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CMB, Pairi Daiza, Spadel : pourquoi quittent-elles la Bourse ?

C’est le phénomène en vogue dans l’actualité économique belge de ces deux dernières semaines : les sorties de Bourse par rachat d’actions propres. CMB, Pairi Daiza et Spadel ont ainsi successivement annoncé avoir l’intention de racheter les parts flottantes de leur capital, dans les trois cas avec une prime sur le cours actuel de l’ordre de 20 %.

Les raisons qui guident ces entrepreneurs familiaux – car ils le sont tous les trois, si l’on considère qu’Eric Domb, en tant que fondateur et CEO de Pairi Daiza, gère sa société comme un père de famille – sont multiples. Avant d’évoquer les aspects économiques, pointons d’abord un peu de convenance personnelle. D’ailleurs, ces patrons ne s’en cachent pas : les contraintes réglementaires liées à la cotation pèsent (trop) lourd. Et s’ils peuvent se permettre le luxe de s’en défaire, qui plus est en rationnalisant leur actionnariat, grand bien leur fasse. Il y a ensuite, dans les trois cas, un manque de liquidité des titres cotés, qui induit une stagnation de leur valeur. Or, si l’objectif premier d’une introduction en Bourse est de lever des fonds nécessaires à la croissance, à plus long terme, il s’agit aussi de doper la valeur de l’entreprise en laissant penser au marché que les rendements futurs seront positifs. Si un patron décide de racheter les actions de son entreprise, c’est donc soit qu’il ne croit lui-même plus dans la capacité de son entreprise à générer des rendements futurs suffisants à court terme – et cela peut simplement provenir de choix stratégiques – soit qu’il estime que la Bourse sous-évalue son entreprise, soit un peu les deux. Encore faut-il avoir les moyens de racheter… ou de pouvoir se financer à un coût inférieur au rendement espéré de l’opération. Vu la faiblesse des taux d’intérêt actuelle, c’est sans doute ce second raisonnement qui prévaut. D’autant que pour un patron qui connaît son entreprise jusqu’au bout des ongles, le risque opérationnel est limité à son maximum. Reste le risque patrimonial – celui de mettre tous ses oeufs dans le même panier – mais ce n’est généralement pas celui-là qui est de nature à effrayer l’entrepreneur dans l’âme…

La place boursière belge est-elle trop étroite pour assurer une liquidité suffisante aux entreprises qui y entrent ?

Marc Saverys, Eric Domb et Marc du Bois, en signifiant leur intention de quitter le marché boursier, donnent ainsi l’impression de vouloir se faciliter la vie… et soustraire celle de leur entreprise aux attentes parfois excessives de certains actionnaires. Prennent-ils une sage décision ? Sans doute. Ils ne sont d’ailleurs pas les seuls à le penser : depuis quelques années, certains fonds d’investissement – surtout américains, mais qu’à cela ne tienne – se focalisent sur des entreprises ayant lancé des programmes de rachat d’actions propres (forcément pas toutes), ces opérations laissant précisément penser que leur valeur est sous-estimée. Fuyez le marché, il revient au galop… !

En attendant, ces annonces successives posent aussi la question de la viabilité de la Bourse de Bruxelles (la Bourse, la vie, on y revient encore…). La place boursière belge est-elle trop étroite pour assurer une liquidité suffisante aux entreprises qui y entrent ? Peut-être. A moins que l’on ne considère qu’une Bourse à deux vitesses n’est pas un problème et permet de contenter tous les types d’actionnaires. Point de problème de liquidité pour des multinationales comme Engie (ex-GDF Suez) ou AB InBev : d’ailleurs, la majeure partie des ordres placés sur leurs titres le sont au départ de Londres. Les plus petites sociétés, essentiellement locales, et qui n’ont mis sur le marché qu’une partie restreinte de leurs titres, devront se contenter d’une liquidité plus faible. Et leurs actionnaires vivre avec l’idée de les garder longtemps en portefeuille. A moins qu’on ne les leur rachète de force…Dure, la vie de boursicoteur !

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