“Les banques sans risque n’existent pas : elles en courent toujours !”

Le vaste plan de réforme du secteur bancaire, baptisé “Bâle III”, prévoit notamment un relèvement des fonds propres des établissements financiers. Cette exigence se répercutera-t-elle sur le client final ? Les réponses de Jan Hommen, président d’ING.

A 67 ans, Jan Hommen est à la tête d’ING depuis bientôt deux ans. C’est en janvier 2009 que ce bourreau de travail a été appelé pour remplacer, au pied levé, notre compatriote Michel Tilmant après son départ contraint. Au 9e étage de la “chaussure”, le siège amstellodamois du groupe, le Néerlandais mène une lourde restructuration, reposant sur une scission des activités bancaires et d’assurance, et continue de batailler ferme avec la Commission européenne.

Le vaste plan de réforme du secteur bancaire, baptisé “Bâle III,” prévoit notamment un relèvement des fonds propres des établissements financiers. Cette exigence se répercutera-t-elle sur le client final ? Les réponses du patron d’ING.

Que pensez-vous des nouvelles règles de Bâle III, qui renforcent la solvabilité des banques ?

Cela devient un peu plus embêtant, évidemment. Car il n’y a pas que les exigences accrues en matière de fonds propres mais aussi de nouvelles normes en matière de liquidité. Avec les résultats que nous engrangeons pour le moment, cependant, cela se présente plutôt bien. Bien sûr, nous devons encore accomplir pas mal de choses, comme rembourser l’Etat néerlandais. Mais nous ne sommes pas une entreprise risquée. Nous faisons très peu de trading pour compte propre. Pour ce qui est de notre effet de levier, là aussi, nous nous situons en dessous de la limite autorisée. Ce n’était pas le cas par le passé, mais nous l’avons considérablement diminué.

N’y a-t-il pas un danger que les clients et les actionnaires paient la facture de Bâle III ?

A partir du moment où vous devez disposer de davantage de fonds propres, l’actionnaire commence à se poser des questions. Quel est mon rendement ? Est-ce que je continue à investir dans le secteur bancaire ? Vais-je ailleurs ? D’un autre côté, en tant que banquier, si vous n’avez pas suffisamment de capital, vous ne pouvez plus faire autant crédit… et donc faire des choix. A quel client vais-je prêter de l’argent ? Où ? Avec quel risque ? Tout ceci peut donc effectivement avoir des conséquences sur l’octroi de crédit et son prix.

C’est pour cette raison que nous avons voulu autant que possible quantifier tout cela, chez ING mais aussi en tant qu’acteur faisant partie du secteur. Nous avons aussi été invités à discuter avec le Comité de Bâle. Nous avons eu la chance de pouvoir lui faire part de nos soucis. Tout ceci s’est passé dans un climat positif, en essayant d’être objectif.

Vous parlez d’atmosphère positive. D’aucuns évoquent plutôt un intense lobbying en coulisses !

Oui, mais cela ne signifie pas que ces discussions ne sont pas constructives. Si vous venez avec de bons arguments et que vous dites que les banques sont des institutions financières qui font tourner l’économie, n’est-ce pas dans l’intérêt du régulateur ? Il ne faut pas vouloir des banques sans risque : elles en courent toujours. Il faut plutôt être attentif aux risques qu’elles courent. Et trouver comment les maîtriser au mieux. C’est dans l’intérêt de tout le monde. C’est ce que j’appelle être constructif.

Propos recueillis par Sébastien Buron, à Amsterdam

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