Silicon Valley Bank: pas de risque immédiat pour le secteur bancaire
La Silicon Valley Bank (SVB) est en faillite. Avec une crise des crédits qui reste très présente dans les esprits, un secteur financier en mauvaise posture pourrait déstabiliser l’ensemble de l’économie et des marchés boursiers. L’inquiétude est donc à son comble. Souvenons-nous toutefois que dans les années 1980-1990, les faillites bancaires avaient été monnaie courante. Bref tour du sujet en trois questions.
Sommes-nous face à un remake de 2008?
Le risque est faible. Les banques détiennent des réserves, sous la forme d’obligations souveraines souvent, qu’elles pourraient au besoin vendre facilement et rapidement. Le malheur est que ces titres ont chuté en 2022, en raison de la hausse des taux d’intérêt. Or les règles comptables américaines permettent d’évaluer au prix d’acquisition les bons du Trésor appelés à être conservés jusqu’à maturité, en conséquence de quoi les pertes comptables ne figurent pas dans les bilans. A l’inverse, les obligations que les banques sont susceptibles de vendre sont comptabilisées à leur juste valeur.
Le cas de la SVB, dont le bilan contenait beaucoup d’obligations à détenir jusqu’à maturité (90 milliards de dollars, sur un bilan de 210 milliards), est particulier. Comme ses fonds propres étaient par ailleurs relativement faibles, sa solvabilité inquiétait déjà les investisseurs. Mais au contraire des autres banques, sa clientèle était surtout constituée de start-up de la Silicon Valley, très étroitement liées à leurs actionnaires. Lesquels ont massivement retiré leurs fonds à la fin de la semaine dernière. Jeudi, 42 milliards de dollars sont sortis des comptes, soit 4,2 milliards par heure; à titre de comparaison, les clients de la Washington Mutual ont retiré 16,7 milliards en 10 jours. Aucun organisme ne peut faire face à une telle ruée.
Reste qu’il est peu probable que le phénomène débouche sur une crise majeure. La clientèle de la SVB était principalement composée d’entreprises dont les avoirs avaient, après la crise financière, été garantis par un programme de la Federal Reserve (Fed) baptisé Transaction Account Guarantee Program, aboli en 2012. Les autres banques servent, elles, des clients privés et des petites entreprises, dont les actifs sont couverts (jusqu’à 250.000 dollars) par le système américain de garantie des dépôts. Certes, la faillite de la SVB n’est pas un cas isolé. La Silvergate Bank, spécialisée dans les cryptomonnaies, vient elle aussi de plonger. Mais compte tenu du caractère très spécifique de la SVB, du système de garantie des dépôts et de la réaction pour le moins énergique de la Fed, il est peu probable que la panique se répande. En l’état actuel des choses, le risque, pour le secteur bancaire américain, est limité.
Quelles retombées pour les banques européennes?
Contrairement aux américaines, nos banques confient la grande majorité de notre épargne à la Banque centrale européenne. En outre, ABN Amro, pour ne citer qu’elle, acte la quasi-intégralité des obligations d’Etat qu’elle a en portefeuille à leur valeur de marché. La déroute de la SVB aura donc très peu d’effets directs. Si la Fed parvient à éviter qu’ils se répandent outre-Atlantique, les séquelles indirectes seront négligeables également. Les baisses de cours devraient même inciter à aller jeter un coup d’œil opportuniste du côté de certaines banques néerlandaises, bien plus qu’à revoir à la baisse les conseils relatifs au secteur européen.
Quelle incidence sur les entreprises?
Les grandes victimes seront évidemment les clients qui détiennent beaucoup d’actifs à la SVB – comme, près de chez nous, le néerlandais Pharming (45 millions de dollars, soit environ la moitié de sa trésorerie et 6-7% de sa capitalisation boursière). D’autres informations suivront certainement sous peu.
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