Biotechs: pourquoi nos entreprises sont leaders mondiaux dans ce secteur d’avenir

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Mithra qui pèse 1 milliard en Bourse, MaSTherCell qui va doubler ses effectifs, Osimis qui lève 2 millions d’euros, le français Graftys qui s’installe à Liège, etc. Chaque semaine nous amène au moins une bonne nouvelle pour le monde des biotechs wallonnes. Un succès qui ne doit rien au hasard.

Quand on parle biotechs, vous visualisez sans doute quelques chercheurs en tablier blanc dans un labo. Mais les biotechs aujourd’hui, c’est bien plus que cela. Il s’agit d’entreprises employant plusieurs dizaines, voire plusieurs centaines de personnes. En 12 ans, le nombre d’emplois directs dans les sciences du vivant en Wallonie a été multiplié par deux pour dépasser désormais les 15.000 unités (équivalents temps plein). Et si on ne considère que les seules PME, c’est une multiplication par trois. La valeur ajoutée créée par les membres du pôle de compétitivité BioWin est passée, depuis 2005, de 3,3 à 8,5 millions d’euros. Depuis 2005, les start-up wallonnes de la pharma ont levé 1,8 milliard d’euros (dont 486 millions rien qu’en 2018 ! )

Par rapport à d’autres pays, la qualité de l’offre d’infrastructures (laboratoires de recherche, unités de production) est vraiment excellente.” Enrico Bastianelli (Graftys)

Cet indéniable succès ne doit rien au hasard. Il repose sur des racines profondément ancrées dans le tissu économique belge. Racines que les pouvoirs publics ont habilement nourries pour qu’elles portent toujours plus de fruits. Eh oui, on critique volontiers le monde politique mais, ici, il a joué un rôle très intéressant de catalyseur. Voici donc la structure de ce grand arbre que l’on se plaît de plus en plus à appeler, avec un brin de fierté, ” Biotech Valley “.

1. Les racines : la présence de grandes entreprises

Au départ, donc, il y a la présence de grandes entreprises pharmaceutiques. Les UCB, Janssen, GSK et consorts sont implantées en Belgique depuis des décennies. ” Cette présence existe évidemment dans d’autres pays européens mais, chez nous, ces multinationales possèdent souvent bien plus qu’un siège social ou des centres de distribution, explique Sylvie Ponchaut, directrice du pôle de compétitivité BioWin. Beaucoup font aussi de la recherche et de la production, des activités à haute valeur ajoutée qui ont un impact important sur l’écosystème. ”

En fait, c’est tout le top 10 mondial de la pharma qui a développé des activités significatives en Belgique. Une densité très rare qui a justifié quelques décisions fiscales ciblées pour pérenniser ce tissu : la réduction du précompte pour l’emploi de chercheurs, et l’exonération des revenus de brevets obtenus et utilisés en Belgique. Ces mesures, prises sous les gouvernements Verhofstadt, sont toujours soulignées avec insistance par tous les acteurs. ” Ces instruments fiscaux sont comme des petits tapis rouges que l’on déroule pour le secteur, analyse Kenneth Bertrams, professeur d’histoire économique (ULB) et auteur d’un ouvrage sur un siècle d’industrie chimique et pharmaceutique en Belgique. C’est une véritable politique industrielle, un levier essentiel dans le développement de l’économie de la connaissance et l’émergence de nombreuses sociétés de biotechnologie en Belgique. ”

Cet apport historique est un atout pour le secteur de la pharmacie, atout que ne possèdent pas, par exemple, les start-up numériques qui émergent aujourd’hui sur les campus universitaires. ” Ces grandes entreprises ont aidé à créer des vocations, analyse Philippe Degive, investment manager à la SRIW, la Société régionale d’investissement de Wallonie. Ce sont des fournisseurs de savoir-faire pour les nouvelles sociétés. Il n’est pas rare de voir des cadres de grands groupes créer ou rejoindre des start-up. Cela peut aussi aider à l’adossement de ces biotechs à l’industrie pharma par des accords de licence, de commercialisation, des investissements et parfois un rachat. ” Et il arrive même qu’une grande entreprise crée directement sa start-up : l’an dernier, UCB a lancé Syndesi pour développer un projet de médicament contre la maladie d’Alzheimer.

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2. Le tronc : l’excellence et la densité des hôpitaux et des universités

Ces grandes entreprises pharmaceutiques n’étaient pas isolées. Il y avait près d’elles des universités et des centres de recherche d’une haute qualité, ainsi qu’un tissu hospitalier très dense convenant parfaitement aux études cliniques. La plupart des medtechs et biotechs qui occupent l’actualité de ces derniers mois sont directement issues de recherches universitaires. ” Les frontières entre les mondes académique et entrepreneurial existent depuis toujours mais l’évolution est notable depuis 20 ou 30 ans, pointe Philippe Degive. De plus en plus de chercheurs ont vu des collègues créer leur start-up. Fonder son entreprise, ce n’est plus vendre son âme de chercheur ; les mentalités ont bien évolué. ” C’est le cas d’Etienne Sokal (UCLouvain), fondateur de Promethera, de Jean-Michel Foidart (ULiège), cofondateur de Mithra ou plus récemment de Cédric Blanpain (ULB), qui vient de lancer ChromaCure avec l’ambition de développer des thérapies contre le cancer. L’un des défis est alors pour le scientifique d’avoir l’humilité nécessaire pour partager très tôt son ” bébé ” avec des managers, généralement plus aptes à gérer l’aventure économique.

