Dominique Collignon de la Fédération du loisir: “garder les règles actuelles qui fonctionnent ou adapter le CST à tout le pays”

© belga

L’application du Covid Safe Ticket continue de faire débat dans la capitale. La Fédération du loisir s’est exprimée par voie de communiqué ce vendredi et nous avons contacté son vice-président Dominique Collignon pour revenir sur celui-ci. Le secteur du loisir, déjà lourdement victime des confinements, a peur des conséquences économiques que pourrait amener l’application d’un Covid Safe Ticket sur le territoire bruxellois et notamment la concurrence déloyale avec les autres régions du pays.

La Fédération du loisir (FLRB) s’inquiète de l’effet du Covid Safe Ticket (CST) sur les activités de ses membres bruxellois. Elle a d’ailleurs publié un communiqué ce vendredi pour exprimer ses craintes. Dominique Colignon est directeur d’un bowling à Molenbeek mais aussi vice-président de la fédération. Il est revenu avec sur ce sujet. Nous avons aussi abordé les discussions entre les acteurs du secteur des loisirs et les responsables politiques et nous a expliqué ainsi que les solutions qui lui paraissaient les plus censées pour faire face à la situation.

Quelles sont les craintes du secteur des loisirs si le Covid Safe Ticket était instauré dans la Région Bruxelloise ?

“Tout d’abord, cela va créer une concurrence déloyale entre les établissements de la capitale et leurs homologues des autres régions. Bruxelles n’est pas une île et nous craignons de vivre une situation similaire à celle de nos confrères de Wallonie-Picarde où les Français ont débarqué en nombre cet été après l’instauration du pass sanitaire dans l’Hexagone. Ils ont évidemment eu du travail et des clients comme jamais et cela pourrait être pareil pour nos voisins du Brabant Flamand et Wallon si le Covid Safe Ticket entrait en application à Bruxelles. Cette situation m’a fait un peu fait repenser à la situation du lockdown d’une semaine que l’on avait connu en 2016 après les attentats. A l’époque, les établissements n’étaient pas fermés mais connaissaient forcément une très forte baisse de leur fréquentation. Mais lorsque je passais par une commune frontalière de Bruxelles, les supermarchés ou les restaurants étaient bondés. Ce n’est pas comme si les terroristes ne pouvaient pas aussi y commettre une attaque vu le peu de distance. Notre pays n’est pas assez grand que pour que ça ne créée pas des inégalités. Actuellement, le taux de vaccination à Bruxelles n’est d’environ que d’une personne sur deux (déjà nous perdrions 50% d’une potentielle clientèle), mais ce n’est pas à nous d’en payer le prix. Imaginez le cas d’une famille de 8 personnes qui souhaite aller au restaurant pour un anniversaire. Six sont vaccinées, deux ne le sont pas. Vous croyez réellement qu’elles ne vont pas faire quelques kilomètres en plus en Brabant Flamand ou Wallon pour se rendre dans un établissement où le Covid Safe Ticket n’est pas demandé ? L’été a été relativement positif, mais pour des secteurs comme le nôtre qui se déroulent essentiellement en intérieur, les mois d’automne qui arrivent sont les plus importants de l’année. En plus, on parle aussi de supprimer le chômage pour force majeur à partir du 1er octobre. Mais quid si par faute de clients, nous sommes obligés de l’utiliser ? Nous devrons forcément le payer à nos employés alors que nous travaillerons à perte si la clientèle diminuait avec le CST.Ce n’est pas le moment de nous remettre la tête sous l’eau.”

Avez-vous eu l’occasion d’en discuter avec les autorités bruxelloises ? Y-a-t-il des concertations, des échanges où vous pouvez exprimer vos craintes ou vos revendications?

“Nous avons eu mardi dernier avec d’autres secteurs comme la culture ou des cinémas, une réunion avec les chefs de cabinet de Barbara Trachte (Secrétaire d’État bruxelloise à la Transition économique et à la Recherche scientifique), d’Alain Maron (Ministre bruxellois de la Santé) et de Rudi Vervoort (Ministre-Président). Ils devaient transmettre les points dont nous avons discuté à la Cocom et il est encore possible que nous ayons une nouvelle réunion. Mais après, il faut aussi qu’on soit écouté ce qui n’est pas nécessairement l’impression que l’on a avec mes confrères d’autres secteurs. On a le sentiment que tout est déjà décidé et que les discussions avec nous sont juste organisées pour la forme.”

Quelles solutions proposez-vous ? Ne craignez-vous pas qu’on revienne à des mesures aussi lourdes (comme un confinement) que celles qui ont été appliquées au mois d’octobre il y a un an ?

“Il y a deux solutions, soit on applique le Covid Safe Ticket à tout le pays pour que tous les établissements soient traités de manière équitable, soit on continue d’appliquer les règles sanitaires actuelles qui ont fait leurs preuves, sauf si on devait nous démontrer que ce n’était plus le cas. Cette dernière possibilité nous semble la plus juste. Depuis la réouverture du secteur, nous n’avons pas constaté que nous avons créé de nouveaux clusters. Nous pensons donc que les règles sanitaires comme le port du masque, le lavage des mains ou la distanciation sociale fonctionnent. Contrôler les Safe Ticket, ça réclame aussi du temps et de l’investissement. Dans un cinéma, vous avez des évènement dans des créneaux horaires, mais dans un bowling ou une plaine de jeux, les gens défilent toute la journée. Mais ce n’est même pas encore le problème principal. Il existe encore toujours une jauge de 50 personnes. Mais cette jauge ne tient pas toujours compte du volume de l’établissement alors que certains comme mon bowling par exemple ont une capacité d’accueil plus importante. Mais voilà, on accepte cela. Les nouveaux cas sont essentiellement arrivés avec les retours de vacances pendant que nous avons continué à appliquer les règles. On a laissé des personnes revenir sans faire attention et maintenant que les chiffres remontent on en reviendrait aux vieilles recettes d’il y a un an ? Ce n’est pas à nous de payer le prix d’une mauvaise gestion ou du manque d’adhésion au vaccin. De plus, je ne suis pas persuadé qu’un Covid Safe Ticket va convaincre les gens de se faire vacciner. Peut-être qu’il faut imposer le vaccin mais ce n’est pas à moi de le décider. Je suis en revanche favorable au maintien du port du masque. Je me suis rendu récemment aux Pays-Bas pour un évènement lié au bowling. Vous présentez votre pass et après les gens enlèvent leur masque et c’est un peu open bar. Or, on sait que le vaccin n’est pas la protection absolue, qu’on peut être contaminé et contaminer malgré tout même si les risques sont moindres. Mais les gens ont tendance à l’oublier surtout si le Covid Safe Ticket fait en sorte que l’on vous dit que vous présentez aucun risque alors que vous pouvez être porteur du virus et potentiellement le transmettre. Il deviendrait alors une fausse solution alors qu’on prétend vouloir créer des Safe Space qui ne le seraient pas nécessairement.”

F.Chl.

.

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Partner Content