La BCE annoncera-t-elle une nouvelle baisse de ses taux?

ECB-voorzitter Mario Draghi © Reuters

Sous pression après de mauvais indicateurs, la Banque centrale européenne (BCE) pourrait baisser dès jeudi ses taux d’intérêt afin de tenter de redynamiser la conjoncture.

Début avril, son président Mario Draghi avait déclaré la BCE “prête à agir” via des instruments conventionnels ou non pour combattre la faiblesse économique persistante en Europe, mais les économistes étaient jusqu’à présent divisés sur le calendrier d’une baisse de taux.

Deux mauvais indicateurs ces derniers jours auront suffi pour que le scénario d’une réduction du taux directeur, dès la prochaine réunion du conseil des gouverneurs le 2 mai, gagne en crédibilité. Ce taux stagne à 0,75% depuis juillet.

D’abord, l’activité privée s’est encore contractée en zone euro et en Allemagne en particulier. Ensuite, la confiance des entrepreneurs allemands a chuté de manière imprévue, envoyant un mauvais signal pour la première économie européenne, dont on attend qu’elle tire la zone euro hors de la crise.

“La BCE est sur le point de baisser ses taux d’intérêt la semaine prochaine, vu que son scénario d’une reprise au deuxième semestre semble compromis et que l’Allemagne, principal moteur, a l’air de peiner” aussi, estime Johannes Gareis, économiste chez Natixis. Pour les analystes de Capital Economics, ce serait même “une grande déception” si la banque centrale ne bougeait pas jeudi.

Tous n’optent cependant pas pour une telle précipitation. “L’exact moment de la décision est une question délicate, mais nous pensons que juin est plus probable que mai, parce que la BCE aura alors en mains les chiffres du premier trimestre”, anticipe Nikolaus Keis, d’UniCredit.

Un nouvel assouplissement monétaire, scénario qui a fait s’envoler les marchés cette semaine, amènerait le taux européen non loin du niveau quasi-nul du taux de la Réserve fédérale américaine depuis 2008.

Les appels du pied à la BCE se sont multipliés. Le numéro deux du Fonds monétaire international (FMI), David Lipton, lui a demandé de “maintenir sa politique très accommodante”, autrement dit des taux bas.

Même si elle s’est ensuite défendu de s’immiscer dans le débat, la chancelière allemande Angela Merkel a estimé, de manière très inhabituelle, que l’Allemagne aurait plutôt besoin de taux plus hauts, mais que “pour d’autres pays, (la BCE) aurait besoin d’agir un peu plus pour s’assurer que les entreprises ont accès au financement”.

Mais même si elle baisse ses taux, la BCE court le risque que son action reste sans effet sur l’économie. Depuis des mois, Mario Draghi explique avoir un problème de transmission de sa politique monétaire: le robinet du crédit a beau être ouvert, cela ne passe pas dans les tuyaux de la consommation et l’investissement. Le sondage d’avril de la BCE auprès de banques a accrédité cela, avec une demande de prêts en baisse, tandis qu’en mars, l’octroi de crédits au secteur privé a reculé.

Jörg Asmussen, membre du directoire de la BCE, a répété à plusieurs reprises que baisser encore le coût de l’argent n’était pas une solution magique. “La répercussion de baisses des taux à la périphérie serait limitée, or c’est là qu’elle serait le plus nécessaire”, a-t-il dit.

Pour remédier à ce problème, Mario Draghi pourrait, à défaut d’annonces concrètes, donner des pistes plus précises sur les mesures exceptionnelles évoquées début avril. “Les politiques non-conventionnelles viseront de nouveau à encourager les banques à prêter”, pensent les analystes de Capital Economics. Pour Howard Archer, d’IHS Global Insight, elles doivent viser “à améliorer l’accès au crédit des entreprises”, surtout les plus petites. Mais le dernier arrivé au directoire de la BCE, Yves Mersch, a vite douché les espoirs. “Les maux de l’Europe ne peuvent se soigner uniquement par des innovations monétaires”, a-t-il écrit dans le Financial Times.

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