H2WIN va produire de l’hydrogène grâce à des algues

Algues
Christophe De Caevel
Christophe De Caevel Journaliste Trends-Tendances

Cette innovation nivelloise pourrait passer rapidement en phase industrielle, en s’appuyant sur l’excellence wallonne dans les biotechnologies.

L’hydrogène, on vous en parle chaque semaine. Ce vecteur énergétique présente un atout très intéressant : il est stockable et peut ainsi jouer un rôle précieux en complément du solaire ou de l’éolien, par nature intermittents. L’inconvénient de l’hydrogène, c’est que sa production est très énergivore. En cumulant les besoins pour le produire et pour l’utiliser ensuite dans la production d’électricité, on réduit le rendement de 50%. Philippe Lorge, docteur en sciences et fondateur de la société H2WIN (Nivelles), est convaincu qu’on peut faire beaucoup mieux en s’inspirant de l’observation de la nature. “Dans le processus de photosynthèse de l’algue bleue, vous avez des catalyseurs biologiques, qu’on appelle des enzymes, qui ont une formidable efficacité, dit-il. On n’a quasiment pas de perte d’énergie en transformant l’électricité en hydrogène et en retransformant ensuite l’hydrogène en électricité.”

Le travail d’H2WIN, fondée en 2013, fut d’identifier le moyen d’utiliser l’enzyme à l’origine de cette capacité et d’en reproduire la structure par “biomimétisme moléculaire”. “Nous développons maintenant la production industrielle de ces enzymes par recombinaison génique pour les électrolyseurs et piles à combustibles, poursuit Philippe Lorge. L’excellence belge dans les biotechnologies nous permet d’atteindre d’énormes capacités en ce domaine.” H2WIN vient de lever 3,3 millions d’euros auprès de plusieurs fonds privés belges -Bertrand Velge (Bekaert), Eric Swenden (Vandemoortele) et Jérôme Lhoist notamment- pour développer cette activité à très fort potentiel.

L’entreprise travaille avec des entreprises pharmaceutiques wallonnes, spécialisées dans la production de protéines par recombinaison génétique. “Quand notre prototype sera au point, le passage à la phase industrielle sera extrêmement rapide, assure Philippe Lorge. Le savoir-faire technologique existe déjà en Wallonie.” Il évoque un lancement commercial d’ici deux ans et est convaincu que le marché sera très demandeur d’un substitut aux catalyseurs actuels utilisés dans la production d’hydrogène, à savoir essentiellement le platine (coûteux et, qui plus est, produit en Russie). “Nous parlons ici d’une application très précise autour de l’hydrogène, ajoute notre interlocuteur. Mais la démarche de créer des enzymes inspirés de la nature a véritablement un potentiel de révolution industrielle car tous les pans de l’industrie sont confrontés au problème du rendement des réactions chimiques. Que ce soit dans les fertilisants, la fixation du CO² ou la purification de l’eau, nous pouvons arriver avec des solutions locales, renouvelables et fiables, inspirées de ce qui, en réalité, existe déjà dans la nature.”

H2WIN emploie seulement trois personnes, mais elle collabore avec une dizaine de sous-traitants qui sont aussi bien des universités, que des centres de recherche ou des entreprises. Ce travail en réseau permettra de décupler les retombées sur le tissu économique régional si la technologie développée par l’entreprise nivelloise rencontre effectivement le succès escompté dans les prochains mois H2WIN est soutenue depuis le début par des subsides et des avances récupérables de la Région wallonne. Elle bénéficie également de financements européens.

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