En accélérant la conversion à l’auto électrique, les constructeurs pourraient multiplier leur valeur boursière

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Robert Van Apeldoorn
Robert Van Apeldoorn Journaliste Trends-Tendances

Si les constructeurs accéléraient leur conversion aux voitures électriques, ils pourraient grimper en Bourse et gagner 800 milliards d’euros dans leur capitalisation boursière, estime Transport&Environment. Et mieux préserver les emplois.

La santé financière des constructeurs d’auto pourrait s’améliorer s’ils allaient plus vite dans la transition électrique. Ils pourraient “ajouter 800 milliards d’euros à leur valorisation boursière s’ils accélèrent leur transition cette décennie plutôt que de continuer à s’accrocher à leur business model des moteurs à combustion”, indique un communiqué récent de Transport&Environment (T&E), une des principales organisations internationales en faveur des transports sans émission, basée à Bruxelles (1).

C’est le résultat d’une analyse financière menée par Profundo, un bureau d’étude néerlandais, pour le compte de T&E. Il a examiné et analysé des données de six acteurs importants en Europe : le groupe VW, Stellantis, Toyota, Volvo cars, Mercedes-Benz et BMW, et calculé les valorisations dans l’hypothèse d’une accélération de leur électrification. Pour l’heure, les constructeurs s’électrifient à des rythmes différents, parfois avec réticence, poussés uniquement par les perspectives réglementaires, comme la volonté de la Commission européenne de limiter la vente des autos neuves aux modèles sans émission à partir de 2035.

Le risque d’un “suicide financier”

Les constructeurs ont jusqu’ici eu du mal à gagner de l’argent en vendant des autos électriques, mais Tesla a montré qu’il était possible de dégager des marges confortables à partir d’un certain volume.

L’étude de Profundo indique que la valorisation des six sociétés pourrait globalement augmenter de 316% d’ici 2030, s’ils “passent plus vite aux véhicules électriques que leurs plans actuels” indique le communiqué de T&E, en visant une conversion totale en 2035 au plus tard. “Opter pour une lente sortie des moteurs à combustion est un suicide financier pour les constructeurs” avance Luca Bonaccorsi, Sustainable Finance Director chez T&E. Car la baisse des marges sur les moteurs à combustion pourrait éloigner les investisseurs et faire reculer les valorisations.

Une lente sortie des moteurs à combustion est un suicide financier pour les constructeurs”

La transition sera un exercice très délicat. La situation pourrait être compliquée lorsque les tarifs des autos électriques descendront sous celui des autos à carburant, “après 2027”, avance T&E. Il y a un risque que les voitures à carburant soient alors beaucoup moins demandées, estime l’organisation.

Les gagnants potentiels : Mercedes, BMW, Stellantis, VW

L’étude Profundo calcule que le groupe VW pourrait voir sa valorisation plus que tripler (+253%), Stellantis quasi quintupler (+388%). Toyota ne gagnerait que +70%, car il est plus lent à passer à l’électrification. Il a surtout misé de longue date sur les véhicules hybrides et l’hydrogène, et tardé à sortir des véhicules électriques.

Les constructeurs d’autos premium pourraient y gagner davantage : la capitalisation pourrait grimper de +471% pour Mercedes-Benz, quasi la même progression pour BMW.

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Le modèle Tesla

L’énorme valorisation de Tesla, de 764 milliards de dollars (au 1er juin 2022) devrait encourager les constructeurs. Elle dépasse tous les acteurs du secteur, y compris le groupe VW (94,51 milliards d’euros), celle du groupe BMW (51 milliards d’euros) ou Renault (7,4 milliards d’euros).

Toutefois certains analystes, comme Philippe Houchois, de Jefferies, avaient relevé que la valorisation des constructeurs automobiles qui s’électrifie ne peut se calculer comme celle de Tesla. Ce dernier est un nouvel acteur qui conquiert un marché, qui part de zéro et connait une croissance considérable qui ne tarit pas, alors que les constructeurs “historiques”, à la croissance plus faible, cherchent surtout à convertir une clientèle existante à une nouvelle motorisation, et doivent financer la reconversion en investissant toujours dans des moteurs à carburant, et peuvent ainsi se retrouver dans un jeu à somme nulle.

Les augmentations de prix actuelles

Pour Profundo, les constructeurs “historiques” peuvent espérer, à terme, tirer une marge supérieure des voitures à batteries que celle avec des moteurs à combustion.

Cette étude paraît surprenante dans le contexte de crise actuel, où les autos électriques ne baissent pas de prix, au contraire, comme cela avait été promis, et sont souvent difficiles à livrer actuellement, notamment en raison des pénuries de composants électronique, et de la guerre en Ukraine, qui pousse le prix des matières premières vers le haut. Le rapport estime que les coûts de production ont augmenté de 5% en 2022, mais que cela impacte autant les autos électriques que les voitures à carburant. Il maintient que la tendance à la baisse du coût des batteries va continuer. Les troubles actuels ne seraient, selon T&E, que temporaires…

(1) L’organisation Transport&Environnement est financée par des fondations comme European Climate Foundation, Schwab Charitable Fund, The Norwegian Agency for Development and Cooperation), la Commission européenne, Quadrature Climate Foundation ou Hewlett Foundation ou le ministère allemand de l’Environnement.

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