A quoi ressemblerait un mariage entre Delhaize et Ahold ?

Le quartier général de la chaîne de supermarchés Royal Ahold NV à Zaandam, aux Pays-Bas. © Belga

Le rapprochement entre Delhaize et Ahold devrait améliorer la rentabilité du nouvel ensemble. Il pourrait dégager jusqu’à un milliard d’euros d’économie par an. L’affaiblissement des familles fondatrices de Delhaize laisse la main aux fonds d’investissement.

C’est reparti : Delhaize discute avec le numéro un néerlandais, Ahold, en vue d’une fusion. La nouvelle a fait bondir l’action Delhaize de 19% ce lundi (à 86 euros). Une discussion similaire avait eu lieu en 2007, sans résultat. L’ensemble pourrait devenir le numéro un du marché belge, en additionnant les 24% de Delhaize aux 2% détenus par Albert Heijn dans le pays, soit 26%. Ce qui rivalise avec les 26% détenus par le leader actuel du marché, Colruyt. La fusion est possible, pour autant que les parties s’entendent sur le prix. Car les deux groupes n’ont pas ou plus d’actionnaires familiaux de référence fort.

Les familles fondatrices ne pèsent plus guère

Chez Delhaize, les descendants des familles fondatrices (Delhaize et Vieujeant) détiendraient environ 20% du groupe. Mais ne font pas bloc. Elles n’ont pas de pacte d’actionnaires -comme il y en a chez Colruyt. Les actionnaires les plus importants sont donc des fonds. Les plus importants sont américains : Citibank N.A. avec 10,62%, Blackrock, avec 4,86%. Ce dernier est aussi actionnaires d’Ahold dans une proportion similaire.

L’influence des familles fondatrices a été très nette dans le management et au conseil d’administration. Olivier Beckers-Vieujant a été le dernier CEO représentant la famille, et il sera bientôt l’unique descendant au conseil d’administration. Depuis fin 2013, la fonction de CEO a été confiée à un Néerlandais, Frans Muller.

Ahold devrait dominer la transaction

Si en 2007 la négociation portait sur une fusion entre égaux, avec un siège en Belgique, à Bruxelles, le rapprochement actuel devrait se faire sur d’autres bases. “Nous pensons que la balance du pouvoir est de 60%/40% entre Ahold et Delhaize” estime Alan Vandenberghe, analyste chez KBC Securities. Aujourd’hui Ahold est plus grand que le groupe Delhaize à plusieurs points de vue (données 2014) :

Ahold, le partenaire dominant

En milliards d’euros (données 2014)

Groupe Delhaize Ahold
Chiffre d’affaires 21,361 32,6
Bénéfice net 0,089 0,594
Capitalisation boursière en milliards d’euros 8,882 16,49
Nombre de collaborateurs 152.000 227.000

A quoi ressemblerait le rapprochement ?

Le rapprochement devrait produire des économies évaluées entre 600 millions à un milliard d’euros par an, selon les analystes. Les deux groupes sont complémentaires. Tous deux sont actifs aux Etats-Unis, qui est leur plus grand marché. Dans des zones différentes, avec des “overlaps” limités, notamment en Virginie ou en Pennsylvanie. Ahold est fort là où Delhaize est faible, dans l’e-commerce, et pourrait contribuer à développer ce canal, à la fois pour Delhaize Direct, qui a se développe avec difficulté. Autre apport potentiel : une force d’achat améliorée et l’expérience low cost d’Albert Heijn.

Dans le top 15 mondial

Selon KBC Securities, le futur groupe -si les négociations arrivent à leur terme- pourrait dégager en 2016 un chiffre d’affaires de 62,1 milliards d’euros et un bénéfice net de 1,5 milliard d’euros. Ce qui le situerait dans le top 15 mondial.

L’opération imposera sans doute une nouvelle restructuration, des services centraux de Delhaize cette fois, pour dégager les gains de la synergie. Elle succéderait à une période difficile pour l’enseigne, qui a lancé en 2014 une restructuration de son réseau en Belgique, avec 1800 départs et des fermetures de magasins. Dont l’une des causes était, ironie, la percée d’Albert Heijn en Belgique (Ahold), qui mise, comme aux Pays-Bas, sur une guerre des prix. D’où l’enthousiasme modéré des syndicats.

Ahold ne peut payer un rachat pur et simple

Une des difficultés tient dans la manière dont l’opération pourrait se réaliser. Ahold n’a sans doute pas la surface pour se permettre de racheter purement et simplement Delhaize. Il avait déjà frôlé la faillite après avoir acheté US Foodservice en 2000 pour 3,6 milliards de dollars. L’opération devra passer par une forme de fusion sur laquelle les fonds d’investissement, actionnaires des deux groupes, auront beaucoup à dire.

Le rapprochement est plus probable qu’en 2007, car Delhaize et Ahold sont en meilleure forme. Le premier a mis en place des mesures pour relancer sa rentabilité, le second s’est débarrassé de ses boulets.

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