La saison des résultats commence tout doucement en bourse. Dans un contexte particulier : la hausse des droits de douane américains. Auront-ils déjà un impact sur les chiffres du premier trimestre des entreprises européennes ? Décryptage avec Fernand De Boer, co-directeur de la recherche chez Degroof Petercam.
Nous sommes allons vers la moitié du mois d’avril… ce qui veut dire que le premier trimestre est terminé, et que les entreprises cotées vont tout doucement commencer à publier leurs résultats financiers des trois premiers mois de l’année.
L’actualité a bien sûr été marquée par l’arrivée au pouvoir de Donald Trump aux États-Unis, fin janvier, et les décisions de politiques commerciales – sous forme de hausse des droits de douane notamment – qu’il a prises depuis. Ce contexte marquera-t-il les résultats des entreprises européennes ? A quoi faut-il s’attendre ?
Trends-Tendances : Y aura-t-il déjà un impact des droits de douanes sur les résultats des entreprises ?
Fernand De Boer : “L’impact devrait encore être limité, au niveau des résultats du premier trimestre. La majorité des taxes sont entrées en vigueur en avril, et donc au cours du premier trimestre il y avait surtout les risques et avertissements qui prévalaient sur le marché. Je pense que la plupart des entreprises avaient donc encore un bon trimestre, ou un trimestre normal.
Certaines entreprises ont peut-être même pu profiter des craintes des taxes et ont donc exporté davantage, car les clients ont rempli leurs stocks. C’est difficile à mesurer parce qu’on n’a pas encore les données, mais je pense que c’est quelque chose qui pourrait se montrer dans les chiffres. De l’autre côté, pour les industriels notamment, la question sera : qu’en est-il du carnet de commandes ? Elles pourraient avoir chuté au vu de l’incertitude. Les clients seront plus prudents avec leurs décisions d’investissement et vont peut-être attendre et voir, et donc commander moins de produits.
Ce qui veut dire que les entreprises qui présentent leurs résultats seront aussi beaucoup plus prudentes et hésitantes avec leurs prévisions pour les mois à venir. La baisse de la confiance des consommateurs, qu’on voit déjà aux États-Unis, joue aussi sur ce facteur. Le marché sera donc très focalisé sur ces aspects-là lors des annonces, les commandes et les prévisions ; par exemple chez ASML, qui publie ses chiffres la semaine prochaine.”
Y a-t-il des secteurs où l’on pourra déjà voir un impact plus important que dans d’autres, concernant les commandes et les prévisions ?
“C’est encore difficile à dire parce qu’il y a toujours beaucoup d’incertitude. Mais je pense que les entreprises de semi-conducteurs et industrielles seront typiquement un peu plus hésitantes.”
Les marchés sont actuellement très volatils et il y a eu de fortes chutes. Peut-on s’attendre à d’importants mouvements des cours, s’il y a des bonnes surprises dans les résultats par exemple ?
“Cela dépend. Par exemple si l’entreprise bat les estimations des analystes, mais qu’elle est très prudente dans ses prévisions, qui seraient plus basses que les estimations, elle pourrait être punie en bourse. Dans ce contexte, nous ne regardons d’ailleurs pas trop les consensus des analystes, mais plutôt les dernières mises à jour qu’ils ont effectuées.
Je pense que le focus du marché sera surtout sur les prévisions que font les entreprises, beaucoup plus que sur les résultats du trimestre en tant que tels. S’ils sont significativement meilleurs que les estimations, il peut y avoir une hausse du cours, mais si les prévisions ne sont finalement pas bonnes, il y aurait une rechute. Parce qu’en plus, de nombreuses entreprises du secteur des biens de consommation, par exemple, avaient déjà averti que le premier trimestre sera plus dur, entre autres parce que Pâques est tard cette année. Dans certains cas, les attentes ne sont donc pas si élevées et peuvent être battues. Mais voilà, cela dépend.”
