I. Lenarduzzi (Jump) sur un indice légal sur l’égalité salariale: “Ce serait un excellent incitant pour réduire les inégalités”

© E. ELLEBOOG

L’approche française d’un indice légal sur l’égalité salariale homme-femme en entreprise est soutenue par la fondatrice de Jump, une entreprise sociale visant à améliorer la place des femmes dans l’économie.

La France publie un index de l’égalité professionnelle, obligatoire pour les entreprises, qui inclut cinq critères (1) dont les écarts salariaux hommes-femmes. Il oblige les sociétés à mettre des mesures en place si l’indice est trop bas. Ce type de dispositif vous paraît-il souhaitable en Belgique ?

Bien sûr, ce serait un excellent incitant pour réduire les inégalités entre les hommes et femmes en entreprise, notamment salariales. J’ai été très attentive lors des négociations qui ont mené à cette mesure en France, qui ont réuni les partenaires sociaux et la ministre du Travail, Muriel Penicaud. Ils y sont arrivés alors que la culture de concertation sociale est moindre en France qu’en Belgique. C’est très bien que l’indicateur, sur 100, soit publié. S’il n’est pas rendu public, cela ne sert à rien. J’ai connu des entreprises fort embarrassées de ne pas arriver au minimum de 75 sur 100. Elles sont monitorées, doivent rendre des comptes en indiquant comment elles vont progresser sous peine de pénalités qui s’élèvent à 1% de la masse salariale. C’est un dispositif vraiment malin.

La Belgique ne pratique pas cette approche, et il semble qu’il y ait pas mal de réticence…

C’est vrai et c’est regrettable. Je note qu’en Belgique, toutes les entreprises cotées ne respectent même pas l’obligation d’avoir au moins un tiers d’administratrices. L’institut des administrateurs, Guberna, l’a relevé récemment ( 9% des entreprises cotées ne la respectent pas, Ndlr). J’ai proposé que l’on s’inspire en Belgique de la formule de l’indice français, obligatoire, et que l’Etat publie les résultats, pour améliorer l’équilibre de genre au travail, mais qui suis-je ? L’adoption de ce type de mesure dépend des coalitions fédérales. Et pour des formations de centre droit, comportant la N-VA, c’est une proposition tout simplement inaudible. La N-VA a une vision traditionnelle de la place des femmes et des hommes, et ne veut par exemple surtout pas de quotas. Les dernières ministres des droits des femmes étaient N-VA et n’ont rien fait en faveur de l’égalité professionnelle.

Ne pourrait-on pas au moins lancer ce type d’indice sur une base volontaire ?

Cela n’aurait pas beaucoup de sens car on ne pourrait pas vraiment faire de comparaison, toutes les entreprises n’y participeraient pas. L’approche d’un indice n’est efficace que si elle est imposée de l’extérieur, s’il y a un gendarme pour vérifier la méthode de calcul, si les résultats sont publics et s’il y a des pénalités associées. Il faut un cadre légal pour toutes les entreprises à partir d’une certaine taille.

(1) Les entreprises de plus de 50 salariés sont soumises à la publication de leur indice. Les critères sont : l’écart salarial h-f, l’attribuation (ou non) de taux d’augmentation au retour d’un congé parental, l’écart du taux des augmentations entre h et f, le nombre de femmes dans le top 10 salarial, l’écart du taux de promotion entre h et f.

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