Notre pays est internationalement reconnu comme plateforme logistique performante permettant d’acheminer rapidement vaccins et médicaments dans le monde entier.” Frédéric Druck (Bio.be)

Le pôle de compétitivité BioWin a grandement contribué à ce décloisonnement. Les projets de recherche n’y sont subsidiés que s’ils réunissent plusieurs entreprises (dont au moins une PME) et une université ou un centre de recherche. Ces acteurs ont donc été poussés à travailler ensemble et, rapidement, les deux mondes ont appris à se connaître. A Liège, l’université, le CHU et le fonds d’investissement Meusinvest ont carrément mis en place une structure spécifique (Bridge2health) pour capter et aider à valoriser les projets sortant des cercles médicaux. ” C’est une force vis-à-vis des entreprises extérieures et des porteurs de projets : on peut leur offrir un full service dès le début, explique Julien Compère, administrateur délégué du CHU de Liège. Ils ont accès au capital financier, au capital humain et à l’infrastructure. Bridge2Health gère aussi toutes les infrastructures mises en place pour le médical. On peut fournir un local près de l’hôpital universitaire, des salles blanches, etc. ”

Même sans spin-off ou start-up, les sociétés pharmaceutiques ont besoin de se confronter régulièrement à l’excellence académique pour conforter ou orienter leurs programmes de recherche. L’ancien patron de GSK Jean Stéphenne, membre du comité de direction de nombreuses sociétés du secteur, assure ainsi qu’il n’investit jamais dans une entreprise qui n’a pas tissé des collaborations avec des équipes universitaires.

3. Le sol : des infrastructures bien pensées

Frédéric Druck (Bio.be)
Frédéric Druck (Bio.be)© PG

Les racines et le tronc n’ont guère de chance de grandir s’ils n’évoluent pas dans un environnement adapté. Des médicaments, et plus encore des cellules souches ou des produits de radiopharmacie ne se transportent pas comme des bocaux de confiture. La Belgique a développé une expertise remarquable dans la logistique pharmaceutique. ” Notre pays est internationalement reconnu comme étant une plateforme logistique performante permettant d’acheminer rapidement vaccins et médicaments dans le monde entier, commente Frédéric Druck, secrétaire général de Bio.be, la fédération des entreprises des sciences du vivant. “Avec un montant qui atteint près de 40 milliards d’euros par an, la Belgique est le second exportateur de produits (bio)pharmaceutiques de l’Union européenne. Près de la moitié de ces produits sont exportés hors de l’UE, principalement en Asie et aux Etats-Unis. Ce succès est notamment dû au fait que les aéroports de Bruxelles et de Liège ont été les premiers certifiés comme centres d’excellence pour la logistique de produits pharmaceutiques.”

Le gros de la biopharmacie en Europe se passe entre Paris et la Belgique. Nous avons là une exceptionnelle concentration d’acteurs de très haut niveau.” Sylvie Ponchaut (BioWin)

En outre, la Wallonie dispose toujours d’une réserve de terrains pour les investissements. Des projets d’extension existent au Biopark de Gosselies (25.000 m2), à Liège (50.000 m2) et à Louvain-la-Neuve. “En termes d’emplois, 80% sont concentrés dans le Brabant wallon, explique Sylvie Ponchaut. Mais les biotechs sont de mieux en mieux réparties en Wallonie. Le Brabant wallon, Liège et Charleroi accueillent chacun 25-30% du total des entreprises.” Mais pour être à la pointe de la pointe, ne faudrait-il pas concentrer ces forces, au moins spécialiser les trois hubs wallons (et peut-être quatre avec Marche qui prend de l’ampleur) ? “Je ne le pense pas, poursuit la directrice du pôle de compétitivité BioWin. Pour un investisseur américain, un territoire de 3,5 millions d’habitants, c’est un mouchoir de poche. Marche, à ses yeux, c’est à côté de Gosselies.” Elle assure en outre que les différents hubs ne se tirent pas dans les pattes pour attirer les investisseurs étrangers. “Globalement, ils travaillent en bonne intelligence pour analyser la localisation qui profiterait le mieux à l’ensemble de l’écosystème wallon. Le boom du secteur facilite cette réalité : il y en a plus qu’assez pour chacun ! Depuis quelques années, grâce à notre travail commun, les tensions sous-régionalistes sont donc nettement retombées. ” Le travail de réseautage mené par BioWin y a contribué, comme aussi le fait que les parcs tendent presque naturellement à se spécialiser, avec beaucoup de thérapie cellulaire à Gosselies et du medtech et de la radiopharma à Liège.

