Contre la haine raciale, de plus en plus de grandes marques rejoignent l’appel au boycott de Facebook
De plus en plus de grandes marques se joignent à l’appel des annonceurs à boycotter Facebook. L’appel a été lancé la semaine dernière par des associations de défense des Noirs américains et de la société civile qui reprochent au réseau social de ne pas lutter suffisamment contre les propos racistes ou haineux.
Ces derniers jours, plusieurs grandes entreprises, dont les géants Verizon, Levis, Unilever et Coca-Cola, ont suspendu leurs budgets publicitaires sur le réseau social Facebook pour l’obliger à mieux lutter contre les propos racistes ou haineux.
Cet appel a été lancé la semaine dernière par des associations de défense des Noirs américains et de la société civile. Baptisée #StopHateForProfit (“Non à la haine pour les profits”), cette campagne est notamment soutenue par la National Association for the Advancement of Colored People (NAACP), la grande organisation de défense des droits civiques des Afro-Américains, une organisation de lutte contre l’antisémitisme, la Anti Defamation League, ou encore Sleeping Giants.
Tous les réseaux sociaux, mais Facebook tout particulièrement, se voient reprocher de ne pas faire assez pour éliminer les publications racistes ou haineuses sur son site. Elles ont appelé à un boycott de la publicité sur ces plateformes pendant le mois de juillet et au-délà.
Vendredi, Unilever a annoncé interrompre ses campagnes publicitaires sur Facebook, Twitter et Instagram aux Etats-Unis jusqu’à la fin de l’année au moins. “Les marques ont le devoir d’aider à construire un écosystème numérique fiable et sûr” a déclaré dans un communiqué le géant anglo-néerlandais de l’agroalimentaire et des cosmétiques.
Starbucks a annoncé dimanche faire “une pause” dans ses pubs sur tous les réseaux sociaux aux Etats-Unis pour montrer son “opposition aux discours de haine” qui s’y répandent, rejoignant ainsi dans sa démarche d’autres marques connues. A l’instar de Coca-Cola, Starbucks ne s’associe pas spécifiquement à cette action. La chaîne va aussi continuer à dialoguer avec ses clients et ses employés sur les réseaux.
Mercredi, Ben & Jerry’s a décidé de ne plus acheter d’espace publicitaire sur Facebook et sa filiale Instagram. Bien que racheté en 2000 par Unilever, le fabricant de glaces a conservé son indépendance et le souhait de demeurer une entreprise solidaire et engagée.
Patagonia, la marque de produits de loisirs de plein air, s’est associée à l’appel au boycott et est venue rejoindre ses concurrentes North Face ou encore REI dans le mouvement.
“Nous allons immédiatement arrêter toute nos publicités sur Facebook et Instagram, au moins jusqu’à la fin juillet, en attendant que le géant des réseaux sociaux prenne de vraies mesures”, a ajouté Patagonia. North Face l’avait précédé vendredi: “On rejoint en quittant”, avait-il tweeté précisant ultérieurement que cela concernait toutes les plateformes de Facebook.
L’appel a, entre autres, été relayé par l’humoriste Sacha Baron Cohen sur Twitter:
Un impact financier difficile à évaluer
Ces critiques – qui ne sont pas neuves – ont pris de l’ampleur depuis la mort de George Floyd, un homme noir asphyxié par un policier blanc à Minneapolis et dont la vidéo a choqué le monde entier et déclenché des manifestations anti-racistes massives aux Etats-Unis et ailleurs. La chaîne Starbucks elle-même, qui emploie pourtant beaucoup de membres des minorités visibles aux Etats-Unis, n’est pas exempte de critiques. En avril 2018, l’arrestation de deux hommes noirs dans un Starbucks de Philadelphie avait fait grand bruit, conduisant le groupe à fermer ses 8.000 cafés aux Etats-Unis pour une après-midi pour faire suivre à ses employés un séminaire de formation à la diversité raciale.
Les associations reprochent notamment à Facebook d’avoir inclus le site Breitbart, proche de l’extrême droite américaine, parmi ses partenaires médias pour son fil d’actualités. Plus récemment, elles n’ont pas accepté le refus du patron Mark Zuckerberg de modérer des messages polémiques de Donald Trump, considérés par Twitter, de nombreux observateurs et employés de Facebook comme relevant de l’incitation à la violence. Les messages du président portaient sur les manifestations et émeutes qui ont suivi la mort de George Floyd.
Ce n’est d’ailleurs pas la première fois que le réseau social est ciblé : depuis qu’a éclaté en 2018 le scandale des campagnes de manipulation de l’opinion publique pour l’élection américaine de 2016, la politique de laisser-faire de la plateforme aux deux milliards d’utilisateurs dans le monde est régulièrement pointée du doigt.
Pour l’heure l’impact financier de cet appel est difficile à quantifier mais ne représente qu’une toute petite portion des revenus de Facebook, qui tire l’essentiel de ses énormes bénéfices (18,5 milliards de dollars en 2019) de la publicité en ligne.