Enquête: quelle est la qualité d’emploi dans le secteur des titres-services ?

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Une vaste enquête menée par deux chercheurs de l’UCL sur quatre ans a analysé la qualité d’emploi et la motivation au travail des aides ménagères sous le régime des titres-services. Il en ressort, entre autres, que la qualité d’emploi est assez variable selon les employeurs. Autre constatation: le manque d’opportunités de carrière et d’évolution et les faibles salaires pratiqués dans le secteur.

De 2011 à 2015, Olivier Brolis et Marthe Nyssens, deux chercheurs à l’UCL, ont mené une vaste enquête sur la qualité d’emploi et la motivation au travail des aides ménagères sous le régime des titres-services.

Leurs données ont été récoltées auprès de 824 aides ménagères pour le compte du Cirtes, centre de recherche de l’UCL sur le travail, l’Etat et la société. Il en ressort que la qualité d’emploi est variable selon le statut de l’employeur. Parmi ceux-ci, les entreprises d’insertion semblent être les seules à même d’insérer les travailleurs les plus vulnérables sur le quasi-marché des titres services. Elles leur offrent des formations plus nombreuses et plus diversifiées, un niveau d’accompagnement et d’encadrement très poussé et une meilleure sécurité d’emploi.

Les deux chercheurs font aussi remarquer que les associations d’aide aux familles et aux personnes âgées développent un environnement de travail plus stimulant : niveau d’autonomie élevée, possibilité de prendre part aux décisions de façon formelle ou informelle, meilleur salaire horaire, opportunité de carrière en interne…

A contrario, les entreprises privées à but lucratif, largement majoritaires dans le secteur, déploient, pour leur part, un modèle d’emploi basé sur une politique de minimisation des coûts, ce qui les amène à offrir une faible qualité d’emploi et à se cantonner la plupart du temps à un rôle de simple intermédiaire administratif entre l’aide ménagère et l’usager. Toutefois, l’enquête révèle que certaines de ces entreprises développent un modèle d’emploi qui tend à s’approcher de celui des entreprises d’insertion.

Manque d’opportunités de carrière et d’évolution

L’enquête soulève aussi quelques problématiques observées telles que le manque d’opportunités de carrière et d’évolution. Dans cette optique, les postes d’aide-ménagère ne constituent généralement pas un tremplin vers des emplois de plus haut statut, que ce soit dans l’entreprise (absence d’opportunités de carrière) ou hors de l’entreprise (manque de formations et de développement des compétences).

Les chercheurs notent aussi que cette situation est problématique, car un travailleur avec une ancienneté de plus de deux ans représente un coût important. Cela incite donc l’employeur à favoriser un taux important de rotation des travailleurs. Autre constatation : le caractère “pénible” du métier qui rend plus que compliqué son exercice sur l’ensemble d’une carrière professionnelle.

Les faibles salaires pratiqués dans le secteur sont aussi pointés du doigt. Il ressort ainsi de l’enquête que les aides ménagères perçoivent, en moyenne, des salaires qui se situent en dessous du seuil de pauvreté. En cause : la faiblesse de leur rémunération horaire et le fait que la plupart travaillent à temps partiel. Le temps passé à se déplacer entre deux clients n’est pas comptabilisé dans les heures de travail. Le caractère pénible de ce métier constitue un frein au temps plein sur le long terme, expliquent les chercheurs.

La qualité d’emploi se révèle aussi variable selon le type de tâche prestée. Les aides ménagères travaillant dans une centrale de repassage bénéficient d’une moins bonne qualité d’emploi que leurs homologues qui travaillent au domicile de l’usager.

Motivations

Les nouveaux collaborateurs engagés dans le secteur sont principalement motivés par l’obtention d’un revenu. Mais ils sont également motivés par l’envie d’avoir un impact social (motivation prosociale) en venant en aide aux usagers, ce qui a une influence positive sur leur estime de soi, leur performance et leur satisfaction au travail. Dans les entreprises à but lucratifs, cette motivation pro-sociale a tendance à disparaitre après quelques mois d’activité, car la pression exercée par la recherche de rentabilité et de minimisation des coûts ne leur laisse pas suffisamment l’opportunité de venir en aide aux usagers comme ils le voudraient.

Du côté des associations d’aide aux familles, la motivation pro-sociale semble être particulièrement favorisée de par un environnement de travail plus stimulant et de par le caractère plus régulièrement dépendant de leurs usagers.

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