Des parcs qui se dotent par ailleurs eux aussi d’équipements spécialisés. “Il y a une offre de services de très haute technicité, assure Enrico Bastianelli, ancien patron de Bone Therapeutics, désormais à la tête de Graftys (société de fabrication de ciments osseux basée à Gosselies). Les jeunes sociétés peuvent accéder à des équipements de pointe qu’elles ne pourraient pas se payer. Cela permet de démarrer une activité de manière quasiment immédiate en minimisant les coûts. J’ai pu voir l’investissement progressif qui a été effectué dans les parcs scientifiques, dans des outils d’incubation qui sont devenus au fil du temps de plus en plus sophistiqués. Par rapport à d’autres pays, la qualité de l’offre d’infrastructures (laboratoires de recherche, unités de production) est vraiment excellente.”

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4. L’engrais : le financement public

Reste maintenant la question de l’engrais, histoire de garantir la croissance de ces jeunes pousses. Les sociétés pharmaceutiques en développement ont régulièrement besoin d’argent frais, le temps d’amener un médicament ou produit sur le marché – un processus qui prend facilement plus de 10 ans. Les biotechs et medtechs ont pu compter sur le soutien de plus en plus affirmé des investisseurs publics (SFPI, SRIW, invests provinciaux) et des fonds dédicacés par les universités. La société fédérale de participations et d’investissement (SFPI) est présente dans une quinzaine d’entreprises pharmaceutiques (Ire-Elit, MaSTherCell, PDC Line Pharma, etc.) et la SRIW dans pas moins de 30 (Bone Therapeutics, Mithra, IDDI, etc.). Les sociétés fédérale et régionale interviennent même souvent de concert.

Les sociétés publiques ont par ailleurs pris des participations dans des fonds internationaux. Une manière de tisser un réseau et d’amener d’autres investisseurs à s’intéresser aux entreprises belges. Il est de plus en plus fréquent qu’elles jouent un rôle d’ensemblier pour réunir des partenaires privés et publics lors des levées de fonds des biotechs régionales. “Ces acteurs publics ont bien compris le potentiel stratégique du secteur et ils sont prêts à jouer le rôle de levier vers le financement privé”, souligne Chris Buyse, managing partner chez Fund+, un fonds d’investissement belge spécialisé dans la pharma.

L’intervention publique ne se limite pas aux prises de participation. Les entreprises apprécient particulièrement les aides non dilutives octroyées par la DGO6 (Direction de l’aide à la recherche de la Wallonie) sous forme de subsides et d’avances récupérables. “C’est un atout très important de la Wallonie car les taux d’aides sont incomparables, assure Florence Bosco, CEO du Biopark de Gosselies. On ne trouve pas l’équivalent dans d’autres pays. La Wallonie finance de 50 à 70% des frais de R&D jusqu’en phase 2, et finance même à concurrence d’1 million d’euros pour la phase 3. ” Ce mécanisme existe depuis une dizaine d’années. Un temps suffisamment long pour être connu bien au-delà de nos frontières.

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5. Les branches : du support à la production, le secteur se diversifie

Nous avons donc maintenant un arbre bien enraciné qui ne demande qu’à grandir. Mais ce seront ses branches qui porteront les fruits. Et celles-ci peuvent être très variées. A côté des biotechs proprement dites, c’est-à-dire les firmes qui développent un médicament, on voit émerger de plus en plus de medtechs qui travaillent, elles, sur des équipements médicaux. Un complément idéal car ce créneau nécessite des investissements moins lourds et moins risqués tout en demeurant du ressort de l’innovation et de la technologie de pointe. C’est le cas, par exemple, d’Endo Tools Therapeutics (Gosselies), qui produit des dispositifs médicaux contre l’obésité, le diabète et les tumeurs du tube digestif. Mais aussi de Miracor à Liège, ou d’Istar Medical (implants ophtalmologiques) à Wavre.

Sylvie Ponchaut pointe également le nombre croissant d’innovations dans la production de médicaments, avec le développement de sociétés comme Univercells, Xpress Biologics, Novasep ou Eurogentec. “Il doit y avoir une quarantaine d’entreprises dans ce créneau en Wallonie, se réjouit-elle.” Elles innovent dans les process à partir du vivant. C’est crucial d’avoir des gens et des entreprises capables aussi d’innover dans ce domaine. En plus, il s’agit souvent de modes de production compliqués et qui ne s’exportent pas facilement. De quoi assurer de l’emploi aussi pour les cols bleus, ce qui est moins le cas dans la recherche. ”

En Wallonie, les taux d’aides sont incomparables. On ne trouve pas l’équivalent dans d’autres pays.” Florence Bosco (Biopark de Gosselies)

