Après une brève respiration, les Bourses mondiales replongent

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La dépression s’est de nouveau abattue jeudi sur les marchés mondiaux, qui décrochaient sévèrement, terrassés encore et toujours par un cocktail d’inquiétudes et de doutes sur le pétrole, les banques et la croissance mondiale.

L’embellie de la veille a été étouffée dans l’oeuf par des places financières qui n’en finissent plus de broyer du noir depuis le début de l’année.

L’hécatombe était générale en Europe. Les places de Francfort, Madrid, Athènes, Copenhague, Helsinki, Vienne, Amsterdam et Bruxelles plongeaient toutes de plus de 3% aux alentours de 09H00 GMT. Londres cédait un peu moins de terrain (-2,55%). Milan s’enfoncait plus que les autres et cédait plus de 5%. Paris était à -4%.

La Bourse d’Athènes perdait, elle, plus de 6% en fin de matinée, les banques cédant plus de 20%, en raison d’inquiétudes générales sur l’économie mondiale, et particulièrement sur la Grèce, dont les discussions avec ses créanciers traînent en longueur.

A 10h00 GMT, l’indice général perdait 6,26% à 421,25 points. Cet indice a reculé de près de 25% depuis le 1er février, et 32% depuis le début de l’année. Les banques cédaient 20,34%, alors que les économistes dénoncent un manque de liquidité dans le pays déjà fragile, et qui doit faire passer des réformes sociales et fiscales difficiles avant que ses créanciers (UE, FMI) n’acceptent de discuter d’un possible allègement de l’énorme dette grecque.

La sinitrose, générale en Europe, a également touché Wall Street qui a ouvert en net recul, le Dow Jones perdant 0,88% et le Nasdaq 1,49%. Au même moment Paris perdait 3,14%, Francfort 2,07%, Londres 1,83%, Milan 4,88% et Madrid 3,93%. Les marchés asiatiques avaient aussi vu rouge et clôturé massivement en baisse dans la matinée.

L’Asie avait donné le ton juste un peu plus tôt avec un décrochage de 4% de la Bourse de Hong Kong qui reprenait ses activités après trois jours de congés, tandis que celle de Tokyo était fermée pour cause de jour férié.

“Le répit a été de courte durée”

“Après une journée de respiration, les marchés sont de nouveau sur le grill jeudi. Et le baromètre de la prise de risque est au plus bas”, résume Jasper Lawler, un analyste de CMC Markets. “Le répit a été de courte durée sur des marchés inquiets et fragiles, où les valeurs bancaires continuent à être secouées, et les investisseurs se réfugient vers les actifs les plus sûrs “, observe également Jean-François Robin, un stratégiste obligataire de Natixis

Les banques, qui cristallisent les peurs depuis quelques jours, étaient en effet en première ligne du décrochage, au point que plusieurs journaux allemands parlaient de “tremblement de terre bancaire”.

Vers 15H30 GMT, la française Société Générale reculait de 10,65%, l’italienne BMPS de 8,63%, l’espagnole Santander de 5,54%. En Allemagne, Deutsche Bank, la première banque allemande, qui avait été contrainte de publier un communiqué pour rassurer sur sa solvabilité s’enfonçait de nouveau, de 6,17%. A Londres, Barclays perdait 5,91%.

“Pourtant les banques ne sont pas du tout dans une situation similaire à celle de 2007, avec du stress en terme de liquidité et de solvabilité”, souligne M. Robin.

Le président de l’Eurogroupe, Jeroen Dijsselbloem, est d’ailleurs monté au créneau en début d’après-midi en affirmant que la zone euro, et ses banques, étaient structurellement dans une “bien meilleure situation” qu’il y a quelques années.

Juste avant, le patron de la Société Générale, Frédéric Oudéa, a fait la même chose en assurant que les turbulences subies par les valeurs bancaires s’expliquaient par une “surréaction” des marchés boursiers.

Plus de lapin dans le chapeau

Les cours du pétrole, autre sujet majeur de préoccupation des marchés,continuaient de se rapprocher de leurs plus bas niveaux depuis 2003, alourdissant encore un peu plus l’ambiance générale.

Corollaire logique de l’aversion totale des investisseurs pour le risque, les valeurs refuges étaient très recherchées.

L’or passait ainsi au-dessus des 1.200 dollars.

Le taux d’emprunt à 10 ans de l’Allemagne, le fameux “Bund”, se détendait fortement et évoluait désormais sous les 0,2%. A l’inverse, les dettes des pays du sud de l’Europe étaient sous pression, Grèce et Portugal en tête.

Pour Christopher Dembik, un économiste de Saxo Banque, “le coeur du problème, c’est le décalage entre les attentes des marchés en début d’année et la réalité des chiffres. Tout le monde croyait que l’année 2016 serait celle de la reprise mais, dès les premiers jours de janvier, la Banque Mondiale puis le FMI ont revu nettement à la baisse leurs prévisions de croissance pour l’année en cours”.

“Fondamentalement, le contexte n’est pas très différent” avec un “ralentissement chinois connu depuis 2009, une incurie du système bancaire italien et la nécessité d’une +bad bank+ pour le purger depuis 2012”, développe-t-il.

Selon lui, “désormais la panique est auto-entretenue et les marchés ne font plus guère attention aux fondamentaux”.

Si les marchés sont aussi désorientés depuis le début de l’année, c’est aussi parce que les banques centrales peinent de plus en plus à rassurer.

“Seule une action des banques centrales pourrait encore rassurer mais elles disposent de moins en moins d’instruments pour surprendre les investisseurs”, analyse M. Dembik.

La Réserve fédérale américaine est en position de statu quo, poursuit-il, faisant reposer la pression sur la Banque centrale européenne, or son président, “Mario Draghi, n’a plus de lapin à sortir de son chapeau afin de rassurer donc la baisse actuelle pourrait encore durer longtemps et potentiellement se transformer en nouvelle crise”.

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