Sept proies néerlandaises

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Voici sept entreprises néerlandaises susceptibles d’être rachetées en 2024. Mais ce n’est pas parce qu’une société pourrait être reprise que son titre mérite dans tous les cas d’être acquis.

Les incertitudes économiques et l’envolée des taux d’intérêt ont fait plonger le marché mondial des fusions et acquisitions à son niveau le plus bas depuis 10 ans. A Amsterdam, huit petites entreprises néerlandaises vont être retirées de la cote, a-t-on appris cette année ; soit 6% des sociétés cotées aux Pays-Bas.
Euronext Amsterdam s’attend à ce que la tendance se confirme. Ce n’est pas une bonne nouvelle pour elle, qui n’a plus enregistré d’introduction depuis un an et demi. Beleggers Belangen sélectionne chaque année des entreprises qui pourraient bien servir de cible l’année suivante. Lucas Bols et Ordina, qui ont fait l’objet d’offres en 2023, figuraient dans notre liste de 2022; ABN AMRO, B&S, Fastned, Just Eat Takeaway, TKH, Vopak et Wereldhave sont toujours cotées, mais tout peut encore arriver. Voici sept autres proies néerlandaises, classées par ordre alphabétique.

Allfunds

Plateforme espagnole de négoce et de trading, Allfunds a déjà fait l’objet de plusieurs tentatives de rachat. Deutsche Börse aurait eu des visées sur elle avant même son introduction en Bourse, en avril 2021, mais elle aurait jugé la proposition trop basse. L’offre émise par Euronext en février dernier n’a pas davantage abouti. Euronext mettait sur la table 5,69 euros par action plus 0,04059 euro par action Euronext, soit quelque 8,75 euros par action, bien en deçà des 11,50 euros atteints lors de l’entrée en Bourse. Depuis, le titre a perdu près de 50% de sa valeur. Il y a un mois et demi, le journal économique Vozpopuli a rapporté que la société avait chargé Goldman Sachs d’explorer plusieurs voies stratégiques; on ne sait rien de plus. Allfunds semble en tout cas être dans le viseur de plusieurs acteurs; elle dispose donc d’un potentiel de croissance certain et d’une position forte, sur ce marché fragmenté.

Brunel

Eternelle candidate à la reprise, l’agence de consultance a récemment payé cher, en Bourse, les retards accusés par des projets éoliens offshore et l’ajournement d’un grand projet d’infrastructure dans la région Inde/Moyen-Orient. Dans l’ensemble néanmoins, elle est assez peu sensible au ralentissement de l’économie et dispose d’un réel pouvoir de fixation des prix. Elle n’est pas endettée et elle peut générer énormément de liquidités. Les perspectives, à plus long terme, sont excellentes. Jan Brand (74 ans), son fondateur, détient 60% des actions. Son CEO Jilko Andringa a récemment fait savoir que l’homme ne renoncerait pas aisément à sa participation; compte tenu de son âge, toutefois, il pourrait être sensible à une offre généreuse. Brunel pourrait intéresser une grande société de travail intérimaire ou un fonds de private equity.

Heijmans

La stagnation du marché néerlandais de l’immobilier frappe de plein fouet cette firme de construction, qui réussit néanmoins à compenser le ralentissement par la prise de commandes sur un marché de l’infrastructure que portent le changement climatique et la transition énergétique. La valorisation est faible mais le potentiel, énorme. L’acquisition du promoteur Van Wanrooij assure à Heijmans de nombreuses possibilités de croissance sur le marché du logement, surtout si celui-ci est appelé à se redresser. Le fait que le litige avec le gestionnaire du réseau public de transport d’électricité TenneT ait tourné à l’avantage de Heijmans élimine également une partie du risque. Nous ne serions pas surpris de voir un jour un acteur comme le holding HAL se porter acquéreur de cette société bien gérée, et la fusionner avec l’entreprise de construction Van Wijnen, elle aussi annexée. HAL a des participations dans les segments des matériaux de construction et des prêts hypothécaires également.