Enfin, il y a aussi toutes ces PME de support et de services qui gravitent autour des entreprises pharmaceutiques. Cela va des consultants spécialisés dans les affaires réglementaires au producteur de flacons stériles, comme Aseptic Technologies. ” Les investisseurs étrangers s’informent de plus en plus régulièrement de la présence de société de services pour soutenir ce tissu industriel, souligne Sylvie Ponchaut. C’est un facteur-clé. On le voit très bien dans la thérapie cellulaire, avec toute la logistique qui tourne autour du transport du vivant, les spécialistes du brevetage, etc. ” Sur les 15.000 emplois du pôle BioWin, 2.292 proviennent de ces sociétés de support. ” Ce n’est pas anodin et je suis persuadée que ça va augmenter à l’avenir. L’une de nos missions, en tant que pôle, est aussi de servir de GPS à ces sociétés pour les aider à trouver des clients ou des fournisseurs. ”

L’addition de ces différentes branches constitue vraiment ce que l’on appelle un écosystème. ” Ce réseau, ce maillage, dépasse effectivement les biotechs, commente l’historien Kenneth Bertrams. Et il les met en valeur. Sans lui, il n’y aurait pas de tremplin international. Nous avons une extension par effet d’entraînement : une entreprise va compléter ce que fait une autre. ” Apparemment, peu de pays peuvent offrir un panel aussi complet sur un aussi petit territoire. De quoi attirer évidemment des sociétés étrangères mais aussi réduire le risque de délocalisation. ” Quand elle évolue dans un écosystème très structuré, complet et fort, il n’y a aucun intérêt à délocaliser une société, ajoute Marc Dechamps, directeur des affaires internationales chez BioWin. Une entreprise comme Galapagos est très heureuse dans l’écosystème belge. Elle cherche à diversifier ses programmes avec différentes sociétés pharmaceutiques et investisseurs. ”

En effet, la complémentarité des entreprises les renforce les unes les autres. Elle apporte aussi une plus grande sécurité aux investisseurs, car il s’agit parfois d’activités beaucoup moins risquées que le développement de médicaments. ” Des sociétés comme Quality Assistance (sciences analytiques) ou MaSTherCell (thérapies cellulaires) sont devenues des piliers de l’écosystème, analyse Philippe Degive, de la SRIW. Il s’agit d’entreprises solides, qui génèrent beaucoup d’emplois et réalisent des chiffres d’affaires récurrents. C’est précieux en termes de diversification des risques. Mais bon, sans les sociétés plus risquées – avec aussi des perspectives de retour plus élevées en cas de deal -, tout cet écosystème n’existerait pas. ”

Last but not least, de plus en plus de branches internationales devraient par ailleurs aussi pousser sur cet arbre. BioWin participe en effet à des projets européens et a développé des partenariats avec des structures équivalentes en Europe, notamment avec le réputé pôle parisien. ” Le gros de la biopharmacie en Europe se passe entre Paris et la Belgique, conclut Sylvie Ponchaut. Nous avons là une exceptionnelle concentration d’acteurs de très haut niveau. “

Par Christophe De Caevel et Jérémie Lempereur.

“Un écosystème aussi complet, c’est rare”

Olivier Delporte, CEO de Miracor
Olivier Delporte, CEO de Miracor© PG

Miracor est l’une de ces sociétés étrangères séduites par l’écosystème wallon des biotechs. L’an dernier, elle a quitté l’Autriche pour s’implanter à Awans, où elle emploie une vingtaine de personnes. Et elle a déjà attiré de nouveaux voisins : une start-up de cardiologie interventionnelle venue d’Allemagne et une spin-off israélienne active dans l’imagerie médicale, toujours pour la cardiologie, partagent le même bâtiment. ” Cela illustre le dynamisme que l’on trouve ici, confie Olivier Delporte, CEO de Miracor. La proximité nous permettra de travailler de concert pour trouver le meilleur chemin dans les réglementations et les études cliniques. ” Car oui, ici, on vise les marchés mondiaux : les Etats-Unis, la Chine, le Japon, etc. Pour l’heure, la priorité de Miracor, ce sont les études cliniques en vue de conforter les indications de Picso, son innovation technologique permettant de réduire considérablement les séquelles d’un infarctus. ” Nous ne voulons pas brusquer les étapes et passer trop rapidement à la commercialisation, précise le CEO. Nous sommes convaincus d’avoir un potentiel de plateforme pour de nouvelles indications. Nous avons donc besoin de données cliniques de grande qualité. ”

Pour ce faire, Miracor a trouvé en Belgique un réseau hospitalier de haut niveau, des fournisseurs spécialisés et une belle articulation public/privé pour le financement. ” On ne trouve pas partout des interventions non dilutives comme celles qu’offre la DGO6, la direction de l’aide à la recherche de la Wallonie, consate Olivier Delporte. Il y a une vraie volonté de soutenir le secteur des medtechs et biotechs. Il y a des bases en Irlande, à Paris, à Berlin ou en Suisse. Mais un écosystème aussi complet, c’est rare. En plus, ces derniers temps, il y a eu des exits à plusieurs centaines de millions de dollars (Ogeda, Ablynx). Ça, je vous l’assure, tout le monde le voit. ”

De la Californie à… Mont-Saint-Guibert

Michel Lussier, CEO de Metronom Health
Michel Lussier, CEO de Metronom Health© PG

” Quand j’ai lancé Cardio 3 en 2004 avec Christian Homsy, il n’y avait pas grand-chose. Et regardez aujourd’hui le nombre de jeunes entreprises pharmaceutiques prometteuses en Belgique, particulièrement en Wallonie. L’évolution est incroyable. ” Michel Lussier, CEO de Metronom Health, ne tarit pas d’éloges à l’égard de l’écosystème biotech. Au point d’avoir installé sa start-up à Mont-Saint-Guibert alors que son produit (un système de contrôle glycémique continu qui facilitera grandement la vie des personnes diabétiques) a été développé en Californie.

