Chômage, invalidité, énergie… Les remèdes-choc du FMI pour l’économie belge

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Christophe De Caevel
Christophe De Caevel Journaliste Trends-Tendances

Le FMI recommande à la Belgique de réduire les dépenses de 4,6 milliards d’euros, dès l’an prochain, afin d’éviter tout emballement de la dette. En revanche, les investissements publics devraient continuer à croître d’ici 2030 pour réaliser les infrastructures nécessaires à la transition.

“Les services du FMI estiment qu’il conviendrait que le déficit budgétaire global ne progresse pas en 2023 et qu’il devrait être idéalement réduit”, lit-on dans les recommandations annuelles adressées ce mercredi par le Fonds monétaire international à la Belgique. Nous en sommes loin puisque le projet de budget 2023, qui fait actuellement l’objet de discussions houleuses au Parlement entre partis de la majorité, prévoit au contraire une aggravation du déficit (5,8 contre 5,2% du PIB cette année), afin de soutenir au mieux les ménages les plus fragilisés face à la hausse des prix de l’énergie.

Le FMI ne semble pas opposé au principe de ces aides et salue “le soutien substantiel et rapide aux ménages et autre entreprises” dans cette crise énergétique. “La réponse des autorités a été appropriée”, résume Mark Horton, directeur de l’équipe du FMI qui a analysé la situation belge. Le problème, c’est que ces aides ne sont pas suffisamment ciblées et surtout qu’elles s’ajoutent à une hausse structurelle des dépenses liées au vieillissement, ce qui laisse augurer de déficits au-delà des 5% du PIB dans les prochaines années.

Voilà pourquoi le FMI recommande d’enrayer, dès 2023, un potentiel emballement des déficits publics. Cela nécessite, selon les calculs de l’institution internationale, un effort budgétaire en 2023 de l’ordre de 0,8% du PIB (4,6 milliards d’euros) “ou davantage”. “L’ajustement devrait être d’une ampleur similaire (ou supérieure) les années suivantes, et ce jusqu’à ce que le niveau de déficit stabilisant la dette, puis l’équilibre structurel, soient atteints, précise le FMI. Si cet ajustement est important, notamment en raison du ralentissement de l’économie, le fait d’agir dès 2023 et de s’engager à suivre une trajectoire d’ajustement pluriannuelle crédible aura une incidence importante sur l’inflation, les vulnérabilités, la marge de manoeuvre budgétaire et la confiance.”

Trois leviers d’économie

Quels leviers actionner pour réaliser ces efforts ? Celui des recettes ne reçoit guère d’écho ici. “Les taux d’imposition sont élevés, et de nouvelles augmentations auraient probablement un impact négatif sur le respect des obligations fiscales et sur la croissance économique”, estime le FMI. Cela ne l’empêche pas de soutenir les principes de la réforme envisagée par le ministre des Finances Vincent Van Peteghem (CD&V), à savoir un élargissement des assiettes fiscales pour financer une baisse de la charge sur le travail. Les services du FMI suggèrent que les réformes rendent “l’imposition du capital plus cohérente entre les sources de revenus”.

Le levier des investissements n’est pas non plus très prisé par le FMI pour équilibrer les comptes publics de la Belgique. Il considère au contraire que les dépenses d’investissement demeurent trop faibles en Belgique et que cela “entrave les gains de productivité et la croissance” (le rapport évoque l’exemple des “goulets d’étranglement en matière de mobilité”). Ces investissements semblent en outre nécessaires pour réussir la transition écologique de l’économie. Le FMI salue donc l’engagement du gouvernement fédéral de porter les investissements publics à 4% du PIB d’ici 2030. M. Horton précise toutefois clairement que ces investissements ne doivent pas être immunisés dans la comptabilité publique comme cela est parfois demandé.

Le FMI estime globalement que, vu le niveau des dépenses publiques (54% du PIB, selon l’OCDE), “des gains d’efficacité sont possibles”. Parmi les sources d’économies, l’instance internationale évoque un ciblage des aides énergétiques, un taux de remplacement et la durée des allocations de chômage, ainsi que l’accès aux indemnités de maladie et d’invalidité. “Les tensions sur le marché de l’emploi offrent une opportunité de s’attaquer aux réformes des prestations sociales afin de réduire les pièges à l’emploi” affirme le FMI.

Un index maintenu mais recalibré

Enfin, le FMI émet plusieurs recommandations de moyen terme en vue d’atteindre l’objectif d’un taux d’emploi de 80% en 2030 (contre 72% actuellement). Il balaie très large en évoquant la fixation des salaires, les conditions de licenciement ou la flexibilité. “La réduction et le plafonnement de la durée des allocations de chômage inciteraient davantage à la recherche d’un emploi, de même qu’une diminution plus souple des prestations sociales lorsque les bénéficiaires acceptent un emploi”, lit-on encore dans ce rapport qui cite également l’octroi d’un soutien personnalisé pour le retour au travail de personnes en invalidité.

Le FMI ne remet pas en cause le principe de l’indexation automatique des salaires qui, dit-il, “permet de protéger le pouvoir d’achat des ménages assez rapidement”. Il pointe cependant son revers, à savoir le fait que cela “risque d’affaiblir les bilans des entreprises et leur compétitivité internationale, et donc de freiner l’investissement et la croissance économique”. Le FMI suggère dès lors d’exclure du calcul de l’indice-santé des produits “sensibles aux fluctuations des prix mondiaux des matières premières”, comme le gaz et l’électricité. Cela réduit la charge de l’ajustement à l’inflation reposant sur les épaules des employeurs. Les ménages les plus défavorisés recevraient des aides publiques ciblées.

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