Scandales, arnaques, cartels… le florilège du pire de 2014

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Les scandales financiers se suivent et se ressemblent depuis 2008. Six ans après le début de la débâcle financière, le millésime 2014 n’a pas échappé à la règle. Florilège.

Au suivant ! Comme les années précédentes, 2014 aura amené son lot d’affaires financières. Il ne s’est pas passé deux mois sans que n’éclate une nouvelle affaire financière. Comme si rien n’avait changé six ans après la chute de Lehman Brothers à l’automne 2008. Comme si les fauteurs de troubles n’avaient rien compris. Comme si les “banksters” (ces banquiers aux méthodes de gangsters) menaient toujours le bal. Et cela, malgré tous les efforts de réglementation entrepris depuis. A moins que, comme l’a récemment écrit le philosophe français Roger-Pol Droit dans le journal français Les Echos, la société moderne détecte mieux et plus vite les dérapages. Des dérapages qui, hier encore, restaient invisibles.

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1. LE CARTEL DE L’OR : 10 fois la dette de la France

Un couple de professeurs d’une université de New York met le doigt sur une très probable manipulation du prix de l’or. Au cours de la période 2001-2013, ils ont observé une curieuse tendance à la baisse du prix de l’or. Depuis 1919, le prix de l’or est en effet fixé par quelques grands acteurs deux fois par jour, une fois le matin et une fois l’après-midi. Or, lors du fixing de l’après-midi, les prix sont presque systématiquement à la baisse (alors qu’ils sont beaucoup plus irréguliers le matin). Une enquête est ouverte pour voir si ce marché de 20.000 milliards de dollars, ce qui équivaut grosso modo à 10 fois le poids de la dette de la France, n’est pas manipulé.

2. VIRTU OU CINQ ANS DE TRADING SANS PERTE : 1.238 séances en Bourse suspectes

Spécialisée dans le trading à haute fréquence (achats et ventes de titres à grande vitesse par des algorithmes), la société Virtu se voit obligée de reporter son entrée à la Bourse de New York suite à la publication de ses comptes. Surprise, en effet : sur les cinq dernières années, soit 1.238 séances de cotation, Virtu n’a perdu de l’argent qu’une seule fois. Ce qui apparaît fort suspect, d’autant que sort au même moment Flash Boys, le dernier livre du célèbre journaliste américain Michaël Lewis. Ce dernier critique de manière virulente l’univers du trading à haute fréquence. Il est finalement question pour Virtu d’une IPO dans le courant du premier semestre 2015.

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3. SOUPÇONS DE BLANCHIMENT CHEZ UBS BELGIUM : 10 ans de lessive

Faisant déjà l’objet de poursuite aux Etats-Unis, en Suisse et en France, UBS se retrouve dans le collimateur de la justice bruxelloise. Le juge d’instruction Michel Claise soupçonne la succursale belge du géant suisse d’avoir aidé des Belges à frauder le fisc. Une enquête est en cours.

On se souviendra que la banque s’est installée chez nous en 2004, au moment de la première amnistie fiscale (DLU). Mais ses résultats commerciaux n’ont jamais été à la hauteur des moyens humains et matériels investis. La banque a-t-elle caché derrière son business officiel, mais peu rentable, une activité parallèle de transmission, dans l’ombre, de patrimoines non déclarés… vers la Suisse ? Seule certitude : 10 ans plus tard, UBS décide de se désengager du marché belge. Mi-novembre, Puilaetco Dewaay a en effet racheté UBS Belgium. Une acquisition qui comprend la reprise du personnel, du portefeuille de clients et des actifs de la clientèle d’UBS Belgium. Mais pas de son passif juridique.

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4. L’AFFAIRE BNP POUSSE PROT VERS LA SORTIE : 6 milliards d’euros d’amende

Victime d’un burn-out à 63 ans, Baudouin Prot, le président du conseil d’administration de BNP Paribas a mis officiellement un terme ce 1er décembre à plus de 30 années de carrière au sein de la banque. Un départ prématuré qui s’est fait dans la discrétion la plus totale, deux ans avant la fin de son mandat.

Figure emblématique du plus puissant groupe bancaire français, Baudouin Prot ne s’est pas montré à la soirée annuelle de la presse, le 15 octobre dernier, dans l’orangerie du magnifique hôtel particulier de la rue d’Antin (quartier général de la banque à Paris). En cause bien sûr, la lourde amende de 9 milliards de dollars (6 milliards d’euros, soit 1,25 fois les bénéfices 2013 de la banque) que s’est vu infliger en juillet dernier BNP par la justice américaine pour avoir effectué des payements en dollars avec des pays placés sous embargo par les Etats-Unis (Cuba, Soudan et Iran). Les Etats-Unis avaient d’ailleurs épinglé plusieurs autres banques – dont la néerlandaise ING et la britannique Standard Chartered – au motif qu’elles avaient passé des opérations avec des pays sur la liste rouge de Washington.

