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Disney, les LGBT et la fin de la “neutralité” des entreprises

Lire la chronique d' Amid Faljaoui Amid Faljaoui, directeur des magazines francophones de Roularta.

Comme chacun le sait, les idées et les manières de penser qui ont cours aux Etats-Unis finissent tôt ou tard par arriver en Europe. Pensez au phénomène MeToo, par exemple.

C’est juste une question de temps, mais ces idées finissent toujours par arriver chez nous et de plus en plus vite d’ailleurs. Donc, cette chronique n’a qu’un seul but : montrer que nos entreprises européennes ne pourront bientôt plus éviter les débats sociétaux les plus vifs et les plus radicaux. Les dirigeants d’entreprises pensent que leur rôle, c’est de faire tourner la “baraque” ; autrement dit, de faire en sorte que leur boîte soit profitable, qu’elle s’occupe bien de ses employés, de ses clients et distribue des dividendes à ses actionnaires pour qu’ils soient satisfaits.

Bien entendu, cette vision de l’entreprise s’est élargie, depuis quelques années, à d’autres sujets, et tant mieux d’ailleurs. Les entreprises sont aujourd’hui soucieuses d’égalité entre les sexes, notamment au travers de la parité salariale. Les entreprises s’interdisent de pratiquer le racisme, au travers de leur politique de diversité, et les mêmes entreprises sont de plus en plus partie prenante de la lutte contre le réchauffement climatique. En résumé, les entreprises ne s’intéressent donc plus seulement au profit, mais jouent aussi leur rôle sociétal.

Jusque-là, je ne connais personne qui s’en plaint, sauf aux Etats-Unis. Le parti Républicain mène aujourd’hui un bras de fer avec les grandes entreprises américaines, qui sont accusées de mépriser les valeurs conservatrices. Le parti Républicain ne veut plus faire de cadeaux fiscaux aux grandes entreprises qu’il accuse de promouvoir des idées progressistes, au détriment de ses propres électeurs : que ce soit par exemple, ces entreprises, établies au Texas, qui proposent à leurs salariés de rembourser leurs frais de voyage pour cause d’avortement dans un Etat voisin. Ou que ce soit l’entreprise Disney World en Floride qui est menacée, par le gouverneur de cet Etat conservateur, de perdre ses avantages fiscaux car sous la pression d’une partie de ses salariés LGBT, le patron de Disney (qui lui au départ voulait rester bien en-dehors de toute cette histoire) s’est engagé publiquement à militer pour l’annulation d’une loi en Floride interdisant d’enseigner l’identité sexuelle à des enfants jusqu’à l’âge de 8 ans. Autrement dit, le gouverneur Républicain estime que des enfants de moins de 8 ans ne doivent pas recevoir un enseignement dans lequel on leur explique qu’ils ont le choix entre être “garçon” ou “fille”. Le gouverneur Républicain est furieux contre Disney qui milite contre sa loi et menace d’enlever, à la firme de Mickey, tous les avantages fiscaux et autres dont elle dispose en Floride.

En résumé oui, l’entreprise aux Etats-Unis et en Europe est devenue plus engagée, plus sociale et donc plus politique. Tant que c’était la parité en entreprise ou la défense du climat, il y avait moyen de trouver consensus, mais avec des sujets comme l’avortement ou l’identité sexuelle, l’entreprise se retrouve, et se retrouvera de plus en plus, forcée d’entrer dans des débats qu’elle aurait voulu éviter à tout prix.

Si vous vous posez la question de savoir pourquoi Elon Musk veut acheter Twitter, vous avez là un premier élément de réponse. A mon humble avis, l’entreprise ne sera plus l’espace neutre qu’elle a été depuis longtemps, elle sera de plus en plus politique même si c’est contre la volonté de ses dirigeants. C’est une question de temps en Europe mais c’est une quasi-certitude. Et vous, vous en pensez quoi?

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