Julie Bodson : “Le mentorat, c’est bien plus que transmettre un savoir”

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Des 50+ qui guident des jeunes issus de l’immigration dans leurs démarches vers l’emploi, c’est le credo de l’association Duo for a job.

Duo for a job mise sur le mentorat. Qu’est-ce que cela apporte concrètement pour les trajets d’insertion ?

Depuis 2012, notre association a accompagné plus de 1.500 jeunes. Nonante pour cent d’entre eux sont nés à l’étranger. Ils ont du mal à valoriser ici leurs diplômes et leurs expériences, parfois informelles, et finissent par céder au découragement. Le premier job du mentor va être de les aider à retrouver de la confiance en eux. Sans ce regard extérieur, ils risquent de s’enfermer dans la conviction qu’ils n’ont pas de compétences.

Je suis épatée par la curiosité de ces mentors. Ils ont vraiment envie de s’interroger, de découvrir les autres. Ça va bien au-delà de la transmission d’un savoir professionnel. Une fois qu’ils ont établi le bilan de compétences du jeune, ils essaient de trouver les adéquations avec les offres de stage, de formation ou d’emploi pour bâtir ensemble une trajectoire d’insertion professionnelle. Il faut aider ces jeunes à naviguer dans notre système, à frapper aux bonnes portes…

Il existe déjà des organismes officiels pour l’accompagnement des demandeurs d’emploi. N’entrez-vous pas en concurrence avec eux ?

Non, nous sommes au contraire très complémentaires. Les institutions comme Actiris ou le Forem font leur boulot, les CPAS aussi. Mais entre toutes leurs actions, il y a des interstices dans lesquels nos mentors peuvent se glisser. La valeur ajouté du mentorat a été démontrée, les organismes régionaux le reconnaissent et ont d’ailleurs conclu des conventions de partenariat avec Duo for a job. Que ces instances recherchent des dispositifs complémentaires pour aider certains publics cibles, en l’occurrence les jeunes issus de l’immigration, c’est une excellente chose.

L’entrée sur le marché du travail est compliquée pour beaucoup de jeunes, pas seulement pour ceux qui arrivent de l’étranger. Comptez-vous vous adresser à eux aussi ?

Les jeunes issus de l’immigration ont des handicaps spécifiques pour la langue souvent, mais aussi pour les codes culturels liés à l’emploi. Que faut-il écrire dans un C.V. et une lettre de motivation ? Comment faut-il s’habiller pour un entretien d’embauche ? Un jeune qui débarque d’Afghanistan n’en a aucune idée et nos mentors peuvent les aider, les guider dans ces étapes.

A cela s’ajoute la question du réseau : quand vous êtes nés ici, vous avez de la ressource, vous connaissez des gens à qui demander un coup de main. Le mentor va offrir son réseau aux jeunes dont il s’occupe. Le réseau est indispensable pour entrer sur la partie non-visible du marché du travail. Le marché ouvert, c’est à peine 30% des offres d’emploi. Le reste, vous ne l’apprenez qu’à travers votre réseau.

Enfin, notre action spécifique vise une ambition plus large d’échanges interculturels et intergénérationnels. Quand les gens se rencontrent, les préjugés tombent. C’est fondamental pour améliorer la cohésion sociale. Duo for a job, c’est l’une des manières de se rencontrer mais il y en a plein d’autres comme ces associations qui proposent des jeux de société ou ces familles qui hébergent des demandeurs d’asile.

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