Chypre : les banques en danger ?

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Bien qu’il remette en question le plan d’aide de 10 milliards d’euros de l’Europe et du Fonds monétaire international à Chypre, le rejet de la taxation des dépôts bancaires par le Parlement chypriote n’a pas provoqué de panique sur les marchés financiers : après deux jours de faiblesse, tant les Bourses que l’euro s’inscrivent en hausse ce mercredi. Les actions bancaires, en particulier, redressent la tête après la syncope du début de semaine.

Parce que personne ne doute qu’une autre solution soit trouvée pour que Chypre rassemble les 5,8 milliards d’euros demandés en échange du plan d’aide ? Sans doute. Mais aussi parce que la Banque centrale européenne a aussitôt rassuré : non, elle ne laissera pas tomber les banques chypriotes. La BCE continuera à leur prêter de l’argent comme par le passé, en maintenant ses conditions de faveur. Il faut en effet savoir que si elle prête avec beaucoup de générosité aux banques commerciales depuis la crise financière, ces dernières doivent déposer des garanties. Il s’agit en premier lieu d’obligations de leur Etat, dont les banques sont traditionnellement de grandes acheteuses, dans tous les pays du monde. Or, les obligations de l’Etat chypriote n’ont plus la qualité requise depuis juin de l’an dernier. La BCE a toutefois accepté de passer outre, comme elle l’a déjà fait avec les banques grecques, les obligations émises par Athènes ayant elles aussi perdu la qualité minimale normalement exigée pour servir de garantie.

Le cas de Chypre est toutefois un peu particulier : les dépôts réunis par les banques y étant démesurés par rapport à la taille du pays, les banques chypriotes ont aussi acheté énormément d’obligations grecques. Cela ne les a pas aidées, bien au contraire ! Suite à la restructuration de la dette d’Athènes l’an dernier, elles ont en effet accusé d’énormes pertes sur ces obligations : près de 4,5 milliards d’euros, soit un quart du PIB du pays ! A l’échelle de la Belgique, cela représenterait pas loin de 100 milliards.

Le gros problème de Chypre, c’est donc la situation très précaire de ses banques, largement due à la déconfiture de la Grèce. C’est effectivement au lendemain de la restructuration de la dette grecque que le pays a appelé à l’aide, en juin 2012. Sur les 17 milliards d’euros que représente globalement le plan d’aide négocié entre Chypre et ses sauveteurs, pas moins de 10 sont destinés à renflouer le secteur bancaire. La survie des banques chypriotes est pour l’instant assurée par les prêts amicaux de la BCE, comme c’est le cas des banques grecques et de plusieurs banques espagnoles. Mais une telle situation ne peut qu’être transitoire. Et dans le cas de Chypre, il y a urgence à ce que le gouvernement trouve une alternative à la ponction des dépôts bancaires rejetée hier par le parlement.

Guy Legrand

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