Airbnb, HomeExchange, CouchSurfing: le logement collaboratif en plein essor
Le marché du logement collaboratif a le vent en poupe. En témoignent les “success stories” d’Airbnb, HomeExchange ou CouchSurfing, qui rallient chaque année toujours plus de clients belges.
Un city-trip ou un séjour à l’étranger en vue ? Pour quel type de logement opter ? Si l’hôtel, le camping, ou la location étaient il y a peu les seules alternatives possibles, force est de constater que le secteur du tourisme s’est énormément développé ces dernières années. De nouveaux positionnements, axés sur la “consommation collaborative”, ont émergé et proposent plusieurs visages : échange de maisons ou simplement de nuits, logement gratuit sur canapé,… Pour les voyageurs, cette nouvelle façon de se loger constitue une pléthore d’avantages : diminuer les dépenses allouées aux séjours à l’étranger, découvrir une culture de l’intérieur, en favorisant les échanges culturels, ou encore permettre une forme d’entraide entre citoyens. Pas étonnant donc, de voir proliférer des plateformes de logement collaboratif, véritables business, possédant chacune leur propre modèle économique.
1 Airbnb: L’hôtel chez des particuliers
Il s’agit probablement de la plateforme de logement la plus connue au monde. Airbnb, avec ses 1,2 million de logements disponibles dans plus de 190 pays, permet à des particuliers de louer tout ou partie de leur propre habitation (ou d’un logement qu’ils possèdent) comme logement d’appoint, contre rémunération. Selon le Wall Street Journal, la société entrerait dans le club très fermé des entreprises valorisées à plus de 10 milliards de dollars, avec un chiffre d’affaires avoisinant les 500 millions de dollars en 2014. Soit une augmentation de 100 % par rapport à l’année précédente. Une croissance impressionnante, qui se retrouve également en Belgique puisqu’en un an, le nombre d’offres dans le pays a bondi de 100 %. Si en mai 2014, il y avait 3.700 maisons et appartements en location sur Airbnb en Belgique, il y en a désormais près de 7.500, détaille Sarah Roy, responsable communication pour la société américaine. Durant ces 12 derniers mois, le nombre de voyageurs étrangers venant séjourner en Belgique par le biais de la plateforme a augmenté de 150 %. Une appréciation qui bénéficie à Airbnb, dont le modèle de création de revenus est basé sur un prélèvement de 9 à 15 % par transaction (dépendant de la durée du séjour). Et qui s’explique notamment par les prix pratiqués sur la plateforme, inférieurs à ceux demandés dans un hôtel.
2 Nightswapping: Etre payé en nuitées
Créée en 2012, Nightswapping surfe également sur le marché du tourisme collaboratif. A cheval sur différents modèles, la société française mise sur un concept particulier d’échanges de nuits. Tout membre de la plateforme, qu’il soit propriétaire ou locataire d’un logement, peut accueillir chez lui (qu’il soit présent ou non) un autre membre. Cet hébergement, gratuit, lui fera gagner des “crédits nuits”, qu’il pourra dépenser à son tour chez un autre abonné de la plateforme. Résultat ? Aucun échange pécuniaire entre l’hébergeur et le voyageur, et l’assurance de pouvoir parcourir le monde, puisque Nighswapping comptabilise 70.000 membres à travers 151 pays. La Belgique y tient une place de choix avec actuellement près de 3.000 membres et 600 logements disponibles. Depuis 2012, 172 nightswaps ont d’ailleurs été réalisés sur notre territoire, ce qui en fait l’un des bons élèves de la plateforme. Bruxelles, elle, se trouve carrément dans le top cinq des villes comptabilisant le plus d’échanges. Pour s’assurer des revenus, la start-up mise sur un business model consistant en un prélèvement de “mise en relation”. Chaque fois qu’un membre souhaite réserver un logement, il devra payer la somme de 9,90 euros à Nightswapping. Une sorte de frais fixe donc, indépendant du nombre de nuitées réservées. Autre manière de générer des revenus ? Un service additionnel d’achat de nuitées (de 7 euros à 49 euros la nuit, en fonction du standing du bien) permettant aux plus sceptiques de tester le service, ou à ceux ne souhaitant ou ne pouvant héberger personne, de profiter des logements présents sur la plateforme. Dans ce cas, aucun changement pour l’hébergeur, qui ne recevra pas d’argent, mais sera crédité en nuitées. Depuis ses débuts en 2012, Nightswapping a permis 15.000 hébergements dans le monde. La start-up ne désire pas communiquer son chiffre d’affaires, mais fait part de ses objectifs : une levée de fonds de cinq millions d’euros à la fin 2015 ainsi que l’équilibre financier d’ici à 2018.
