Ne plus indexer les salaires supérieurs à 5.400 euros brut : est-ce légal ?
L’assureur Axa ouvre la boîte de Pandore sur l’indexation salariale. L’entreprise a décidé qu’elle n’indexera plus complètement les plus hauts salaires à partir de janvier, rapporte De Standaard. C’est la première société à franchir le pas en Belgique. Quelles pourraient en être les conséquences pour les autres travailleurs ?
AXA n’indexera plus les salaires au-délà de 5.400 euros brut. La mesure touchera environ un quart du personnel, estimé en Belgique à 3.200 employés.
Selon la directrice des ressources humaines, Els Jans, une convention collective de travail prévoit, pour le secteur de l’assurance, que les barèmes soient automatiquement indexés. Mais, Axa paie plus que ces barèmes. “C’était devenu une habitude d’indexer totalement les salaires et nous faisions donc plus que ce qui était prévu dans la CCT.”
Le sujet a été longuement discuté avec les syndicats, sans parvenir à un accord. Finalement, Axa a décidé unilatéralement d’adapter l’indexation des plus hautes rémunérations. Les syndicats ne sont pas d’accord, mais la direction réplique qu’il n’y a rien d’illégal. La direction peut prendre cette mesure, car la convention collective sectorielle n’impose que l’indexation des salaires barémique. AXA paie son personnel plus que les barèmes, mais jusqu’à présent, la pratique était d’indexer quand même l’ensemble du salaire.
De nombreux travailleurs peuvent dorénavant sentir la menace et se poser la question suivante : mon patron peut-il décider unilatéralement de ne pas indexer mon salaire ?
Une pratique légale
Cela dépend en réalité du secteur dans lequel vous travaillez. “Dans la plupart des secteurs, il y a un accord pour indexer tous les salaires. Dans certains secteurs, la convention collective stipule, par exemple, que seuls les barèmes salariaux ou les salaires minimaux doivent être indexés. Ce sont des exceptions“, déclare Jan Vanthournout, responsable juridique de SD Worx, interviewé par nos confrères du Trends. Pour les employés du secteur social ou pour le personnel des professions libérales, il n’existe qu’un accord au niveau sectoriel sur l’indexation des barèmes salariaux.
Droits acquis et coutume
“Pour le secteur de l’assurance, il s’agit de la collection collective 306 (CP).Cette disposition prévoit que les barèmes sectoriels – les salaires minimaux – sont indexés, et non les salaires réels, ou ce que les entreprises paient en plus des barèmes. Tout ce qui est convenu au niveau sectoriel, vous devez le respecter en tant qu’entreprise“, commente Geert Vermeir, du prestataire de services RH SD Worx, interviewé par De Tijd.
“En outre, les entreprises ne doivent pas seulement respecter les accords au niveau sectoriel, mais aussi ceux au niveau de l’entreprise”, avertit Jan Vanthournout. “Parfois, la CCT de l’entreprise indique effectivement que tous les salaires sont indexés. Parfois, il ne le dit pas et il s’agit seulement d’une soi-disant coutume d’indexer tous les salaires. C’est ce que l’on appelle familièrement les droits acquis et les entreprises ne peuvent pas les mettre unilatéralement de côté. Il faut examiner cela au cas par cas, mais les entreprises peuvent annuler une convention collective. Ils peuvent aussi mettre fin à une tradition, mais il est toujours préférable de trouver des accords entre employeurs et employés.“
Ce que fait Axa aujourd’hui, soit se débarrasser de l’indexation complète des salaires, est donc légal.
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Qu’en est-il des autres secteurs ?
Au sein de la CP 310 – le secteur financier – il existe également des accords selon lesquels seuls les barèmes sont indexés – les salaires minimums pour un emploi particulier.
Mais d’autres secteurs ont des conventions qui prévoient l’indexation de tous les salaires et pas seulement des barèmes. C’est le cas, par exemple, pour les employés de la CP200. “C’est aussi le cas pour les travailleurs des secteurs de la restauration, de la métallurgie, de l’alimentation et du nettoyage“, précise encore Geert Vermeir au Tijd. Les entreprises individuelles de ces secteurs ne peuvent donc pas réduire l’indexation de tous les salaires. C’est ce qui est indiqué dans la convention collective sectorielle qui prévaut.
Une “attaque frontale contre l’indexation”
Le syndicat libéral CGSLB évalue les recours juridiques contre les entreprises qui refusent d’appliquer totalement l’indexation automatique des salaires, comme l’assureur AXA. C’est ce qu’a indiqué jeudi le syndicaliste Maarten Dedeyne.
Pour les syndicats, la pilule a du mal à passer. Même si les salaires les plus élevés seront impactés, le CGSLB craint que la mesure ne mette sous pression le mécanisme d’indexation dans son ensemble. “Et nous craignons également qu’il ne s’agisse pas d’une intervention temporaire, mais d’un ajustement fondamental.” Le CGSLB dit travailler avec des avocats pour voir s’il existe un recours juridique contre la décision d’AXA. Toutefois, aucune action juridique concrète n’a encore été engagée. La direction d’AXA estime qu’elle ne fait rien d’illégal
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