La Réserve Fédérale face à un tournant

Janet Yellen, présidente de la Fed © REUTERS

Les marchés anglo-saxons ne parlent que de cela. Ces 16 et 17 septembre, le comité de politique monétaire de la Réserve fédérale se réunit une nouvelle fois pour évaluer l’opportunité de remonter ses taux d’intérêt directeurs.

Ceux-ci se trouvent dans une situation historique. Ils sont au plus bas, dans une fourchette allant de 0 à 0,25 %, et ce depuis la crise de 2008. Quasi sept ans ! D’ailleurs, c’est l’ensemble des politiques monétaires des pays développés qui n’ont jamais été aussi accommodantes, avec des taux au plancher et des mesures dites “non conventionnelles” comme les rachats massifs d’obligations aux investisseurs institutionnels (le quantitative easing ou QE). Les Etats-Unis, eux, ont déjà arrêté les programmes de QE en octobre 2014. A mesure que leur économie se redresse, ils envisagent maintenant une action sur les taux. Certes, le geste serait timide : une remontée d’à peine 0,25 % suivie d’une longue pause.

Négocier ce tournant est loin d’être évident. S’il est abordé trop tôt, la croissance américaine (3,7 % au second trimestre) pourrait être freinée et les créations d’emploi ralenties. S’il est abordé trop tard, d’autres risques pourraient surgir, dont une valorisation excessive de certains actifs (actions, obligations, immobilier). Pour certains, elle existe déjà. Jusqu’à cet été, la présidente de la Fed, Janet Yellen, avait laissé entendre qu’une décision interviendrait avant la fin 2015. Les marchés avaient tablé sur septembre.

Aujourd’hui, ce scénario n’est plus guère retenu. “Nous tablons plutôt sur décembre ou sur mars 2016”, confirme Peter De Keyzer, l’économiste en chef de BNP Paribas Fortis. Le contexte s’est en effet compliqué. La déconfiture des Bourses de Shanghai et de Shenzhen ont rendu les marchés occidentaux plus volatils. La décélération de l’économie chinoise pourrait provoquer moins de croissance et moins d’inflation aux Etats-Unis. Or, il faut suffisamment des deux avant de relever les taux. Enfin, la Fed doit aussi veiller à l’emploi — c’est dans ses statuts. En apparence, cela roule : le taux de chômage a été divisé par deux en cinq ans. Mais il faut encore que ce dynamisme débouche sur une hausse des salaires. Donc, tous les indicateurs ne sont pas au vert.

En attendant, deux certitudes. Premièrement, une remontée aura lieu à terme. “Car la Fed a besoin de montrer aux acteurs économiques que le temps de l’argent quasi gratuit n’est pas éternel, poursuit Peter De Keyzer. De plus, elle doit se reconstituer une marge de manoeuvre, si jamais une nouvelle crise devait éclater.” Et deuxièmement : une remontée aura des conséquences partout sur la planète. “Comme l’économie US se rapproche de l’équilibre, elle le digérera. Cependant, d’autres pays, qui ont des liens avec le dollar, en sont loin…”

Partner Content