A quoi ressemble l’agence bancaire post-covid?
Malgré la levée de certaines restrictions sanitaires, la banque sur rendez-vous, et de préférence à distance, semble vouloir rester dans ses habitudes.
Grâce à leurs équipements digitaux, les banques ont pu continuer à assurer leurs services dès les premières heures du lockdown de mars-avril 2020 et pendant toute la crise sanitaire. La plupart des agences du pays sont également restées accessibles, mais uniquement sur rendez-vous. Ce fut le cas pour tous les points de contacts physiques des grandes enseignes du pays (BNP Paribas Fortis, KBC, ING, Belfius, Crelan ou encore Argenta). Mais à présent, place à une relative réouverture.
Ouverture limitée
Ainsi, depuis le 1er septembre, les agences KBC fonctionnent à nouveau selon leur horaire habituel, mais avec moins de personnel, indique la porte-parole Viviane Huybrecht: “Nos agences ont retrouvé leur schéma d’ouverture normal d’avant-covid. Cet accueil très large n’empêche bien évidemment pas la prise d’un rendez- vous. Cela étant, nous travaillons avec une présence physique limitée pour respecter le cadre légal des mesures anti-covid fixées par le gouvernement (respect des distances, etc.). Cela signifie que, jusqu’à nouvel ordre, environ 65% des employés sont physiquement présents dans l’agence bancaire tandis que les autres 35% travaillent à domicile. Par conséquent, il peut s’écouler un peu plus de temps avant que le client puisse obtenir un rendez-vous.”
La crise conforte notre stratégie de banque locale de proximité.” Pino Attardo (CPH)
Alors qu’il sera possible de se rendre dans les agences Belfius dans le courant du mois de novembre, BNP Paribas Fortis accueille déjà depuis la mi- octobre les clients en mode “portes ouvertes”. Du moins le matin: de 9 h à 12h30. Pour le reste, la première banque du pays est accessible sur rendez-vous l’après-midi et le samedi matin, sauf à Bruxelles. “Les conditions sanitaires locales, comme aujourd’hui à Bruxelles, peuvent engendrer des exceptions à cette approche, justifie le porte-parole francophone Valéry Halloy. La protection de la santé de nos employés et de nos clients reste une priorité pendant cette pandémie.” Toutes les agences BNP Paribas Fortis laissent donc entrer le client durant la matinée, à l’exception de celles situées dans la capitale où le système du rendez-vous est d’application pour toute la journée.
On reste prudent
A l’heure où l’on parle de plus en plus d’une quatrième vague de l’épidémie, la prudence reste également de mise chez ING Belgique. Qu’elles soient situées à Bruxelles ou ailleurs dans le pays, toutes les agences de la banque orange (sauf quelques agences indépendantes)sont toujours fermées et uniquement accessibles sur rendez-vous. Matin et après-midi. “Nous voulons jouer la carte de la sécurité pour le personnel et les clients, et continuerons donc à travailler sur rendez-vous. Et si cela devait changer, nous le ferons savoir à nos clients en concertation avec nos partenaires sociaux”, indique Joëlle Neeb, précisant que la banque enregistre en moyenne 3.200 rendez-vous en agence par mois, soit plus de 100 rendez-vous par jour. Mais le conseil à distance a visiblement le vent en poupe.
“Nous constatons que de plus en plus de clients optent pour des conseils par vidéo et qu’ils accordent également des notes de satisfaction élevées à cet égard, ajoute Joëlle Neeb. Pour les clients souhaitant un prêt hypothécaire, nous leur demandons par exemple s’ils veulent en discuter avec notre conseiller dans un bureau ou à distance par appel vidéo. Les résultats sont remarquables: 9 clients sur 10 disent préférer le conseil à distance. Pour un rendez-vous d’investissement, plus de 8 clients sur 10 disent préférer le conseil à distance. Nous allons donc continuer à développer ce canal afin de pouvoir offrir cette expérience positive à encore plus de clients”, avance la porte-parole d’ING Belgique. Histoire de faire comprendre que ce mode de fonctionnement à guichet fermé ne change finalement pas grand-chose à la qualité du service. “Les clients apprécient l’approche sur rendez-vous avec une nette préférence pour le contact client à distance, soutient pour sa part Valéry Halloy chez BNP Paribas Fortis. Ils nous le prouvent dans leurs scores d’appréciation, valorisant leur expérience via Webex avant tout autre canal. Par exemple, un appel vidéo obtient un score de 11% plus élevé qu’un entretien face-to-face. La banque sur rendez-vous, et de préférence à distance, reste notre modèle pour l’avenir.”