L’entreprise va lancer les essais cliniques cet été dans l’espoir d’une commercialisation en 2020. ” Le développement des logiciels, la partie clinique et l’assemblage final, tout se fera en Wallonie, assure Michel Lussier. La région a atteint une masse critique, on trouve quasiment tous les fournisseurs et sous-traitants à proximité, et nous parvenons à recruter les talents nécessaires. Avec le télétravail, on peut recruter des Français, des Allemands ou autres qui viennent ici quelques jours par semaine. ”

Le CEO salue l’action des pouvoirs publics qui ont osé prendre le risque de financer des projets réellement innovants grâce auxquels la Wallonie est aujourd’hui à la pointe en matière de thérapie cellulaire. ” Je pense qu’il y a aujourd’hui de formidables opportunités dans la santé numérique et les dispositifs médicaux portables, conclut Michel Lussier. Avec le manque de médecins et le vieillissement de la population, nous allons vers plus de soins à domicile gérés par le patient lui-même. Il n’y a pas encore de centre incontournable en Europe. Nous avons à peu près toutes les compétences pour que ce centre, ce soit la Wallonie. ”

“Les acteurs du financement devraient aller vers des montants plus élevés”

Michel Baijot, CEO de Asit Biotech
Michel Baijot, CEO de Asit Biotech© PG

Active dans le créneau de l’immunothérapie destinée à traiter les patients allergiques, l’entreprise cotée Asit Biotech, qui emploie 26 personnes, est en train de gérer une phase 3 pour son produit phare contre l’allergie au pollen. C’est la dernière phase de développement avant de pouvoir présenter son médicament aux autorités régulatoires en vue d’un enregistrement. Les résultats sont attendus pour la mi-décembre. Son CEO, Michel Baijot, reconnaît la qualité de l’offre de financement chez nous (tant publique que privée), mais estime que les différents acteurs pourraient prendre davantage de risques. ” Puisqu’ils comprennent ce que nous faisons, ils devraient aller vers des montants plus élevés, dit-il. Dans ma phase 3, j’aurai rapidement besoin de 20 millions d’euros. Ensuite, il faudra des études pour générer des données de long terme. La Belgique ne me suffira pas. ”

A ce stade, la biotech liégeoise ne s’est pas encore tournée vers du financement étranger. ” Ce processus prend beaucoup de temps, explique le responsable. Et nous sommes peu nombreux. Nous passerions notre temps sur les côtes Est et Ouest des Etats-Unis. En outre, il est plus difficile d’attirer l’attention des financiers américains quand vous venez d’Europe. ”

Qu’importe, Asit Biotech commence également à s’assurer de la visibilité auprès des grands acteurs de son secteur. ” La suite naturelle pour une biotech qui obtient une phase 3 positive, c’est d’aller vers un big pharma qui fait le reste, soutient Michel Baijot. L’objectif est d’obtenir du financement pour terminer nos phases d’enregistrement, mais aussi d’avoir accès à un réseau sales et marketing pour pouvoir vendre notre produit. Si ma phase 3 est positive, je n’aurai pas trop de mal, je pense, à nouer un partenariat avec un de ces big pharma, qui me dira aussi s’il souhaite avoir une option d’achat sur l’entreprise. ”

“Etre challengé par GSK Vaccines vous donne du poids”

Hugues Bultot, CEO d'Univercells
Hugues Bultot, CEO d’Univercells© PG

” Tout ce qui a été essaimé par le développement fulgurant et massif de GSK Vaccines à partir du site de Wavre nous a grandement profité, lance Hugues Bultot, CEO d’Univercells. A la fin des années 2000, plusieurs responsables du groupe qui avait atteint l’âge de la retraite ont en effet décidé de poursuivre leur activité professionnelle dans le domaine de la consultance. Depuis, ils se rendent disponibles pour les entrepreneurs débutants ou chevronnés afin de les aider à se mettre en réseau. ” Comme Univercells. Installée au Biopark de Gosselies et employant une centaine de collaborateurs, dont plusieurs en Inde et aux Etats-Unis, l’entreprise spécialisée en biomanufacturing, qui a récemment dévoilé sa plateforme de production d’un vaccin à bas prix contre la polio, a su tirer profit de l’écosystème biotech noir-jaune-rouge.

