Les réassureurs dopés par le bond des primes

The logo of German reinsurance giant Munich RE is seen above the entrance of the insurance company's headquarters in Munich, southern Germany, on March 9, 2022. (Photo by Christof STACHE / AFP) (Photo by CHRISTOF STACHE/AFP via Getty Images) © AFP via Getty Images

Dans un contexte de multiplication des sinistres et de forte inflation, les réassureurs ont fortement augmenté leurs primes cette année, mais cela ne s’est pas forcément traduit par une hausse des recettes. Dans le secteur, la rentabilité est davantage une affaire de taille.

On estime que la tempête Ciarán, début novembre, a causé quelque 1,3 milliard d’euros de dommages assurés dans le nord-ouest de l’Europe. C’est la huitième fois cette année que des conditions météorologiques extrêmes entraînent des demandes d’indemnisation de plus de 1 milliard d’euros. Autrefois, il était déjà exceptionnel de dépasser ce montant quatre ou cinq fois dans l’année.
Pour les réassureurs, le changement climatique représente à la fois un risque et une opportunité – notamment celle d’augmenter fortement les primes, dans un contexte d’inflation soutenue; aux Etats-Unis, les primes pour les biens immobiliers ayant subi une catastrophe naturelle ont gonflé de 30 à 50% en 2023.
Mais hausse des primes ne veut pas forcément dire hausse des recettes. Chez Munich Re, par exemple, les revenus de l’activité de réassurance dommages ont augmenté de moins de 4% en un an sur les neuf premiers mois de 2023, à 20 milliards d’euros, notamment du fait du non-renouvellement de certains contrats. Cette sélectivité, associée à une bonne diversification (assurance directe, réassurance vie et maladie), fait de Munich Re un investissement moins risqué qu’il n’y paraît au premier abord, compte tenu de l’imprévisibilité des gros sinistres et de la sensibilité de son portefeuille de 225 milliards d’euros au sentiment boursier.

Une taille critique

Le plus grand acteur du secteur profite de sa taille, qui lui permet de couvrir des risques plus étendus et d’élaborer des modèles de risque plus sophistiqués. Or, une tarification correcte des risques est la clé d’un rendement attrayant du capital investi à long terme. Et Munich Re vise 14 à 16% dans sa stratégie Ambition 2025.
Sur les neuf premiers mois de 2023, il affiche un rendement effectif de 16,5%: une performance impressionnante au vu de la réserve de capital requise, sur la base duquel ce rendement est calculé. A la fin du troisième trimestre, le ratio Solvabilité II était de 271%, pour un objectif interne de 175 à 220%. Le groupe a donc la capacité de rétribuer ses actionnaires, auxquels il verse déjà un dividende de 12,50 euros par action pour l’année en cours, soit un rendement du dividende estimé à 3,3%. Et vu la marge de manœuvre dont dispose le groupe, ainsi que la tendance haussière de ses résultats d’exploitation, la croissance du dividende pourrait bien dépasser 5%, sa moyenne depuis 2006.

Des acteurs distincts

Après Munich Re, Swiss Re et Hannover Rück forment le trio de tête. Le troisième, petit frère du numéro un mondial, mène lui aussi une politique de risque sélective. Swiss Re, quant à lui, se distingue par une stratégie légèrement moins conservatrice qui lui a joué des tours pendant la crise financière de 2008, avec le creusement rapide des pertes sur prêts de titres. Depuis, Swiss Re gère bien mieux ces risques, mais sa nature légèrement plus aventureuse se reflète dans un ratio combiné relativement élevé (94,3% sur les neuf premiers mois de 2023) – un positionnement qui lui apporte de beaux bénéfices dans les périodes fastes, comme 2023.
Le rendement du dividende de 6,3% chez Swiss Re séduira les investisseurs peu frileux qui cherchent à maximiser leurs revenus, mais il convient de noter que ses résultats fluctuent davantage que ceux de ses concurrents allemands. En 2020, par exemple, le groupe a enregistré une perte de 878 millions d’euros. Pour autant, grâce au volant de capital élevé, le versement de dividendes n’est pas immédiatement compromis. Pour 2023, le rapport cours/bénéfice s’élève à 10. L’action Swiss Re est donc légèrement moins chère que Munich Re (ratio de 11) et Hannover Rück (ratio de près de 14).
Ces valorisations sont d’ailleurs supérieures d’environ un point à la moyenne historique, car les cours des actions ont augmenté encore plus vite que les bénéfices. L’envergure de Munich Re et sa stratégie, bien pensée et prudente, en font un favori.

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