3 HomeExchange Troquer son logement
“Vous occupez mon logement pendant que j’occupe le vôtre”. Tel pourrait être le slogan de la société HomeExchange, qui fournit à ses membres l’occasion de troquer entre eux leur maison, leur appartement ou bien encore leur voiture ou leur équipement sportif. Centrée sur une absence de rémunération entre troqueurs, l’idée est d’accéder à un mode de vacances qui permet d’explorer le monde comme un autochtone, tout en s’assurant le gardiennage de sa maison. Entre 2006 et 2014, la plateforme s’est développée et le nombre de ses membres a augmenté de plus de 500 %. Comprenant 65.000 membres actifs disséminés dans 151 pays, elle est d’ailleurs devenue la plus importante communauté d’échange de maisons au monde. En Belgique, 600 membres sont convaincus par le procédé. Sur les 12 derniers mois, 1.016 échanges ont été réalisés dans le Royaume, ce qui correspond à une augmentation annuelle de 30 %. Pour générer du cash, l’entreprise impose à ses membres un abonnement annuel de 130 euros, leur donnant accès au réseau et leur permettant de concrétiser autant d’échanges que souhaité. Mais ce n’est pas tout puisque HomeExchange propose également, moyennant une cotisation de 500 euros par an, un segment d’échanges de luxe comprenant des demeures de haut standing.
4 CouchSurfing un canapé à disposition aux quatre coins du monde
Si vous êtes un voyageur sans le sou, adepte de rencontres et ne recherchant pas spécialement le confort d’un lit douillet, le couchsurfing est fait pour vous. Signifiant littéralement “surfer sur le canapé”, le concept mis en place par le site homonyme permet de loger gratuitement sur son divan toute personne membre de la “communauté”. Forte de ses 10 millions de membres répartis dans 200.000 villes de par le monde, la plateforme CouchSurfing est une véritable institution du tourisme collaboratif… qui éprouve pourtant des difficultés à atteindre la rentabilité. En 2011, alors qu’elle était encore orientée sur un modèle de gratuité totale, la plateforme entend se muer en véritable business et générer du profit. Mais le pari est loin d’être gagné puisqu’aujourd’hui encore, la société se cherche un modèle digne de ce nom. Au mois de janvier, la CEO de CouchSurfing, l’Américaine Jennifer Billock, avait annoncé sur le site internet de la boîte plusieurs pistes d’action pour redresser les comptes, toujours dans le rouge.De son propre aveu, la monétisation des prestations CouchSurfing n’était jusqu’alors pas la priorité du management. Quelques mois plus tard, les résultats ne semblent toujours pas au rendez-vous. Pire encore, il est fort à parier que les solutions prônées ne constituent pas des instruments pérennes de création de richesses, puisque Jennifer Billock concède que l’efficacité des pistes avancées se mesurera sur le terrain, par la pratique. Elle estime à ce propos que différents modèles devront probablement être testés, pour comprendre celui qui conviendra le mieux à l’entreprise et à la communauté. De quoi laisser les membres de la plateforme dans l’expectative pour quelques mois encore.
Augustin Lippens
Vers la fin de l’hôtellerie?
Le secteur hôtelier ne devrait pas pâtir de l’engouement pour le logement collaboratif. D’après les chiffres (provisoires) du SPF Economie, les hôtels de la Région de Bruxelles-Capitale ont atteint 6,6 millions de nuitées en 2014. C’est-à-dire une augmentation de 5,8 % par rapport à 2013, preuve que l’éradication de la clientèle hôtelière n’a pas encore eu lieu. “Nous ne sommes pas contre le principe du tourisme collaboratif, explique Marc Van Muylders, vice-président de l’horeca bruxellois. La clientèle visée est différente. Elle est souvent plus jeune et moins aisée que celle logeant dans nos hôtels. C’est donc très bénéfique pour le rayonnement de notre région et pour attirer différents publics.” Pourtant, le vice-président pointe certains abus, inhérents au système. “Dans l’hôtellerie, quand le client paie 100 euros, la moitié va directement à la collectivité, sous forme de TVA, d’impôts locaux, de charges sociales, d’impôt sur le revenu,… A contrario, sur Airbnb par exemple, les opérateurs se soustraient à ces charges, ce qui est clairement inégal.” Il insiste pour que les pouvoirs publics prennent leurs responsabilités, et voit d’un très bon oeil l’adoption de l’ordonnance bruxelloise du 8 mai 2014 relative à l’hébergement touristique. Ce texte, qui entrera en vigueur moyennant l’adoption d’arrêtés d’exécution, prévoit notamment que les établissements destinés à accueillir des touristes de façon onéreuse devront s’enregistrer auprès de la Région de Bruxelles-Capitale, et auront pour obligation de répondre à une série d’exigences, notamment en matière de sécurité. Une situation visant expressément Airbnb, qui repose sur un échange monétaire entre l’hébergeur et le visiteur, mais qui épargne pour l’instant des modèles de logements gratuits.
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