Et le fait que ses responsables aient pu obtenir un financement de la Fondation Bill et Melinda Gates n’est clairement pas un hasard. ” Quand vous pouvez dire que vous avez été challengé par des responsables de GSK Vaccines, cela vous donne directement un autre poids dans la discussion, insiste notre interlocuteur. Au début des années 2000, la Fondation Gates avait été un partenaire de GSK Vaccines. Or, les personnes qui participaient à ce partenariat sont aujourd’hui actives sur le marché des biotechs en Wallonie. Ce sont elles qui nous ont permis d’entrer en contact avec leurs alter ego de la Fondation. ”

Etre installée au Biopark de Gosselies est également un atout de taille pour les responsables d’Univercells, qui disent avoir pu profiter d’un savoir-faire collectif accumulé au fil des ans. ” Faire ce que l’on appelle dans notre domaine du box in the box ( construire une usine pharma miniature à l’intérieur d’un entrepôt, Ndlr), c’est un know-how qui est connu, explique Hugues Bultot. Les responsables du Biopark savaient donc qu’on pouvait envisager d’opérer des activités biopharmaceutiques dans des bâtiments qui, à l’origine, avaient plutôt été conçus pour accueillir des bureaux. ”

“Les avances récupérables sont un très bel outil”

Jean-Pol Detiffe, CEO d'OncoDNA
Jean-Pol Detiffe, CEO d’OncoDNA© PG

” Les outils mis en place par la Région wallonne pour démarrer lorsque l’on n’a pas encore énormément de capital sont fantastiques, assure Jean-Pol Detiffe, CEO d’OncoDNA. Les avances récupérables, notamment. Elles permettent vraiment de financer de la recherche proche du marché, à de bonnes conditions. Lors de la création de l’entreprise, j’ai moi-même obtenu un budget de 2 millions en avances récupérables pour développer et valider un test que nous commercialisons à présent. ”

Créée en décembre 2012, OncoDNA, présidée par Jean Stéphenne (ex- patron de GSK Vaccines), se donne pour objectif d’aider l’oncologue à choisir le meilleur traitement pour des patients atteints de cancers avancés. Concrètement, l’entreprise qui emploie une soixantaine de personnes, dont plusieurs à l’étranger, établit des recommandations de traitements sur base d’échantillons de biopsie qu’elle reçoit et dont elle effectue le séquençage ADN. Ses tests ont commencé à être commercialisés en 2015 en partenariat avec des hôpitaux du monde entier (Chili, Australie, Iran, etc.). ” Et nous commençons à être remboursés par les assurances, se réjouit le responsable. En Angleterre, nous sommes remboursés par toutes les assurances privées. En Belgique, une première mutuelle le fait aussi. ”

Aujourd’hui, la biotech est en concurrence avec des firmes américaines qui, pour un million d’euros levés par OncoDNA, en lèvent 10. ” Nous sommes dans la phase 2, explique Jean-Pol Detiffe. Pour notre série B, nous sommes en train de discuter avec des investisseurs internationaux. En Europe, de plus en plus de biotechs sont revendues après la phase 2, parce qu’elles ne trouvent pas suffisamment de financement pour continuer seules vers la commercialisation du produit. ”

Pense-t-il que son entreprise puisse rester belge ? ” C’est difficile à dire, répond notre interlocuteur. Beaucoup de sociétés belges sont rachetées. Maintenant, si l’activité locale est maintenue, c’est déjà ça. Mais c’est vrai que quand on fait entrer des fonds internationaux, on garde moins le contrôle. ” Comment, alors, faire grandir des champions européens ? ” Il faudrait que les sociétés dont on sait qu’elle devront grandir vite afin d’être les premières sur le marché obtiennent de très gros financements, de plusieurs milliards. Cela ne peut se faire qu’au niveau européen. Pour le moment, nous sommes toujours dans la granularité propre à chaque pays. ”

Quality Assistance, un support de poids pour les big pharma

Philippe Draux, CEO de Quality Assistance
Philippe Draux, CEO de Quality Assistance© PG

Réalisant 20 millions d’euros de chiffre d’affaires et employant 180 personnes, Quality Assistance est depuis 1982 un prestataire de services aussi bien pour des entreprises pharmaceutiques du top 50 que pour des biotechs. Concrètement, l’entreprise accompagne ces sociétés dans le processus d’enregistrement de leurs médicaments. ” Nous sélectionnons les médicaments sur lesquels nous voulons travailler, explique son CEO Philippe Draux. Il s’agit essentiellement de produits innovants (immunothérapie, anticorps conjugués, nouvelles molécules chimiques, vaccins thérapeutiques, thérapies cellulaire et génique, nanomédicaments). Nous commençons par étudier toute la réglementation utile à l’enregistrement, et nous investissons ensuite dans les technologies analytiques permettant d’évaluer l’innocuité, l’efficacité et la qualité des produits confiés par nos clients. Quand on sait que l’analytique représente plus de 20% de la dépense d’un dossier d’enregistrement et que pour un blockbuster, un dossier d’enregistrement représente 1,4 milliard de dollars, vous voyez tout de suite dans quel marché nous nous trouvons. ”

