie voire de la découvrir, c.à.d. en promouvant la relance économique.

Devant une telle urgence humaine à laquelle il faut répondre sans délai et y consacrer les moyens financiers nécessaires, dans un cadre législatif adéquat, la transition énergétique telle que prévue par l’UE apparaît comme secondaire. Les sommes considérables nécessaires pour atteindre les objectifs de cette dernière (résultant de théories qui, au mieux, ne seraient vérifiées que dans de nombreuses décennies) seraient utilisées de manière nettement plus efficace si elles étaient investies dans l’indispensable relance précitée et dans les mesures d’accompagnement contribuant au mieux-être des très nombreuses victimes de la crise de la Covid, trop préoccupées par leur survie pour s’inquiéter des urgences climatiques.

Quant à la transition énergétique européenne à proprement parler, elle est loin d’être la solution idéale que l’UE prétend.

Un des volets de celle-ci porte sur une électricité entièrement renouvelable (largement intermittente en dehors de la production hydraulique), d’ici à 2050 et, pour la majorité des États membres de l’ouest de l’UE, sans nucléaire.

Un tel mode de production ne sera pas en mesure de répondre à la consommation d’électricité qui ne cesse d’augmenter mondialement et, en particulier au sein de l’UE, en raison de la numérisation croissante de l’économie, de la robotisation toujours plus grande des prestations, du recours accéléré à l’intelligence artificielle et , plus tard, du développement du parc des véhicules électriques.

Seul un mix électrique bon marché, diversifié et fiable en tout temps (ce qui n’est pas le cas du renouvelable intermittent et ne le sera pas dans le futur sans investissements très onéreux), incluant la production nucléaire et fossile (gaz), cette dernière encore durant plusieurs décennies, permet de satisfaire à la demande d’électricité en expansion.

Les pays qui sont à la traîne dans tous les domaines, tant économique et industriel que culturel et éducationnel, sont précisément ceux qui ne disposent pas d’un tel mix.[1]

D’autre part, les dépenses considérables liées à la transition énergétique européenne ne peuvent être financées que par la dette (vu l’impécuniosité des États membres) qui vient s’ajouter à celle qui est contractée dans le cadre de la crise sanitaire. Si certains considèrent qu’il n’y a pas de limite au surendettement d’un État vu que celui-ci peut se financer indéfiniment auprès de sa propre banque centrale, il n’en reste pas moins que le système monétaire international est très fragile : il repose sur la crédibilité des banques centrales (assureurs en dernier recours de toute l’économie). La confiance peut s’évaporer !

L’absence actuelle d’inflation (effet secondaire de la création monétaire) malgré l’explosion de la dette résulte vraisemblablement de la demande mondiale déprimée et de la pression concurrentielle accrue entre producteurs.

“Ces nouvelles politiques monétaires ne sont toutefois pas sans risque… Elles déclenchent des effets secondaires et certains de ceux-là sont très problématiques. Le premier d’entre eux est une forme maligne de l’inflation : la bulle spéculative. Alors que l’inflation s’attache aux prix à la consommation, les bulles font grimper le prix des actifs, de l’immobilier, de la valeur des entreprises en bourse…Comme les banques centrales créent massivement de l’argent à taux zéro, voire négatif, il est facile de s’endetter…. jusqu’au krach…Cette politique d’argent facile dénature le rapport au risque”.[2]

Le surendettement ne devrait-il pas être limité dans le temps et servir au financement de mesures d’urgence que dans des circonstances exceptionnelles ?

[1] Loic Lefloch-Prigent, “En route vers la catastrophe”, 19 décembre 2020.

[2] “Quoiqu’il en coûte !”, François Lenglet, Editions Albin Michel, 2020.

Une carte blanche de Jean-Pierre Schaeken Willemaers, de l’Institut Thomas More, Président Pôle Énergie, Climat, Environnement

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