5. “SUBPRIMES” : Bank of America crache 17 milliards de dollars

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Reconnue coupable, Bank of America, l’une des plus grandes banques aux Etats-Unis, accepte en août dernier de débourser la somme astronomique de 17 milliards de dollars (environ 14 milliards d’euros) pour échapper aux poursuites et mettre ainsi définitivement un terme à son rôle dans la crise des subprimes. C’est l’amende la plus élevée jamais infligée à une banque américaine. Elle équivaut à trois quarts de la valeur de KBC en Bourse (19 milliards d’euros).

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6. LA FED PROTÈGE GOLDMAN SACHS : 150.000 dollars par an

Des enregistrements audio mettent au grand jour les connivences entre la Fed, le gendarme des banques américaines, et les institutions financières qu’elle est chargée de surveiller. Au total, 46 heures de conversations ont été enregistrées secrètement en 2012 par Carmen Segarra, une ancienne juriste de banque engagée par la Fed en 2011 – avec un salaire de 150.000 dollars par an – et chargée de superviser Goldman Sachs. Les bandes sonores révèlent que la Fed, sans pitié pour BNP Paribas ou Bank of America, se montre particulièrement indulgente à l’égard de la puissante banque d’affaires malgré divers manquements (conflits d’intérêt, etc.). Forcée de rédiger un rapport complaisant, Carmen Segarra a ensuite été licenciée.

7. PETITS ARRANGEMENTS ENTRE AMIS AUTOUR DU FOREX : 32 milliards d’euros

Le scandale a éclaté en 2013. Mais une première amende vient de tomber. A l’instar de ce qui s’est passé pour le Libor, le taux d’intérêt interbancaire de Londres qui a été manipulé pendant des années, le marché des changes (Forex) fait lui aussi l’objet de tripotages, Diverses autorités de contrôle à travers le monde suspectent plusieurs grandes banques internationales (Barclays, etc.) d’avoir ensemble manipulé les taux de change, y compris le marché de change euro-dollar qui, à lui seul, représente un volume quotidien de 1.300 milliards de dollars. Le 12 novembre dernier, les régulateurs financiers américain, britannique et suisse ont condamné six grandes banques à une amende de 3,4 milliards d’euros pour avoir “trafiqué” de manière systématique et à grande échelle ce marché des changes. La facture pourrait gonfler à 32 milliards au final, soit quasiment trois fois la charge de la dette de l’Etat fédéral (11,4 milliards d’euros d’intérêts en 2013).

8. HSBC ET LES DIAMANTAIRES ANVERSOIS : des centaines de millions d’euros d’impôts éludés

Autre scandale d’évasion fiscale belgo-belge. Outre UBS, le juge Michel Claise a également inculpé la banque HSBC pour fraude fiscale grave et organisée, blanchiment d’argent, organisation criminelle et exercice illégal de la fonction d’intermédiaire financier. Motif ? HSBC aurait “sciemment” aidé des centaines de Belges nantis, et notamment des diamantaires anversois, à frauder le fisc pendant des années. Le préjudice pour les caisses de l’Etat s’élèverait à plusieurs centaines de millions d’euros.

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9. MANIPULATION DU PRIX DE L’ALUMINIUM : 600.000 tonnes bloquées

Plusieurs banques américaines, dont Goldman Sachs et JP Morgan, sont accusées par le Sénat américain d’avoir poussé vers le haut le prix de l’aluminium. Elles auraient, entre autres, versé des millions de dollars de commissions au géant allemand Deutsche Bank, au conglomérat Glencore et au hedge fund britannique Red Kite pour les aider à augmenter le temps d’attente de 600.000 tonnes d’aluminium dans leurs entrepôts de stockage.

D’autres produits comme l’argent, le cuivre, le cacao, le riz, le maïs ou encore le café sont régulièrement soupçonnés d’être manipulés par des courtiers visant à assécher le marché. Une fois les prix repartis à la hausse, ces matières premières sont ensuite remises au compte-gouttes et à prix fort sur le marché.

10. LES MILLIARDS ÉVAPORÉS DU LUXLEAKS : 340 sociétés impliquées

Une vaste enquête démontre que plus de 300 sociétés étrangères établies au Luxembourg ont bénéficié pendant des années des largesses du fisc grand-ducal, au travers de la technique tout à fait légale des rulings. La révélation de ces accords confidentiels par la presse européenne concerne des solutions visant à trouver la voie la moins imposée pour les revenus des grands patrimoines, mais aussi des moyens pour abaisser la base taxable ou réduire le taux d’imposition des sociétés. Des véhicules financiers liés aux familles Lhoist, de Spoelberch (AB InBev) ou Frère, mais aussi Belgacom ou d’autres sociétés belges, sont concernés. On parle de milliards d’euros d’impôts éludés.

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