Kendrion

L’action du fabricant d’électro-aimants a chuté de près de 30% rien que cette année. Le marché des freins industriels, en particulier, se tasse, sous l’effet notamment du ralentissement de la demande de la part de l’éolien offshore et de l’automatisation industrielle. Bien que Kendrion soit parfaitement positionnée sur son marché, son bénéfice net a cédé énormément de terrain au troisième trimestre. Kendrion est, avec sa gamme de produits, pleinement engagée dans la transition verte. Si son cours est si bas, c’est probablement en partie à cause de son ratio d’endettement (2,9), mais la direction compte bien réduire l’endettement net sous peu. Teslin Participaties a fait passer cette année sa participation dans Kendrion de 15,1% à 21,3% et Kempen Capital Management, de 6% à 10% – moyennant un prix finalement trop élevé, mais ces acteurs pourraient être en mesure d’imposer une vente. La capitalisation boursière de Kendrion n’est encore que de 170 millions d’euros, pour une valeur comptable de 176 millions. Le CEO Joep van Beurden ne cache pas l’agacement que provoquent chez lui l’accumulation des réglementations et le coût de la cotation en Bourse.

Sligro

Le grossiste en produits alimentaires s’est étendu l’an passé en Belgique et a énormément investi dans l’informatique. Le processus étant en voie d’achèvement, il va pouvoir commencer à tirer profit des économies d’échelle. Le marché fonctionne au ralenti, au détriment des résultats et du titre. L’entreprise familiale estime toutefois pouvoir augmenter considérablement sa marge bénéficiaire ces prochaines années et compte poursuivre son internationalisation après 2025. Reste à savoir si elle ne ferait pas mieux d’œuvrer à son expansion sans plus être cotée. Koen Slippens, son CEO, considère lui aussi les resserrements de la réglementation comme un inconvénient de la cotation. Un acquéreur pourrait augmenter rapidement la taille de sa propre entreprise, pour un coût relativement faible. La famille Slippens détient près de 34 % des actions ; NN et APG ont chacune une participation de 10%.

Van Lanschot Kempen

Autre éternelle candidate à la reprise, Van Lanschot Kempen (VLK) est, avec 133,6 milliards d’euros en gestion, la plus ancienne banque privée indépendante des Pays-Bas. Le marché de la gestion patrimoniale est depuis longtemps en phase de consolidation. VLK a pour elle la solidité de son bilan – son ratio de solvabilité CET1 s’élevait à la fin du troisième trimestre à 18,9% (15% visés). Il était de 21,6% encore à la mi-2023, mais sa baisse n’est due qu’au détachement du dividende, de 2 euros par action, prévu pour décembre. Si le ratio CET1 se maintient au-dessus de 17,5% jusqu’à la fin de l’année, il est probable qu’une distribution de capital supplémentaire aura lieu en 2024, ce qui rend un rachat intéressant. Les dépenses sont toutefois trop élevées. Le ratio coûts/revenus atteignait en juin 74,5%, contre un objectif de 70%. L’approche personnalisée laisse peu de marge de manœuvre sur ce plan. Un acquéreur pourrait opter pour des solutions plus radicales, de manière à accroître la rentabilité. La famille de feu Dik Wessels détient, via le holding Romij, 10,05% des actions, la famille Van Lanschot, 9,76%, par l’intermédiaire de LDDM Holding ​BV.

Vastned

L’entreprise propriétaire d’immobilier commercial dans des rues passantes des Pays-Bas (42%), de France (29%), de Belgique (23%) et d’Espagne (6%) va devoir refinancer dans les deux ans 80% de sa dette, à des taux nettement plus élevés. Sur le plan opérationnel, elle se porte bien, mais le régime fiscal avantageux dont elle bénéficie disparaîtra en 2025. Un examen stratégique a conclu que la cession d’une partie du portefeuille permettrait à toutes les parties de dégager la plus-value la plus élevée. Avec une action dont le cours est inférieur de plus de 50% à la valeur comptable, une augmentation de capital n’est pas envisageable. Vastned a récemment vendu plusieurs biens à un prix supérieur à leur valeur comptable, mais des mesures plus drastiques s’imposent. Trois actionnaires ont renforcé leur position et ont même aligné leur politique de vote. Ils détiennent ensemble 16,78% des actions. Un autre en possède 25%. Si les cessions immeuble par immeuble se déroulent trop lentement, une vente globale devra être envisagée. L’acheteur qui résoudrait le problème du financement pourrait faire une bonne affaire.

Toute entreprise ou presque est susceptible de faire l’objet d’un rachat

C’est un peu une loterie: un problème de financement chez l’une, un excédent de trésorerie chez l’autre, la présence de quelques grands actionnaires… sont souvent les prémices d’une reprise. Il faut bien sûr aussi que des opportunités de croissance à long terme soient présentes. Reste que ce n’est pas parce qu’une société pourrait être rachetée que son titre mérite dans tous les cas d’être acquis.

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