Quality Assistance accompagne généralement les big pharma pendant toute la phase de développement, qui dure environ 10 ans. Mais elle s’est aussi tournée vers les biotechs. ” A condition qu’elles aient les moyens de leur politique et démontré la faisabilité de leur projet, répond le CEO. Nous allons intervenir quand la firme a pris un brevet et veut aller à l’enregistrement. Nous avons dans notre portefeuille 40% de sociétés qui ont généralement plus de cinq ans d’activité et qui ont consolidé leur stratégie et les moyens financiers associés. En effet, un des problème rencontrés par les biotechs reste la sous-capitalisation. Pour enregistrer un médicament issu de la biotech, il faut 600 à 800 millions d’euros. Or, beaucoup de ces entreprises sont au départ capitalisées à hauteur de seulement 5 à 10 millions d’euros. Souvent, elles doivent faire plusieurs tours de table, puis, si le produit est safe et efficace, le céder à un big pharma qui continuera l’aventure avec d’autres moyens. ”

Bruxelles mise sur l’e-santé

Azèle Mathieu, manager de Lifetech.brussels
Azèle Mathieu, manager de Lifetech.brussels© PG

Trop souvent, les pouvoirs publics tentent tous de creuser le même sillon. D’où des redondances qui n’aident personne et coûtent à tous. Lifetech.brussels a pris le temps de la réflexion pour se frayer un chemin personnel dans le monde, très porteur, des innovations médicales. ” La biopharmacie était déjà bien développée en Belgique, nous avons fait le choix de soutenir les secteurs de l’e-santé et des dispositifs médicaux, explique Azèle Mathieu, manager de Lifetech.brussels, l’un des clusters de hub.brussels. Ils nécessitent des investissements financiers moins grands et collent bien avec le tissu entrepreneurial bruxellois composé de nombreuses très petites sociétés. ” Stratégie concluante puisque en quelques années, le nombre d’entreprises actives dans ces domaines a augmenté de 40% et que Bruxelles s’insère désormais dans des réseaux internationaux à la pointe de l’e-santé. LindaCare, société spécialisée dans les solutions de surveillance à distance des patients atteints de maladies chroniques, a ainsi ouvert un bureau aux Etats-Unis. ” Notre forte concentration d’hôpitaux permet d’initier, de valider et d’utiliser les projets qui émergent de nos entreprises “, poursuit Azèle Mathieu. Autre avantage de ce tissu hospitalier : il fournit des locaux pour les start-up de la santé digitale. Les pouvoirs publics préparent des solutions d’hébergement pour les entreprises en croissance. Ils songent également à la constitution d’un fonds d’investissement dédié à la santé numérique, vraisemblablement sur un mode public/privé.

L’autre secteur en vogue à Bruxelles, ce sont les dispositifs médicaux. ” Nous en sommes à notre quatrième medtech accelerator (programme spécifique pour les start-up du secteur) et le succès est chaque fois croissant, assure Azèle Mathieu. Les chaînes de valeur se complètent, avec par exemple la firme Covartim qui offre des services de prototypage. Cela génère vraiment un effet boule de neige car les entreprises cherchent de l’expertise technique avant de rechercher des solutions de financement. ”

Jean Stéphenne: “Peut-être que nous éparpillons un peu trop les forces…”

Biotechs: pourquoi nos entreprises sont leaders mondiaux dans ce secteur d'avenir
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L’ancien patron de GSK, devenu investisseur privé pour le secteur pharmaceutique, livre sa vision de la ” Biotech Valley ” wallonne.

Jean Stéphenne, c’est un regard sur plus de 40 ans d’industrie pharmaceutique en Belgique et dans le monde. Un regard d’autant plus aiguisé qu’il a connu le monde des multinationales avant de se tourner vers les biotechs émergentes, à la fois comme investisseur et comme administrateur. L’homme préside Bone Therapeutics et OncoDNA, ainsi que Bepharbel, une société de production de médicaments basée à Courcelles et qu’il a fondée avec son fils.

TRENDS-TENDANCES. Des élections se dérouleront le 26 mai prochain. Qu’est-ce que les futurs gouvernements pourraient mettre en place pour encore améliorer l’écosystème pharmaceutique ?

JEAN STÉPHENNE. Je présidais le groupe Santé mis en place par le Premier ministre pour plancher sur les investissements stratégiques. Ce que l’on voit émerger, c’est tout ce qui est big data, les données des patients et l’intelligence artificielle. Aujourd’hui, les mutuelles ont accès à toutes les données des patients. Avec l’intelligence artificielle, vous pourriez les exploiter pour soigner le diabète, le cancer, etc. Mais à condition de ne pas avoir accès aux données individuelles. Il faut des barrières pour que ce qui doit rester privé le demeure. Nous avons donc demandé au gouvernement de créer un panel d’experts chargés de définir une gouvernance en la matière avec l’Agence du médicament. Par ailleurs, en matière de santé, la Société fédérale de participations et d’investissement (SFPI) a joué un rôle clé avec les invests et la Société régionale d’investissement de Wallonie (SRIW), notamment lors de la mise en Bourse de biotechs. Pourquoi le gouvernement fédéral ne recréerait-il pas un fonds de 500 millions à un milliard d’euros pour investir dans les sociétés biomédicales émergentes ?

