Des banques belges impliquées dans des colonies israéliennes

Selon le rapport de DBIO, Belfius finance des activités en lien avec les colonies israéliennes en grande partie par l'intermédiaire de son gestionnaire d'actifs Candriam.

Des entreprises présentes en Belgique et des banques belges opèrent ou financent des activités en lien avec les colonies israéliennes dans le territoire palestinien occupé, selon un nouveau rapport de la coalition internationale “Don’t Buy into Occupation”(DBIO).

Selon une nouvelle recherche internationale “Don’t Buy into Occupation” (DBIO) dévoilée ce lundi, des entreprises et banques belges investissent des milliards dans des sociétés impliquées dans des violations des droits de l’homme en Palestine.

Au niveau européen, cinquante entreprises directement actives dans la politique israélienne illégale de colonisation ont des relations financières avec des institutions européennes, selon ce rapport basé sur des recherches du cabinet d’études néerlandais Profundo. Parmi celles-ci, citons IBM, Carrefour, Alstom, Caterpillar, Puma, Siemens, Vinci, Hyundai Heavy Industries, Volvo, ou encore des entreprises du tourisme comme TUI, Airbnb, Booking, eDreams et Tripadvisor.

Solvay, la seule société belge directement impliquée

Parmi ces sociétés, Solvay est la seule entreprise belge à être directement impliquée dans la colonisation israélienne, cite le rapport. La groupe fournit des fibres renforcées pré-imprégnées pour le drone Hermes 450 d’Elbit, une entreprise israélienne qui est le premier fournisseur de drones de l’armée nationale. Le groupe belge fournit aussi d’autres outils de surveillance utilisés dans les territoires palestiniens occupés.

En 2019, des produits Solvay ont aussi été observés sur le chantier de construction d’un pipeline de “contournement” à Bardala, dans la vallée du Jourdain, en territoire palestinien occupé. Grâce à ce pipeline, l’eau douce des sources d’eau palestiniennes est détournée vers les colonies israéliennes, tandis que les communautés palestiniennes elles-mêmes n’ont plus accès à l’eau, dénonce le rapport.

Or, selon les Principes directeurs des Nations Unies relatifs aux entreprises et aux droits de l’homme, que Solvay dit respecter, l’entreprise doit mettre fin aux activités liées à de graves violations des droits humains, comme c’est le cas dans le territoire palestinien occupé”, avance la coalition.

725 banques

Le rapport identifie par ailleurs, entre janvier 2019 et août 2022, un total de 725 banques, gestionnaires d’actifs, compagnies d’assurance et fonds de pension qui soutiennent des entreprises actives dans les territoires palestiniens occupés. Ces institutions financières européennes possèdent 115,5 milliards de dollars d’actions et d’obligations dans des entreprises actives dans les colonies israéliennes. Durant la période analysée, elles ont accordé 171,4 milliards de dollars de prêts et de souscriptions à ces entreprises.

Les entreprises financées par ces banques sont actives, entre autres selon “Don’t Buy into Occupation” (DBIO), dans la démolition de maisons palestiniennes dans les territoires occupés, la construction et l’expansion de colonies illégales en territoire occupé, dans les équipements et des composants pour espionner les civils palestiniens et dans l’exploitation illégale des ressources naturelles palestiniennes.

Plusieurs banques belges épinglées

La coalition comptabilise parmi elles quatre institutions financières belges qui ont des liens indirects avec l’occupation de territoires palestiniens par Israël : KBC, AvH, Beflius, et Degroof Petercam.

KBC est ainsi l’un des principaux financiers de ces entreprises, avec des relations d’une valeur de 1,372 milliard de dollars.

Belfius finance, en grande partie par l’intermédiaire de son gestionnaire d’actifs Candriam, des entreprises actives dans la démolition de maisons palestiniennes, la construction de colonies, la fourniture d’équipements et de pièces de surveillance et l’exploitation illégale de ressources naturelles palestiniennes, pour un montant de 227 millions de dollars.

Delen Private Bank, qui est à 78,5% dans les mains de Ackermans & van Haren financent pour 540 millions de dollars et Bank Degroof Petercam pour 421 millions de dollars.

