Domino’s Pizza utilise-t-elle l’intelligence artificielle pour “fliquer” ses employés ?

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Maxime Defays Journaliste

Une technologie basée sur l’intelligence artificielle appelée “DOM Pizza Checker”, dont le but est de garantir des produits de qualité et qui respectent des standards stricts de la célèbre entreprise de pizzas, est actuellement expérimentée en Australie et en Nouvelle-Zélande. Mais on craint qu’elle ait également un autre but.

On n’arrête pas le progrès. Et le monde de la pizza n’y échappe pas. En Australie et en Nouvelle-Zélande, un système de garantie de qualité des produits (comprenez, sans défaut, voire parfaits) a été mis en place dans les Domino’s Pizza. Celui-ci répond au doux nom de “DOM Pizza Checker”, nous apprend korii, qui relaie une information de OneZero.

Comme son nom peut le faire deviner, il s’agit ici d’un robot qui va vérifier l’éventuelle perfection du produit fini. Concrètement, celui-ci est composé de plusieurs senseurs qui se placent au-dessus de la pizza, et qui grâce à l’intelligence artificielle et le “machine learning” (l’apprentissage automatique), parvient à analyser scrupuleusement si certains standards de qualité ou si certains critères stricts ont bien été respectés. Par exemple, cette technologie permet de jauger si le fromage recouvre correctement la pizza, ou encore si les aliments ont bien été répartis sur celle-ci.

Sur Twitter, la division australienne et néo-zélandaise de l’entreprise dit avoir souhaité remédier aux nombreuses insatisfactions répétées de leurs clients. “La première des plaintes que nous recevons est celle-ci: ‘Pourquoi ma pizza ne ressemble-t-elle pas à ce que j’ai commandé ?’. Nous vous présentons donc DOM Pizza Checker”, expliquait en mai le CEO de la division Océanie, Nick Knight, sur Twitter.

Une course à la “perfection” pour Domino’s ? En tout cas, une erreur est directement signalée par le robot au restaurant et ainsi à la personne qui en a la charge. On apprend aussi qu’une photo peut même être envoyée au client afin que celui-ci puisse juger si le produit qu’il a choisi corresponde bien à sa commande. Dans le cas contraire, il est même possible que la pizza soit repréparée entièrement.

Peut-être étendu au reste du monde à l’avenir (l’entreprise est implantée dans environ une soixantaine de pays), ce système semble a priori une initiative positive de la part l’entreprise, dont la volonté est probablement de satisfaire le plus possible sa clientèle et d’aider, grâce à la technologie, leurs salariés à perfectionner la préparation de leur pizza. C’est en tout cas ce à quoi ce robot est uniquement destiné, explique la chaîne de restaurants.

Mais d’autres ne l’entendent pas de cette oreille. Là où certains y voient une amélioration globale, d’autres y voient simplement la volonté de “fliquer” les salariés de l’entreprise, afin d’avoir une idée des “bons” ou des “mauvais” pizzaïolos et ainsi accentuer la pression et exiger ainsi une constante “performance”. La chaîne a tout de même tenté de rassurer : “DOM Pizza Checker est simplement un outil qui permet d’entraîner nos équipes, pas pour les punir d’avoir commis des erreurs”, expliquait un porte-parole à iTnews.

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L’article de OneZero explique bien que le recours aux nouvelles technologies peut également être un moyen détourné de mettre la pression sur le personnel. “Ce n’est que le début”, peut-on lire dans une opinion de Arwa Mahdawi, dans les colonnes du Guardian. Pour cette chroniqueuse, le système développé par Domino’s ne sont que les prémices de la surveillance au travail. Dans cette tribune, on apprend que Nick Knight (cité plus haut), haut responsable de Domino’s dans la région Océanie, avait récemment fourni de nouveaux détails, notamment que l’outil serait incorporé dans un système de “scorecard bonus” (de notation), afin d’identifier les restaurants les moins performants.

Mais le phénomène, s’il semble s’accentuer au fur et à mesure des performances technologiques, n’est pas nouveau. Une étude nous apprenait d’ailleurs en 2013 que des restaurants qui avaient installé des caméras de surveillance contre le vol avaient vu une augmentation de leur chiffre d’affaires, non pas à cause de la diminution de vols mais bien parce que les employés, sachant qu’ils étaient observés par des caméras, redoublaient d’efforts afin d’augmenter la vente des produits.

Mais quoi qu’il en soit, Domino’s serait loin d’être la seule à “fliquer” son personnel : cette “surveillance” devient en tout cas de plus en plus invasive et de plus en plus sophistiquée. De quoi s’en inquiéter ?

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