ING: les raisons de ce nouveau bain de sang social

ING CEO Rik Vandenberghe © BELGA

Nouveau coup dur pour l’emploi dans le pays. Après le bain de sang social chez Caterpillar, c’est au tour de la banque ING d’annoncer la suppression de plus de 3.000 emplois en Belgique, soit un tiers de ses effectifs.

Le couperet est tombé chez ING Belgique. Comme le redoutaient depuis plusieurs semaines ses employés, la banque a présenté ce matin (à sept heures), lors d’un conseil d’entreprise extraordinaire, une restructuration qui prévoit la suppression de 3.150 postes en Belgique d’ici 2021. Le chiffre de 3.000 emplois menacés que nous évoquions déjà dans Trends-Tendances se confirme donc. En débutant sa conférence de presse ce matin le patron d’ING Belgique Rik Vandenberghe l’a avoué : “Je n’ai pas bien dormi ces derniers jours.”

Compte tenu du flot de départs naturels, maximum 1.700 employés pourraient être licenciés, promet la direction. N’empêche, le coup est rude. L’enseigne emploie actuellement un peu moins de 9.000 personnes : plus d’un tiers de ses effectifs vont passer à la trappe dans les cinq années à venir.

Quelques semaines après l’annonce de la fermeture du site de Caterpillar à Gosselies, la réponse ne s’est pas fait attendre du côté des syndicats qui appellent le personnel en agences et dans les différents sièges à se croiser les bras ce lundi, avant une grève annoncée pour ce vendredi 7 octobre.

Fermeture de 600 agences

Et pour cause. Il se confirme aussi que la banque au lion va faire le ménage du côté de son réseau Record Bank, filiale à 100 % d’ING Belgique et deuxième marque du groupe chez nous. Celle-ci sera intégrée au sein de la structure d’ING Belgique (trois millions de clients). Au total, la troisième banque du pays fermera ainsi près de la moitié de ses 1.250 agences (709 agences ING + 536 agences Record). A l’horizon 2012, son réseau ne comptera plus qu’environ 600 points de vente.

L’ambition d’ING Belgique est d’évoluer vers une plateforme bancaire unique intégrée avec ING Pays-Bas. But de la manoeuvre ? “Partager une infrastructure informatique et opérationnelle afin d’harmoniser les produits et services du point de vue commercial”, indique ING Belgique dans un communiqué de presse annonçant le plan d’économies. L’objectif de la direction est de réduire les coûts de l’ordre de 550 millions d’euros par an d’ici 2021 en diminuant drastiquement l’emploi, histoire de ramener le rapport coûts revenus autour des 50 % (contre 54 % actuellement). Le siège bruxellois d’ING, avenue Marnix à Bruxelles, devrait donc lui aussi connaître une réduction de ses effectifs, notamment dans ses services centraux (départements RH, IT, etc.). Des services centraux dont les fonctions sont de plus en plus sous-traitées et automatisées, en raison notamment de la digitalisation. La banque dit en effet procéder à “des investissements supplémentaires de 450 millions d’euros”, pour développer une offre encore plus digitale, inspirée du modèle de certaines entreprises technologiques comme Spotify ou Netflix.

Loi Renault

ING ne fait pas seulement le ménage au sein de sa grosse filiale belge (l’ex-BBL rachetée en 1998). Le groupe dirigé depuis Amsterdam par Ralph Hamers s’engage en effet dans une restructuration majeure à l’échelle mondiale. Au total, cette restructuration fera disparaître 7.000 emplois au sein du groupe néerlandais. Sur son marché national, aux Pays-Bas, ce sont 2.300 emplois qui devraient passer à la trappe, en plus des 2.000 employés qui vont quitter ING cette année. Le groupe s’est fixé un nouveau cap : devenir la banque numéro 1 au Benelux, avec 11 millions de clients. Comment ? En accélérant sa stratégie de transformation digitale et en important le modèle d’agences multi-canal développé aux Pays-Bas (où ING gère 8 millions de clients avec seulement 250 agences), fait-on valoir chez ING Belgique.

C’est que comme tous les acteurs du monde financier, l’établissement néerlandais fait face à un environnement de plus en plus difficile et un contexte économique qui ne s’améliore pas. Il faut compter avec des taux bas et une courbe de taux plate (ce qui réduit la marge nette d’intérêt et met les revenus sous pression) ainsi qu’une digitalisation croissante des services financiers. Une digitalisation qui se montre aujourd’hui particulièrement meurtrière pour l’emploi chez ING Belgique, de cela malgré plusieurs milliards d’euros de bénéfice ces dernières années. Bref, c’est la première fois en effet qu’une banque enclenche la procédure Renault (loi de 1998), qui organise la procédure pour les restructurations d’entreprises. Tout un symbole pour un secteur qui ressemble de plus en plus à celui de la sidérurgie des années 70.

Des vagues de licenciements avaient déjà touché ING Belgique

– Début 1998, la banque belge BBL, issue de la fusion entre la Banque Lambert et de la Banque de Bruxelles en 1975, est rachetée par le groupe ING. Fin des années 90, le groupe néerlandais ING, créé en 1991, étend ses activités et son réseau en reprenant une série de banques (BBL, BHF-Bank, Banque Slaski, DiBa Bank) et des assureurs aux USA notamment.

– 2001: constitution de Record Bank, filiale belge au sein du groupe ING.

– 2003: la BBL, filiale d’ING, disparaît de l’environnement belge et devient ING Belgique S.A.

– 2005: ING rationalise son IT et supprime 450 emplois dont 50 en Belgique.

– Fin 2007-2008: la crise financière touche le secteur bancaire et ING n’échappe pas au phénomène planétaire. L’Etat néerlandais injecte 10 milliards d’euros dans le groupe, qui doit en contrepartie s’assainir et se désengager d’une partie de ses activités sur injonction de la Commission européenne.

– Novembre 2007: ING réforme son réseau d’agences et supprime 850 emplois en Belgique. ING réoriente ses activités vers plus de “direct banking” via internet et les centres d’appels. Quelque 850 emplois (équivalents temps-plein) sont supprimés en Belgique.

– Février 2009: ING annonce la suppression de 315 emplois en Belgique dans le cadre d’un plan de réduction des coûts de 100 millions d’euros. Ces suppressions ont été réalisées par des départs naturels. Les effectifs d’ING Belgique atteignent 8.700 unités à la fin 2009 en Belgique.

– Novembre 2012: ING annonce son intention de fermer 40 agences, principalement en Wallonie.

– Février 2013: ING annonce la suppression de 1.000 emplois d’ici la fin 2015, via des départs naturels.

– Octobre 2016: ING annonce la suppression de 3.158 emplois en Belgique et jusqu’à 1.700 licenciements secs. ING Belgique et Record Bank fusionneront et 600 agences sur 1.250 que compte le réseau devraient disparaître. A l’échelle mondiale, ING supprime 7.000 emplois. “Digitalisation fulgurante, multiplication du nombre de concurrents, taux d’intérêt obstinément bas, étranglement des marges, lourdes taxes et régulation omniprésente” sont autant d’obstacles avancés par ING pour expliquer l’accélération de son plan stratégique.

Belga

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