Le pronostic émis la semaine passée, selon lequel cette décennie ne sera pas celle d’une popularité extrême et donc, de prix très élevés, des valeurs technologiques, n’a pas plu.
Nous nous attendions à ce que notre article “200 ans de cycles boursiers ne laissent guère de place au doute: l’ours arrive”, publié la semaine dernière (lire ici), suscite des réactions, mais qu’il fasse l’effet d’une bombe nous a (agréablement) surpris. Nous y affirmions que sur le très long terme, l’investisseur en actions peut espérer un rendement moyen de 8% à 9% l’an, pour autant que son portefeuille soit bien diversifié. Cette moyenne est le résultat d’une alternance entre marchés haussiers de long terme, que caractérise un rendement annuel moyen proche de 15%, et marchés baissiers, de long terme eux aussi, où les actions ne rapportent rien.
Wall Street fête en 2023 sa 14e année de hausse. Celle-ci est très supérieure à sa moyenne historique; la valorisation moyenne des entreprises technologiques, en particulier, a fortement augmenté, mais aussi et surtout, l’inflation et les relèvements de taux font leur grand retour. Le marché haussier devrait donc commencer à marquer le pas. Cette année déjà? Voyons cela ensemble.
Survalorisation
“Rien ne permet de prédire l’évolution des marchés boursiers, surtout sur le long terme”, nous a-t-il été dit; l’analyse est en d’autres termes “totalement absurde”. Notre pronostic selon lequel cette décennie ne sera pas celle d’une popularité extrême et donc, de prix très élevés, des valeurs technologiques, n’a pas davantage plu. Nous l’acceptons, bien sûr, mais nous tenons à clarifier ceci: nous n’avons évidemment rien contre les entreprises technologiques, qui sont des entités magnifiques et brillantes. Le problème n’est pas là. Le problème, c’est leur valorisation.
Voyons Apple et Microsoft, les deux méga-capitalisations du secteur. Aussi incroyable que cela puisse paraître, il y a 10 ans, ces géants de la technologie étaient valorisés à 12 et 13 fois respectivement leurs bénéfices; ou encore, à 2,5 et 3,75 fois leur chiffre d’affaires et 5,5 et 7,5 fois leur ratio valeur de l’entreprise (EV)/flux de trésorerie d’exploitation (Ebitda). Dix ans plus tard, ces rapports ont en moyenne triplé. Les ratios cours/bénéfice (C/B) sont passés à 31 et 35; les cours ont bondi de 30% approximativement ces trois à quatre derniers mois, sans ou presque que les prévisions bénéficiaires n’aient progressé. Le ratio C/B moyen d’Apple sur ces 10 dernières années est de 19,25 ; si nous l’appliquons aux prévisions moyennes des analystes, nous obtenons un cours de 114,75 dollars. Le cours actuel excède donc de quelque 60% la valorisation moyenne de la décennie écoulée. Chez Microsoft, où, compte tenu du ratio C/B de 24,2 en moyenne ces 10 dernières années, le titre ne devrait pas valoir plus de 232 dollars, la survalorisation atteint 44%.
C’est précisément là que réside la difficulté du passage d’un marché haussier à un marché baissier: les valorisations, jusque-là orientées à la hausse, diminuent de plus en plus. Il est donc tout à fait possible que les bénéfices continuent d’augmenter, alors que les cours cèdent du terrain.
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