Grégoire Talbot, Leader of Tomorrow 2010

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Son audace, sa vision claire et sa détermination ont convaincu le jury des Trends/Bizz Leaders of Tomorrow de cette année. Grégoire Talbot, qui aura 35 ans début janvier, pense tout doucement à “consolider le travail réalisé jusqu’ici”. Portrait.

Vision, réseau, esprit d’équipe, réactivité : voilà en substance sur quoi se basaient les critères d’évaluation du jury. Et sur ces différents points, c’est Grégoire Talbot, le jeune et dynamique patron de Cockpit Group, une entreprise bruxelloise spécialisée dans la mise en oeuvre de tableaux de bord de gestion pour les comités de direction, qui a le plus convaincu.

Vision

Pour expliquer sa vision de Cockpit Group, Grégoire Talbot ne va pas par quatre chemins. “Dans cinq ans, je veux que mon entreprise fasse 12,5 millions d’euros de chiffre d’affaires (ndlr : 2,5 millions actuellement) et qu’elle ait pris une dimension internationale.” La façon d’atteindre cet objectif est également limpide dans le chef du jeune CEO. “Cette croissance sera soutenue par trois volets stratégiques : premièrement, le développement de la clientèle locale, qui devra compter pour cinq millions d’euros ; deuxièmement, le développement d’un logiciel open source pour lequel nous pourrons assurer des contrats de formation et de maintenance, qui comptera pour un million d’euros supplémentaire ; et enfin, le développement international par le biais de partenariats ou joint-ventures, qui devrait assurer l’autre moitié du chiffre.”

Car si aujourd’hui Cockpit Group est encore essentiellement focalisée sur la Belgique, et principalement par le biais de services – de consultance en matière d’indicateurs de performance d’une part et d’implémentation de systèmes de tableaux de bord automatisés de l’autre – la sortie de crise devrait coïncider avec la transformation de Cockpit Group en une entreprise de produit, internationale de surcroît. “Jusqu’ici, notre savoir-faire était surtout intellectuel et nous dépendions de solutions logicielles externes”, explique Grégoire Talbot. “C’est la raison pour laquelle nous avons investi dans le développement d’un logiciel propre, qui assurera la récurrence de notre business et qui pourra limiter le risque de dilution des connaissances.”

Réseau

“A 27 ans, aller vendre un projet de tableau de bord à un CEO, ce n’était pas très crédible”, se souvient Grégoire Talbot. “D’autant que je n’avais pas les compétences informatiques nécessaires pour soutenir mon concept.”

Pour pallier ces difficultés, le jeune entrepreneur de l’époque a décidé de bien s’entourer. “J’ai d’abord engagé un consultant spécialisé en informatique, qui puisse compléter mon approche plutôt business. Ensuite, j’ai décidé de m’adjoindre les services “d’apporteurs d’affaires”, des consultants seniors qui disposaient de carnets d’adresses étoffés et qui pouvaient m’ouvrir les portes des comités de direction de grandes entreprises. Je leur rétrocédais une partie du bénéfice réalisé sur les projets qu’ils m’apportaient, de sorte que tout le monde sortait gagnant. Et puis, j’ai mis en place un conseil d’administration également constitué de personnes d’expérience, dont certaines ont pris des parts dans la société. Enfin, pour compenser mon côté un peu trop fonceur et parfois aussi trop paternaliste, j’ai engagé un ancien d’Accenture, qui puisse instaurer dans l’équipe la structure et la rigueur nécessaires pour garantir la performance de chacun.”

Aujourd’hui, Grégoire Talbot est en quête d’un business developer, capable de mettre en oeuvre la stratégie de croissance et donc surtout, de booster les ventes. “Une personne que l’atteinte d’objectifs motive davantage que la créativité, contrairement à moi.”

Esprit d’équipe

On sent chez le Leader of Tomorrow une vraie envie de créer un esprit et une culture d’entreprise solides. “Ayant travaillé avant Cockpit pour des grands groupes américains, je souhaitais donner à ma société une identité basée sur des valeurs fortes, qui sont aussi les miennes : respect, écoute, engagement et qualité. Sur ces quatre points, je suis intransigeant. Si quelqu’un envoie un mail à un client ou un collègue mal torché ou à la limite de l’impolitesse, il est sanctionné. De même, pas question de s’impliquer à moitié : je veux des collaborateurs (ndlr: une vingtaine actuellement) qui soient “à fond dedans”, capables de faire des grosses journées où ils se donnent à 100 %. Un tel rythme n’est pas toujours tenable à long terme, et je comprends que certains s’en aillent, même si je regrette toujours ces départs.”

Malgré ces dehors un peu rudes, Grégoire Talbot met un point d’honneur à tisser des liens personnels avec chacun des membres de son équipe. “Je connais les noms de leurs enfants, de leurs conjoints, je connais leurs hobbies et il ne se passe pas un lundi sans que je demande aux sportifs quels ont été les résultats des matches du week-end. Tous les deux mois environ, on organise une sortie ensemble et deux fois par an, un séminaire consacré à la stratégie, souvent ponctué de bonnes grosses fêtes. Mais le lendemain à 9 h, tout le monde doit être sur le pont !” Tous copains, chez Cockpit ? “Ce n’est évidemment pas le but. Nos relations restent dans le cadre du travail strictement professionnelles. Mais je pars du principe que les gens sont performants en équipe s’ils se sentent compris, écoutés et respectés pour ce qu’ils sont à titre individuel.”

Réactivité

Un bon leader est également capable de redresser le cap quand les choses ne se passent pas comme prévu. “Quand j’ai fait mes premiers pas dans le business, j’ai dû faire une présentation pour une boîte américaine basée à Boston. L’enjeu était énorme et j’avais préparé cette présentation pendant six mois. Le jour J, mon ordinateur a planté et je n’ai rien pu présenter du tout. J’étais anéanti, mais quelqu’un m’a dit que c’était sans doute la meilleure chose qui pouvait m’arriver. Et c’était vrai.” Depuis lors, Grégoire Talbot ne craint plus l’échec ; au contraire, il le valorise, chez ses collaborateurs aussi – pour autant qu’ils soient à même de proposer des solutions à leurs erreurs. “Il y a quelques années, nous avons ouvert des bureaux Cockpit à Lausanne et à Singapour. Nous avons dû les fermer après six mois, car nous n’étions pas assez matures pour nous attaquer à ces marchés. L’année dernière, j’ai racheté et recapitalisé une société de transport ambulancier, pensant pouvoir la redresser facilement. Mais j’ai sous-estimé l’énergie qu’il fallait y mettre et surtout ce que cela représenterait comme efforts en moins pour Cockpit. Je n’ai pas abandonné le projet mais aujourd’hui je sais qu’il est impossible de réaliser de front dix success stories. On peut être administrateur dans plusieurs entreprises, mais on ne peut certainement pas être l’entrepreneur derrière chacune d’elles. Il faut pouvoir choisir !”

Camille Van Vyve

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