Les fonds “socialement responsables” le sont-ils vraiment en Belgique?
L’ASBL pluraliste Financité a passé à la loupe 1072 fonds d’investissement autoproclamés “socialement responsables” pour voir s’il l’était vraiment. Le résultat est peu probant.
Quitte à investir un peu d’argent, bon nombre de Belges souhaiteraient que leurs deniers aillent dans des fonds qui se disent “socialement responsables”. Un fonds d’investissement dit socialement responsable (ISR) permet à l’investisseur de placer son argent dans des fonds qui tiennent compte des critères financiers bien entendu mais qui visent aussi à intégrer des critères extra-financiers (c’est à dire concernant l’environnement, les questions sociales, éthiques et la gouvernance) dans les décisions de placements et la gestion de portefeuilles.
Financité (une ASBL pluraliste qui entend concilier argent, éthique et solidarité) a analysé pour la première fois 1072 fonds d’investissement autoproclamés “socialement responsables”. L’objectif de cette analyse est de les passer au crible à travers 4 critères (droits fondamentaux, les armes de guerre, le nucléaire et les activités climaticides) afin de déterminer si ces fonds sont bien aussi socialement responsables qu’ils l’avancent. Et le résultat est plutôt inquiétant. En effet, 90% des fonds qui se disent socialement responsables possèdent au moins un actif qui viole les droits fondamentaux. Explication.
Sur les 1072 fonds autoproclamés ISR, seule la moitié (542) ont remis le cahier de charges demandé. Les 530 autres fonds n’ont rien remis pour la simple et bonne raison que, soit cette information n’est pas disponible, soit la nature du fonds est si complexe qu’elle est pour ainsi dire impossible à analyser.
Analyse selon les 4 critères
• Droits fondamentaux : sur les 542 fonds analysés, 488 d’entre eux, soit 90% ont investi dans au moins un actif de la liste noire droits fondamentaux (droit humanitaire, droits sociaux, droits civils, environnement et gouvernance, selon les conventions internationales ratifiées par la Belgique). L’encours directement investi dans des entreprises ou des États présents sur la liste noire s’élève au total à 8,3 milliards d’euros.
• Armes de guerre : sur les 542 fonds analysés, 159 d’entre eux, soit 29% ont investi dans au moins un actif de la liste noire armes de guerre. L’encours directement investi dans des entreprises ou des États présents sur la liste noire s’élève au total à 181 millions d’euros.
• Activités climaticides : 392 fonds, soit 72% ont investi dans au moins un actif de la liste noire climaticide. L’encours directement investi dans des entreprises ou des États présents sur la liste noire s’élève au total à 1,4 milliard d’euros.
• Nucléaire : 271 d’entre eux, soit 50% ont investi dans au moins un actif de la liste noire nucléaire. L’encours directement investi dans des entreprises ou des États présents sur la liste noire s’élève au total à 2,4 milliards d’euros.
Seuls 24 fonds sur les 542 analysés passent le filtre des quatre listes noires, souligne un communiqué de Financité.
Financité précise aussi que 91 % des fonds autoproclamés ISR (ce qui signifie qu’ils ont reçu le label Towards Sustainability) ont investi dans des entreprises et/ou des États qui ne respectent pas des principes contenus dans les conventions ratifiées par la Belgique portant sur les droits fondamentaux ; 28 % des fonds autoproclamés ISR ont investi dans des entreprises et/ou des États de la liste noire armes de guerre ; 46 % ont des actifs présents dans la liste noire nucléaire et finalement 71 % sont exposés à la liste climaticide.
Et de mettre en garde les investisseurs à la recherche de fonds durables : “Il est légitime d’affirmer que les entreprises qui proposent des produits autoproclamés d’investissement socialement responsable en Belgique sont, dans leur grande majorité, des acteurs de pratiques commerciales déloyales qui, dans la présentation qu’ils font de leurs produits, induisent ou sont susceptibles d’induire le public en erreur sur les caractéristiques extra-financières principales de ceux-ci.” Des mots durs à la hauteur de la déception rencontrée à la vue des résultats de l’analyse.
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