Cinq tendances pour sortir gagnant de l’économie post-coronavirus

“The New Normal”, tel était l’intitulé de la conférence de rentrée du Belgian Finance Center organisée conjointement avec Deloitte. Objectif : mieux comprendre à quoi ressemblera le monde de l’après-Covid et comment s’y adapter en tant qu’entreprise pour faire partie des gagnants de la crise. Morceaux choisis.

Comment réagir à la pandémie actuelle et prospérer une fois la crise terminée ? Telle était la question au coeur de la conférence organisée le 14 septembre dernier par le Belgian Finance Center en collaboration avec Deloitte. Banquiers, assureurs, consultants, chasseurs de têtes, chefs d’entreprise, etc. : ils étaient plus de 350 à s’être donné rendez-vous à distance pour assister au webinaire du cabinet de conseil sur le sujet et entendre les témoignages de trois patrons face à la crise, à savoir Luc Bertrand (président du holding Ackermans & van Haaren), Hans De Cuyper (actuel CEO d’AG Insurance et futur CEO d’Ageas) et Daniel Falque (CEO de KBC Belgium).

1. Tendances de fond

La crise que nous vivons aujourd’hui est en train de nous projeter dans un monde qui, selon Deloitte, ne sera plus du tout de celui de 2019. Le cabinet de conseil a en effet identifié six tendances macroéconomiques de fond qui, combinées au Covid, redessinent le paysage économique belge et international et vont fortement impacter les entreprises dans les années à venir.

Avec le Covid, le ‘speed to market’ devient extrêmement important : prendre la bonne direction très rapidement.

Olivier de Groote, Partner et financial services industry leader chez Deloitte

Cela va du caractère durable de leurs activités et leur raison d’être (lire l’encadré ci-dessous “Les entreprises sans ‘purpose’ disparaîtront”) jusqu’à l’accélération de l’adoption des nouvelles technologies en passant par le rôle accru des autorités publiques afin d’assurer un équilibre entre intérêts sociétaux et intérêts économiques, le rééquilibrage difficile entre la globalisation et le “local”, l’accès aux sources de financement ainsi que le dilemme du consommateur qui hésite entre ses souhaits et ses valeurs.

“L’impact de ces tendances de fond varie bien sûr d’un secteur à l’autre et d’une entreprise à l’autre, situe Olivier de Groote, partner et financial services industry leader chez Deloitte. Certaines comme la transition écologique s’inscrivent aussi davantage dans le long terme tandis que d’autres comme la digitalisation ont déjà aujourd’hui un impact, parfois même brutal. Mais, en revanche, elles sont toutes très importantes. Croire qu’il est possible d’y échapper est un non-sens complet. Il est important de bien les comprendre et de les intégrer dans la stratégie de l’entreprise pour pouvoir espérer prospérer à l’avenir.”

2. “Game changers”

Face à ces tendances de fond et au Covid qui accélère la transformation de l’économie, Deloitte a identifié une série de réponses (game changers) permettant de s’adapter à ce nouveau monde, synonyme pour certains – dont Daniel Falque – d’opportunités (lire l’encadré ci-dessous “Une période passionnante pleine d’opportunités”). Il s’agit ici de la vitesse de réaction d’une entreprise et de son adaptabilité au changement, de sa capacité à innover et à se réinventer, de sa résilience opérationnelle, de ses réserves de cash-flow et de sa solidité financière, de l’organisation du travail et, enfin, de sa raison d’être dans un monde amené à être de plus en plus durable.

Et que constate Deloitte ? “Que les entreprises qui sortent aujourd’hui renforcées de la crise sont celles qui avaient déjà implémenté avant ces game changers, note Olivier de Groote. En particulier le digital mais aussi la culture et les valeurs qui sous-tendent les nouveaux modes de travail : télétravail, mobilité, etc.”

Exemple ? Les banques, qui ont massivement investi dans le digital ces dernières années, et qui récoltent aujourd’hui les fruits d’une vision à long terme. Ces game changers ne doivent donc pas être considérés comme des nice-to-have mais comme des conditions sine qua non pour rester pertinent sur son marché, estime le consultant.

Cinq tendances pour sortir gagnant de l'économie post-coronavirus
© pg

3. Réagir très vite

Dans ce monde en plein changement, “il est important d’aller très vite”, poursuit Olivier de Groote. Parmi les six game changers mentionnés ci-dessus, il en est en effet un que le consultant considère comme primordial : la vitesse de réaction.

“La crise a démontré l’importance de l’agilité pour les entreprises. Elles n’ont pas des années, des mois ou même des semaines pour réagir aux nouvelles circonstances. On attend d’elles qu’elles pivotent leurs activités et leurs opérations en quelques jours. Elle doivent appliquer le principe : speed over perfection. Il ne faut pas attendre pour lancer un produit que tout soit terminé à 100 %. Faites-le et opérez des ajustements après.”

