Le Nobel consacre le rôle des banques comme piliers vulnérables de l’économie

Avec l’attribution du prix Nobel d’économie à Ben Bernanke, Douglas Diamond et Philip Dybvig, le jury récompense une “recherche fondamentale” sur le rôle des banques par temps calme mais aussi dans la tourmente des crises financières.

Les travaux salués lundi remontent aux années 1980: d’un côté, le travail du duo américain Douglas Diamond et Philip Dybvig sur le fonctionnement des banques. De l’autre, l’analyse de la Grande Dépression des années 1930 par l’ancien président de la Réserve fédérale américaine Ben Bernanke.

Le rôle “clé” des banques…

C’est en 1983 que le “modèle Diamond-Dybvig” voit le jour. Les deux chercheurs y expliquent le fonctionnement des banques “mais aussi pourquoi le système est vulnérable et a besoin d’être régulé”, explique l’Académie suédoise des sciences, chargée de décerner le prix.

Il s’agit “d’un des articles scientifiques les plus cités en économie et finance”, selon l’université de Washington à St. Louis, où enseigne M. Dybvig.

Le modèle se concentre sur le rôle d’intermédiaire des banques: recevoir les dépôts des épargnants et distribuer des prêts pour financer les ménages mais surtout les entreprises, permettant ainsi de faire fonctionner l’économie.

Ces investissements des banques dans les entreprises sont a priori rentables sur le long terme et leur rapportent des revenus. Les banques utilisent pour cela l’argent que leur confient les épargnants, en n’en gardant qu’une partie accessible pour le cas où quelques clients souhaiteraient retirer leur argent.

Du coup, si pris de panique, trop de clients souhaitent retirer leur épargne au même moment, cela met en difficulté les banques. Jusqu’à entraîner une crise profonde touchant “même des banques fondamentalement en bonne santé”. Le système est “vulnérable aux rumeurs”, résume l’académie.

… dans les crises financières

Le travail de M. Bernanke sur la Grande Dépression économique des années 1930 “peut être considéré comme appuyant les idées développées” par Diamond et Dybvig, note le comité Nobel.

M. Bernanke a détaillé “l’importance des crédits (bancaires) dans la propagation de la dépression” et démontré l’impact de la défaillance des banques et le gel de la distribution de crédits, qui a aggravé la crise.

Jusque-là, l’effondrement du système bancaire était surtout considéré comme une conséquence, ou, au mieux, comme une cause secondaire des crises.

Les travaux des trois lauréats “se renforcent mutuellement” et éclairent la manière dont les vulnérabilités des banques, pourtant essentielles pour le fonctionnement de l’économie, peuvent entraîner voire causer des “crises financières dévastatrices”, explique le jury.

Un éclairage d’actualité

Selon l’académie, les travaux des trois lauréats se sont révélés “extrêmement précieux” pour analyser les deux dernières crises majeures: la crise financière de 2008, après la faillite de la banque américaine Lehman Brothers, et la pandémie de Covid-19.

Leurs travaux avaient montré dès les années 1980 l’importance d’une bonne régulation bancaire. “Avant la crise de 2008, le secteur n’était pas perçu comme particulièrement vulnérable dans le monde de la finance et des régulateurs”, a déclaré Douglas Diamond lors d’une conférence de presse lundi.

A cette époque, la “panique des marchés financiers a eu un effet dramatique sur l’économie réelle” en entraînant une réduction de l’offre de crédits aux ménages et aux entreprises, explique le comité Nobel.

Au contraire, durant la pandémie de Covid-19, les banques centrales ont “fait en sorte de maintenir les crédits aux ménages et aux entreprises”, limitant ainsi les dégâts.

Les trois économistes primés “nous ont appris que ces politiques sont des ingrédients cruciaux pour éviter les épisodes de panique bancaire et préserver les relations de crédit”, ajoute le comité.

La crise de 2008 “et les améliorations de la régulation ont fait que le système est beaucoup moins vulnérable aujourd’hui”, assure M. Diamond, qui souligne également la bonne forme financière des banques.

Le problème, nuance-t-il, “c’est que les vulnérabilités, les épisodes de panique, bouleversements et autres crises peuvent arriver n’importe où dans le secteur financier, pas seulement au niveau des banques commerciales”.

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