BNP Paribas, le plus grand financier européen

Trois institutions financières non belges, mais bien présentes en Belgique, financent également des “entreprises profitant de la colonisation israélienne“.

La banque française BNP Paribas est en tête de liste des plus grands financiers européens de ces entreprises, avec des relations financières d’une valeur de 28,102 milliards de dollars. Les investissements de la banque franco-belge comprennent 5,96 milliards d’euros dans des entreprises fournissant des équipements et des pièces pour espionner les civils palestiniens, 2,945 milliards d’euros dans des entreprises jouant un rôle crucial dans la construction de colonies, 2,268 milliards d’euros dans des entreprises fournissant des machines pour la démolition de maisons palestiniennes, et 174 milliards d’euros dans des fournisseurs d’armes à l’armée israélienne, détaille le rapport.

Des banques belges impliquées dans des colonies israéliennes

La banque néerlandaise ING apporte un total de 7,068 milliards de dollars. Les financements de la banque française AXA représentent 967 millions de dollars.

Un appel au ministre des Finances et de l’Économie

La coalition “Don’t Buy into Occupation” demande au gouvernement fédéral d’exercer son influence en tant que propriétaire de Belfius et actionnaire principal (7,7%) de BNP Paribas pour que ces banques revoient leurs relations avec les sociétés actives dans les colonies israéliennes.

Les organisations 11.11.11 et FairFin qui font partie de la coalition, appellent les banques susmentionnées à prendre leurs responsabilités. A l’instar des principaux fonds de pension norvégiens et néerlandais, à faire en sorte que les entreprises de leur portefeuille “se désengagent de l’industrie coloniale israélienne”, selon leurs revendications. “Si cela ne donne pas de résultats concrets dans un délai raisonnable, ils devraient se défaire eux-mêmes de ces entreprises“, estiment-elles.

Le plus grand fonds de pension de Norvège s’est en effet retiré de pas moins de 16 entreprises ayant des liens avec les colonies israéliennes, fait savoir la coalition. En septembre 2021, la Norges Bank – qui gère le “Government Pension Fund Global” de Norvège – a également annoncé qu’elle mettrait fin à tous ses investissements dans deux entreprises présentes dans les colonies.

Autres exemples bancaires à l’appui donné par les oragnisations : depuis 2010, de nombreuses autres institutions, banques et entreprises – entre autres Dexia Crédit Local (France) , Deutsche Bank (Allemagne), Barclays (Royaume-Uni), HSBC (Royaume-Uni), AXA IM (France) Danske Bank (Danemark), Europcar Groupe (France) – ont décidé de se désinvestir partiellement des entreprises impliquées dans les colonies israéliennes.

Bientôt des sanctions ?

Dans leurs recommandations, les organisations 11.11.11 et FairFin adressent un appel clair au ministre des Finances Van Peteghem (CD&V) et au ministre de l’Économie Pierre-Yves Dermagne (PS).

Ces activités et financements liés à la colonisation israélienne pourraient bientôt ne plus être impunis. Dans sa note de politique générale pour 2023, le ministre Dermagne annonce en effet “avoir demandé une étude sur la possibilité pour la Belgique de sanctionner les entreprises belges reprises sur la liste des Nations unies des institutions impliquées dans des activités directement ou indirectement liées aux colonies israéliennes”.

Le ministre souhaiterait des propositions de mesures ciblées et proportionnées visant à dissuader les entreprises belges de “développer des activités de ce type qui contribuent ainsi à la politique de colonisation israélienne”, ainsi que des propositions pour engager la responsabilité de ces entreprises et de leurs dirigeants, explique le journal économique.

*La coalition “Don’t Buy into Occupation” (DBIO) est un projet commun de 24 organisations palestiniennes, régionales et européennes basées en Belgique, en France, en Irlande, aux Pays-Bas, en Norvège, en Espagne et au Royaume-Uni (RU). L’objectif de la coalition est d’examiner les relations financières entre les entreprises opérant dans les colonies israéliennes illégales dans le territoire palestinien occupé et les institutions financières européennes.

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