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Et si les Européens étaient les idiots de l’économie mondiale ?

Lire la chronique d' Amid Faljaoui Amid Faljaoui, directeur des magazines francophones de Roularta.

Être traité d’idiot ne fait jamais plaisir. C’est pourtant le titre d’un éditorial de mes confrères du quotidien économique Les Echos. Après l’avoir parcouru, je me suis dit que cet éditorialiste avait raison.

Pour faire sa démonstration, l’éditorialiste prend l’exemple de l’interdiction de vendre des voitures thermiques en Europe à partir de 2035. A l’époque, les politiques avaient appuyé cette décision de la Commission européenne sans trop écouter les constructeurs automobiles européens. Forcément, c’étaient des industriels qui par définition ne savent rien faire d’autre que de polluer. Et forcément, leurs arguments étaient viciés à la base aux yeux des politiques et de la population. Pourtant, ce que demandaient ces industriels, c’était juste une décision plus subtile, plus étalée dans le temps et qui laissait une chance à d’autres alternatives moins polluantes que le moteur thermique. Mais voilà, l’écoute a été de zéro ou presque.

Résultat, les constructeurs chinois sont en train de débarquer en force en Europe sur le marché des voitures électriques. La preuve, il y a quelques jours à peine, le loueur de voitures SIXT que tous ceux qui louent une voiture dans un aéroport connaissent, vient d’annoncer une commande 100.000 voitures à batteries auprès du chinois BYD. Et ce constructeur, personne en Europe ne le connait. Mais en Bourse, il se classe juste derrière Tesla et Toyota en termes de valorisation. Bref, c’est un géant que les automobilistes européens vont apprendre à connaître. Exactement comme “Tang”, “Han” ou “Atto3”, ces marques de véhicules électriques lancés par BYD et qui vont déferler sur notre continent. Pourquoi ? Mais parce que la Commission européenne a édicté des règles strictes, mais a oublié qu’elle allait donner un avantage compétitif énorme aux Chinois.

Comme les États-Unis, la Chine prône la liberté économique, mais en réalité pratique le protectionnisme sur leur territoire de manière subtile. Parlez du marché chinois à un constructeur auto européen comme Stellantis et son dirigeant vous dira comment ce pays met des bâtons dans les roues des industriels européens. En revanche, comme l’électrique va s’imposer, les Chinois profitent de leur force de frappe pour proposer des voitures électriques à prix doux. Le chinois BYD peut, par exemple, le faire car il fabrique lui-même ses batteries. Il est même le numéro deux mondial du secteur. Et il fabrique lui-même ses puces. C’est pour cela que quand vous commandez une voiture chez BYD, la durée de livraison est d’un mois ou deux, alors qu’ailleurs c’est minimum 6 mois.

En clair, en décrétant que la voiture de demain sera électrique ou ne sera pas – et sans nuances, sans échéancier raisonnable, sans alternatives – l’Europe s’est tirée une balle dans les pieds. Nous avons accéléré le tempo – ce qui est bon pour la planète – mais sans mettre en place les moindres barrières réglementaires, techniques ou économiques. Et ça, c’est mauvais sur le plan de la casse sociale.

Au final, ce sont donc les entreprises et leurs salariés qui paieront l’arrivée des voitures électriques chinoises en Europe. Si vous cherchez l’idiot du village de l’économie planétaire, ne cherchez plus, vous l’avez trouvé.

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