Et au niveau régional, que préconisez-vous ? Faut-il, par exemple, revoir le fonctionnement des pôles de compétitivité ?

La dynamique est lancée, il faut la sécuriser. Les projets des pôles ont été labellisés par des jurys indépendants. C’est le cas dans tous les pôles. C’est pour moi très positif. Il faut cultiver l’excellence et créer les bons partenariats entre les entreprises, avec les centres de recherche et les universités. N’oublions pas, à cet égard, que les grands hôpitaux universitaires sont situés à Bruxelles. Or, vous ne savez pas faire de la recherche dans la pharma sans avoir accès à ces institutions. Il faut donc faire attention à l’hyper-régionalisation.

Cultiver l’excellence dans le secteur des biotechs passe-t-il par la spécialisation ?

Nous sommes très forts en oncologie, en immunologie. Sera-t-on très forts en big data ? Je pense que la dynamique est bonne. Par contre, il faut sélectionner les bons projets qui créent de la valeur. En thérapie cellulaire, la Wallonie a vraiment une série d’entreprises très prometteuses. Maintenant, j’aurais préféré que l’on mise sur quelques-unes, deux ou trois au maximum, pour vraiment créer des leaders mondiaux. Peut-être que l’on éparpille un peu trop les forces.

Pouvons-nous réellement voir émerger des leaders mondiaux ? Les entreprises wallonnes ne sont-elles pas vouées à partir ou être rachetées pour grandir ?

IBA est un leader mondial. Mithra va bientôt y arriver. Je crois aussi que l’on peut avoir la volonté de localiser les centres de recherche et de production, même si on s’allie à un grand. Quand j’étais chez GSK, j’avais dit que je m’en irais si c’était pour être uniquement un centre de production. J’ai donc localisé tout ce qui était recherche et développement. Par définition, une usine vieillit. Il faut donc avoir la capacité d’innovation pour amener de nouveaux produits qui assurent le futur de la firme.

Les Wallons sont-ils suffisamment conscients du potentiel de cet écosystème biotech ?

Les employés qui travaillent dans ces sociétés en sont conscients. Par contre, vous avez raison, la population ne l’est pas. Cela prend du temps. Et puis le Wallon est-il fier de son économie ? J’ai eu des discussions avec les syndicats chez GSK, ils me disaient que j’étais mégalo. Mais non, si vous voulez réussir, il faut viser le niveau mondial et ne pas avoir peur.

C’est un secteur dans lequel il y a beaucoup d’échecs. Comment faites-vous vos choix lorsque vous investissez dans telle ou telle entreprise ?

La première chose à faire, c’est travailler en partenariat entre les chercheurs de l’entreprise et les universités. Quand j’étais chez GSK, je n’approuvais pas un budget de recherche sans que des collaborations n’aient été établies. Pourquoi ? Parce que le processus de recherche est très complexe et que les connaissances évoluent très très vite. Il ne faut donc pas avoir peur de se faire challengercontinuellement. Quand je suis arrivé chez Bone, j’ai demandé à ce que l’on multiplie les collaborations avec les universités, pour être challengé. Ensuite, il faut que les équipes soient multidisciplinaires. Le chercheur doit être capable de parler à celui qui va s’occuper du développement commercial, au clinicien, etc. Dès le départ, il faut une réflexion commerciale, mais pas encore nécessairement un plan de vente.

Cela ne se fait pas suffisamment ?

Souvent, le chercheur est l’initiateur. Et ce qu’il faudrait, c’est créer tout de suite un duo: l’un qui comprend la technologie et l’autre qui comprend le marché. C’est du marketing stratégique que l’on demande, pas du marketing de détail.

Vous avez un regard sur 40 années de pharmacie. Comment voyez-vous l’industrie pharmaceutique en Wallonie dans 40 ans ?

J’espère que nous aurons créé une dizaine de champions wallons qui seront devenus des sociétés internationales. Si on ne réussit pas cela et qu’on reste uniquement avec des sociétés que l’on vend, c’est moins valorisant pour la Wallonie et pour la Belgique. Un des problèmes, comme nous l’avons dit, se situe au niveau du financement. C’est pour cela que la SFPI veut identifier des sociétés qui sont en croissance et les aider. Elles ne trouveront pas l’argent uniquement auprès des banques. Il faut que cela soit un mélange entre l’actionnaire et les investissements publics. Mais bon, il faut miser sur quelques-uns et les développer. Mithra a cette vision. IBA l’a eue aussi. En sachant aussi que si vous n’avez pas un mélange de multinationales, de moyennes et de petites entreprises, vous ne serez pas successfull. Le savoir-faire international vient par les grandes entreprises, et par les cadres que les PME y débauchent.

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