Pour cela, “il faut bien sûr un management capable de prendre les bonnes décisions et d’exécuter rapidement, ajoute Olivier de Groote. Du CEO au CFO en passant par le COO, le CIO et le CHRO, tout le management team est impacté. Mais chacun a son rôle particulier. Le CEO doit bien comprendre la disruption sur son secteur et son entreprise. Pour le CFO, ce sont les alternatives de financement en fonction de différents scénarios. Pour le CIO, c’est l’accélération du digital, typiquement le cloud qui n’est pas seulement un moyen de réduire les coûts mais de se réinventer. Pour le COO, c’est la réorganisation de la chaîne d’approvisionnement en cas de nouveaux chocs. Pour le CHRO, c’est la nouvelle organisation du travail. Etc.”

Innover n’est pas qu’une question de moyens financiers ou de technologie, c’est aussi une question de culture.

Daniel Falque, CEO de KBC Belgium

4. Gestion des talents

Alors que le télétravail a gagné en popularité avec la crise, Deloitte est convaincu qu’une révolution profonde est devant nous en matière d’organisation du travail. “Revenir à la situation antérieure n’est pas possible, estime Olivier de Groote, considérant cette thématique du future of work comme le deuxième plus important des six game changers. Le télétravail garantit une plus grande flexibilité, une meilleure mobilité et une meilleure satisfaction des employés. Les entreprises vont devoir organiser le travail différemment et trouver un équilibre entre le travail à domicile et au bureau. Trois éléments sont ici importants : la culture d’entreprise, une approche à 360°, fournir les outils technologiques nécessaires et leur adoption.” A l’image par exemple de ce qui se fait chez AG Insurance, comme l’explique son CEO Hans De Cuyper ( lire l’encadré “L’avenir n’est pas au télétravail à 100 %”).

5. Rôle sociétal

En guise de conclusion à sa présentation, Olivier de Groote a enfin souligné l’importance de la dimension corporate social responsibility, c’est-à-dire l’engagement à résoudre un problème sociétal, troisième plus important game changers de la liste, selon lui. “Le purpose, la raison d’être, d’une entreprise n’est plus un concept à la mode, c’est une réalité. Les entreprises qui veulent continuer à recruter des talents vont devoir démontrer qu’elles ont une raison d’exister qui contribue à un monde meilleur. Celles qui n’assument pas ce rôle sociétal à travers cette durabilité n’atteindront pas la jeune génération. Les entreprises qui accordent la priorité à ces valeurs seront par contre beaucoup plus attractives en tant qu’employeurs.”

“Les entreprises sans ‘purpose’ disparaîtront”

Luc Bertrand (Ackermans & van Haaren) : “En tant qu’entreprise, Ackermans & van Haaren est très focalisée sur le changement climatique et la transition énergétique, comme en témoigne notre rôle majeur dans la construction de parcs éoliens et dans l’extraction de matières premières pour les énergies alternatives. Nos banques (Delen et Van Breda, Ndlr), accordent beaucoup d’attention à l’origine de l’argent des clients. Nous gardons l’ensemble des documents à jour à travers les générations, afin que tout fonctionne conformément aux réglementations anti-blanchiment. ”

Luc Bertrand, président de Ackermans & van Haaren
Luc Bertrand, président de Ackermans & van Haaren© PG

“L’avenir n’est pas au télétravail à 100 %”

Hans De Cuyper (AG Insurance) : “Du jour au lendemain, 95 % de nos employés se sont retrouvés en télétravail, avec une productivité qui a légèrement augmenté. Ce succès a été construit avant et pas pendant la crise. Néanmoins, l’avenir n’est pas à 100 % de télétravail. Deux à trois jours de télétravail par semaine constituent probablement l’équilibre idéal pour le bien-être des employés. Dernièrement, nous avons mis en route une campagne interne, #ReConnectAG, au moment où les employés sont revenus au bureau parce que cela était nécessaire dans certaines situations (formations, réunions, accueil de nouveaux collaborateurs, stimulation de la créativité). Nous investissons dans le digital pas seulement pour réduire les coûts mais aussi pour augmenter la qualité du travail. ”

Hans De Cuyper, CEO de AG Insurance
Hans De Cuyper, CEO de AG Insurance© PG

“Nous vivons une période passionnante pleine d’opportunités”

Daniel Falque (KBC Belgium) : “En tant que bancassureur, la crise du Covid a eu un impact sévère sur notre activité de prêt hypothécaire et sur notre coût du risque (crédits défaillants, Ndlr). Mais c’est aussi un accélérateur de changement puisque, un peu forcés par les circonstances, un grand nombre de nos clients se sont enfin ouverts au digital. Ainsi, 85% des prêts à tempérament et 21% des prêts hypothécaires sont désormais vendus de manière digitale chez KBC. De même, avec notre application KBC Mobile, nous vendons plus de 100.000 tickets de train et bus en moyenne par mois. Nous mettons donc fortement l’accent sur l’innovation mais aussi sur la vitesse d’innovation. En novembre, nous lancerons Kate, une assistante digitale personnelle basée sur de l’intelligence artificielle qui offrira proactivement des conseils et des solutions sur mesure à nos clients. Et non, innover n’est pas qu’une question de moyens financiers ou de technologie, c’est aussi une question de culture d’entreprise et de gestion des talents ! En réalité, nous vivons aujourd’hui une période passionnante pleine d’opportunités…”

Daniel Falque, CEO de KBC Belgium
Daniel Falque, CEO de KBC Belgium© belga images

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