AB InBev et SAB Miller: les détails d’un deal à plus de 110 milliards d’euros

Carlos Brito © Reuters

Le 11 novembre 2015 n’était pas un jour férié au pays de la bière. Alors que les deux plus grandes brasseries au monde, AB InBev et SAB Miller, annonçaient un accord formel d’achat, le danois Carlsberg se voyait contraint aux restructurations et à une réduction de valeur exceptionnelle de 1,3 milliard d’euros.

Presque deux mois après l’annonce officielle de pourparlers entre AB InBev et SAB Miller au sujet d’une acquisition, le projectile a atteint sa cible. Le jour de l’Armistice, qui plus est. Sous réserve de l’accord des actionnaires des deux groupes et des autorités de régulation des nombreux pays concernés, AB InBev devrait devenir le leader absolu dans le monde brassicole, grâce à l’acquisition du numéro deux, SAB Miller.

Le danois Carlsberg, dorénavant numéro trois à bonne distance, a par contre dû annoncer une lourde réduction de valeur exceptionnelle, pour pas moins de 10 milliards de couronnes (1,34 milliard d’euros), et des restructurations.

AB InBev reste en Belgique

Le deal entre AB Inbev et SAB Miller comporte encore beaucoup de zones floues. Ce qui est établi par contre, c’est que le lieu du siège principal de la nouvelle société se situera en Belgique. On y trouvera aussi bien AB InBev que SAB Miller. La valorisation de l’acquisition de SAB Miller, qui était encore mardi soir principalement cotée à la Bourse de Londres, est d’environ 80 milliards de livres sterling. Ce qui revient plus ou moins à 112 milliards d’euros.

Le nouveau nom du géant de la bière n’est pas encore connu. Mais il restera coté sur Euronext Bruxelles. À côté de cela, il devrait demeurer des cotations au Mexique, à New York et dorénavant aussi à Johannesburg, la capitale économique de l’Afrique du Sud et berceau de SAB Miller. South African Breweries est effectivement né en 1895 dans les environs de la métropole et est, depuis 1955, le leader du marché sud-africain avec +/- 90% de parts de marché. Il n’y aura par contre plus de cotation à Londres, où SAB Miller disparaît des écrans de la bourse.

Les actionnaires ‘ordinaires’ de SAB Miller vont recevoir 44 livres sterling cash par action. Mais l’acquisition de près de 112 milliards d’euros ne sera pas complètement payée en cash. Deux actionnaires de référence de SAB Miller, l’américain coté en bourse Altria (27%) et Bevco (la famille la plus riche de Colombie, Santo Domingo, qui possède 14% des actions), auront une partie en liquide (2,54 milliards de livres sterling), mais surtout de nouvelles actions dans le successeur de AB InBev. Il s’agira d’environ 326 millions d’actions. Celles-ci ne pourront être vendues qu’après cinq ans. Jusque-là, elles ne seront cotées sur aucune bourse.

Ces 326 millions de nouvelles actions représentent une participation de presque 17% dans le nouveau géant brassicole, qui compterait alors environ 1,93 milliard d’actions. Cela signifie que la participation des familles belges et brésiliennes, qui détiennent aujourd’hui directement 51,9% des actions, va baisser à 43%. Cela signifie aussi que la Stichting Anheuser-Busch InBev, dans laquelle les familles belges et brésiliennes siègent et qui contrôle aujourd’hui la brasserie de facto et prend toutes les décisions stratégiques importantes, ne pourraient plus fournir la majorité des administrateurs. Aujourd’hui, 8 des 14 administrateurs sont issus des familles. Les familles mexicaines de Grupo Modelo, par exemple, ont reçu deux sièges d’administrateur en 2012, alors qu’elles n’ont que 1,4% des actions. Ce qui est certain, c’est que les nouveaux actionnaires recevront des sièges d’administrateur, mais combien, ce n’est pas encore connu.

Les Belges et les Brésiliens restent toutefois les actionnaires de référence les plus importants. Ils ont également déjà démontré qu’ils ne tiennent pas obstinément à leur participation majoritaire. La croissance était plus importante. Via la fusion en mars 2004 vers InBev, les Belges et les Brésiliens avaient conclu un pacte, pour un contrôle partagé. Ce pacte de mariage durera certainement jusqu’en août 2024.

Economies pour 1,4 milliard de dollars

Ce qui est aussi à souligner, c’est que le management d’AB InBev peut désormais mettre un chiffre sur les économies de coûts que cette fusion pourra apporter. A partir de la quatrième année de la fusion, qui devrait être effective dans le courant de l’année prochaine, au moins 1,4 milliard de dollars pourront être économisés chaque année. Après l’acquisition du leader du marché américain Anheuser-Busch à l’automne de 2008, AB InBev a pu économiser 2,25 milliards de dollars après une période de trois ans. Après l’acquisition du leader du marché mexicain Grupo Modelo, l’objectif d’économies était d’un milliard de dollars d’ici fin 2016. La plus grande partie de ce montant sera déjà atteinte fin de cette année.

Le CEO Carlos Brito est bien sûr ravi de cette acquisition. Jan du Plessis, le président sud-africain du conseil d’administration de SAB Miller, souligne lui que le conseil d’administration approuve l’acquisition de manière unanime. “SAB Miller a des positions fortes dans les pays émergents et des marques iconiques. Mais AB InBev paie un joli prix et peut réaliser plus rapidement notre création de valeur sur le long terme”.

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