Travail hybride
Autre gros changement: le télétravail. Dans la plupart des institutions, il entre de manière structurelle dans l’organisation, même s’il existait déjà un peu auparavant. Depuis le 1er mai, ING donne la possibilité à ses employés de télétravailler à 50% du temps depuis leur domicile ou de tout autre lieu en Europe. Chez KBC, “les employés du siège social viennent actuellement au bureau deux jours par semaine et peuvent travailler à domicile les autres jours, mais nous comptons permettre jusqu’à 50% de télétravail sur une base mensuelle à partir du 1er novembre, indique Viviane Huybrecht. Pour les employés du réseau d’agences, nous prévoyons également la possibilité de télétravailler un jour par semaine en moyenne, en tenant compte de l’organisation du travail et des besoins des clients. C’est aussi le cas chez Belfius où le nouveau statut Home Based prévoit le travail sur site un à deux jour(s) par semaine.
De son côté, BNP Paribas Fortis a pris un certain nombre de mesures pour rendre le télétravail techniquement et donc également possible pour les fonctions commerciales. “Désormais, explique Valéry Halloy, le télétravail va faire partie intégrante de la réalité quotidienne de très nombreux collaborateurs. Nous rendrons ainsi le télétravail structurel, ou régulier, pour les fonctions qui peuvent télétravailler un ou deux jours. A l’automne, cela sera formalisé par un avenant au contrat de travail où chaque employé concerné devra confirmer s’il s’engage ou non dans ce nouveau mode de travail. Il s’agit d’un premier pas important vers ce que nous appelons le smartworking.”
Comme avant
Faut-il en déduire que toutes les banques pourraient définitivement adopter le système du conseil à distance et de la banque sur rendez-vous? Ce n’est pas impossible. Mais pas partout, visiblement. Chez Beobank, par exemple, la prise de rendez-vous n’est plus obligatoire, “même si nous la recommandons pour pouvoir accueillir efficacement nos clients”, signale Sandrine Roberti de Winghe, directeur de la communication corporate. Une situation comparable à celle du CPH où Pino Attardo, directeur de toutes les agences CPH de la région du Centre dont celle de La Louvière et retail manager, donne également une autre image de l’agence bancaire post-covid. Pour lui, c’est bien d’un complet retour à la normale dont il faut parler. “Pendant la première vague, nous avions fortement réduit le personnel en agence et reçu les clients sur rendez-vous uniquement, dit-il. Mais nous n’avons abandonné personne. Bien avant la parution des chartes Febelfin ( la fédération des banques, Ndlr), nous avions anticipé les procédures réglementaires en matière de moratoire sur les crédits. Maintenant nous sommes complètement ouverts. Le client vient quand il veut, même sans rendez-vous. Le soir, s’il faut, en dehors des heures d’ouverture. Rien n’a changé par rapport à la période pré-covid. Le client reste roi. Parce que c’est tout simplement lui qui nous fait vivre.”
Revendiquant son statut de petit acteur dans un secteur dominé par quatre grandes institutions, le banquier estime que la période actuelle est même propice aux opportunités. “La crise conforte notre stratégie de banque locale de proximité. Basée à Tournai, CPH est une petite banque active en Hainaut, dans le Brabant wallon et à Namur. C’est une petite PME qui connaît tous ses clients. Ceux-ci apprécient être en contact avec un directeur d’agence qui ne change pas tous les trois ou quatre ans et qui continue à jouer son rôle, c’est-à-dire qui est intégré dans l’économie de sa région et qui les aide lorsqu’il ont une question ou un problème. Il est aussi le relais entre le terrain et le siège social. Nombre de personnes ne se sentent plus écoutées dans les grandes banques.” Quant au télétravail, Pino Attardo nous explique que “cela se met en place au niveau du siège de la banque. Mais en agence, ce n’est pas possible pour toutes les fonctions – nous avons encore des guichetiers au CPH – et ce n’est de toute façon pas dans notre ADN. Covid ou pas, nous sommes une banque conviviale où le service à la clientèle est primordial.”
Bref, à chacun sa recette pour servir le client. Certes, on voit s’opérer un “retour à la normale” sur de multiples fronts: campagnes de vaccination efficaces, activité économique, volume d’affaires des entreprises, niveau des indices boursiers, retour progressif au bureau, etc. Mais dans un monde qui change en permanence, tout le monde est loin d’être logé à la même enseigne.
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