De l’intelligence artificielle pour “débrider” les éoliennes
La spin-off de l’ULiège BlacklightAnalytics a testé pendant un an, sur un parc éolien wallon, son algorithme capable de mieux prédire les congestions sur le réseau. Résultat? 5 à 6% d’énergie verte supplémentaire injectée.
Le gestionnaire du réseau de transport d’électricité, Elia, mettait un nouveau coup de pression sur le gouvernement fédéral la semaine dernière. Afin de compenser la mise à l’arrêt des réacteurs nucléaires prévue en 2025, il est plus qu’urgent d’installer de nouvelles capacités. 3,6 GW supplémentaires seront nécessaires, estime Elia. Soit bien plus que les 2,3 GW prévus par la ministre de l’Energie, Tinne Van der Straeten, via la construction de nouvelles centrales à gaz.
Le renouvelable a bien évidemment aussi un rôle à jouer, l’objectif étant de faire monter sa part dans le mix énergétique à 32% en 2030, contre 13% aujourd’hui. Parallèlement aux coûteux investissements réalisés en vue de renforcer les infrastructures de distribution et de transport pour leur permettre d’accueillir davantage de production verte, des solutions intelligentes émergent afin d’accélérer, à moindre coût, l’intégration des énergies renouvelables.
Fondée par Damien Ernst, Quentin Gemine et Julien Confetti, la spin-off de l’ULiège Blacklight Analytics, qui vient de fusionner avec l’éditeur de logiciels pour le secteur énergétique Haulogy, a mis au point un outil permettant de monitorer le réseau en temps réel, d’anticiper les risques de congestion et d’ainsi repousser les limites d’injection imposées aujourd’hui aux éoliennes.
Le caractère intermittent de la production d’énergie renouvelable fait que l’offre et la demande ne sont pas toujours alignées. Pour éviter les risques de congestion et donc les pannes, la production de nombreux parcs éoliens et champs photovoltaïques est bridée à des seuils de sécurité inflexibles. “C’est comme si, pour éviter les bouchons, on n’autorisait qu’une seule voiture par ménage”, compare Quentin Gemine.
150 ménages supplémentaires
L’algorithme de Blacklight Analytics vient d’être testé pendant un an sur le parc éolien de Lierneux, en province de Liège. Un parc installé en zone d’exploitation forestière, dont les six éoliennes exploitées par Luminus ont une capacité totale d’injection de 19,2 MW, pouvant alimenter 9.200 ménages. Le hic, c’est qu’elles n’en alimentent aujourd’hui “que” 5.500 car elles ont été bridées à 11,7 MW. Le réseau local, construit pour distribuer de l’électricité à une densité de population relativement faible, n’est en effet pas en mesure d’accueillir toute la production.
La solution intelligente a toutefois permis au parc d’injecter 5 à 6% d’énergie en plus sur le réseau, avec un pic à 10% en fin de projet pilote. “750 ménages supplémentaires ont pu être alimentés en énergie renouvelable”, explique Annabel Vanbéver, head of corporate communication chez Ores, premier gestionnaire wallon de réseaux de distribution.
La technologie est testée pour le moment sur un autre parc éolien lui aussi exploité par Luminus, à Floreffe, en province de Namur. “Couplée aux investissements dans nos infrastructures, cette solution, ainsi que d’autres, devraient nous permettre de multiplier par trois notre capacité d’accueil du renouvelable d’ici 2028”, conclut la responsable.
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