Investir dans les vents de force 10 et plus
Le changement climatique augmente les risques de tempêtes tropicales. Alors que depuis 1950, les Etats-Unis recensent un peu moins de 15 ouragans tous les 10 ans, ils en ont déjà subi 13 depuis 2020. Rien d’étonnant donc à ce que les gouvernements investissent dans la protection des habitants et des infrastructures. Penchons-nous sur quatre entreprises actives dans ce domaine.
Conseil 1 : Advanced Drainage Systems
Advanced Drainage Systems (ticker WMS) fabrique des tuyaux, des réservoirs et des bassins destinés à stocker et à évacuer l’eau en cas d’inondation ou de précipitations excessives ; des filtres spéciaux empêchent en outre la pollution drainée par les pluies de se déverser dans les rivières, les lacs et les eaux de surface. Advanced Drainage installe ses systèmes StormTech dans les aéroports, les stades et surtout, les zones résidentielles et commerciales ; 40.000 d’entre eux fonctionnent d’ores et déjà de par le monde.
Le changement climatique contribue à la croissance du chiffre d’affaires d’autres segments d’activité encore. Au secteur agricole, par exemple, le groupe propose des dispositifs de stockage et d’irrigation, aux municipalités, des systèmes de contrôle du niveau des eaux souterraines. Un déficit de capacité freine actuellement sa croissance, mais la construction de nouvelles usines lui permettra bientôt de mieux répondre à l’intensification de la demande.
Advanced Drainage a achevé le premier trimestre de son exercice 2025 décalé sur un chiffre d’affaires de 815 millions de dollars, en hausse de 5 %. L’augmentation des prix des matériaux a fait perdre 240 points de base à sa marge d’Ebitda ajustée (flux de trésorerie d’exploitation/chiffre d’affaires), qui n’atteint dès lors plus que 33,8 %. Le processus de fabrication se veut très vertueux lui aussi, puisque le groupe a utilisé l’an dernier 250 millions de kilos de matériaux recyclés pour fabriquer ses tuyaux et dispositifs de stockage. La direction vise, pour l’exercice, une croissance d’environ 5 % du chiffre d’affaires et un Ebitda ajusté de près d’un milliard de dollars.
Conseil 2 : Aecom
Aecom (ticker ACM) conçoit les plans des dispositifs que des entreprises comme Advanced Drainage Systems fabriqueront ensuite. Cette société d’ingénierie américaine a réalisé, durant son exercice décalé clos fin septembre, un chiffre d’affaires de plus de 16 milliards de dollars. Si Trends-Tendances Bourse a choisi de la présenter l’an dernier sous sa rubrique “Le tuyau de la semaine”, c’est en raison de la croissance prévisible de son chiffre d’affaires et de sa capacité à tirer profit des politiques écologiques – les grands projets de construction se veulent en effet toujours plus pérennes. Cela fait en outre plusieurs années que la clientèle qualifie d’importante, voire de prépondérante, la protection contre les inondations et les cataclysmes naturels.
D’après le gouvernement américain, a récemment rapporté Lara Poloni, la présidente d’Aecom, le changement climatique et l’élévation du niveau des océans vont obliger acteurs publics et privés à investir 630 milliards de dollars dans les infrastructures hydriques au cours des prochaines décennies : ce montant est deux fois plus élevé que l’estimation faite il y a 10 ans. Aecom cherche à négocier de gros contrats dans ce segment ; son pipeline de contrats potentiels vient d’ailleurs de s’étoffer de 45 % en 12 mois. Selon Lara Poloni toujours, Aecom est bien partie pour multiplier son chiffre d’affaires par deux dans le secteur de l’eau (qui représente un quart de ses revenus) dans les cinq ans. Mais la société se développe de façon soutenue sur d’autres marchés également.
La croissance escomptée de son chiffre d’affaires s’élève pour 2024 à 8-10 %. Sa marge d’Ebitda ajustée étant en passe de tourner autour de 15,6 %, en hausse de près de 1 %, la croissance des bénéfices sera même légèrement plus vigoureuse. Le bénéfice ajusté par action devrait augmenter de plus de 20 %, pour atteindre 4,50 dollars. Malgré cette progression soutenue et une marge d’Ebitda bien supérieure à la moyenne du secteur (13,3 %), la valorisation est à la traîne : le rapport capitalisation boursière/Ebitda est de 12,9, contre plus de 18 pour le secteur. Ce qui, combiné à un dividende en hausse d’un bon 20 % en quelques années (rendement de 0,8 %), explique tout le bien que nous pensons d’Aecom.
Conseil 3 : Crawford & Co
On aura beau s’en protéger autant que l’on pourra, les cataclysmes naturels continueront à causer des dégâts, parfois terribles. D’après l’entreprise d’assurance et de conseil Aon, ces catastrophes ont coûté l’an dernier 390 milliards de dollars, dont un quart approximativement a été remboursé par les assureurs.
Crawford & Co (ticker CRD.B) est une entreprise d’expertise. Plus de la moitié de son chiffre d’affaires provient de l’évaluation de sinistres importants et complexes, donnant lieu à des remboursements de plus de 400.000 dollars en moyenne. Dans ce segment spécialisé, le groupe se distingue par l’importance de ses effectifs (plus de 10.000 personnes) et par l’éventail de ses domaines d’expertise. Sur le court terme, les revenus de ces activités peuvent fluctuer fortement – aux Etats-Unis, par exemple, où les tempêtes ont été rares au premier semestre, les sinistres garantis ont chuté de 21 %, à 37 milliards de dollars.
Le chiffre d’affaires total de l’activité Cataclysmes naturels de Crawford a lui aussi cédé 21 %, à 87 millions de dollars. Bien qu’il ait atteint 227 millions de dollars (+6 %), le reste du chiffre d’affaires, généré par les expertises automobiles et résidentielles plus traditionnelles, n’a pu compenser ce recul. Mais dans la branche Cataclysmes naturels, le second semestre est (malheureusement) le théâtre d’un rattrapage fulgurant.
Le bénéfice par action pourrait par conséquent tourner, comme l’an dernier, autour de 0,95 dollar, à quoi correspondrait un ratio cours/bénéfice de plus de 12 – une valorisation attrayante, pour une entreprise qui occupe une position enviable sur un marché en croissance et dont le rendement en dividende est correct (2,4 %). Les investisseurs se souviendront toutefois que les résultats et le cours fluctuent en fonction de l’intensité des cataclysmes dans le monde.
Conseil 4 : Generac
Après une tempête majeure, la première chose dont on parle est bien sûr le nombre de victimes. Viennent ensuite une ébauche d’estimation des dégâts et du temps pendant lequel les ménages resteront privés d’électricité ; une fois celle-ci rétablie, la vie pourra tout doucement reprendre son cours.
C’est dans cet entre-deux qu’interviennent les produits de Generac (ticker GNRC). L’entreprise fabrique des générateurs de toutes tailles, qui vont des petits chargeurs pour tondeuse à gazon aux grands générateurs de secours destinés aux hôpitaux, pour ne citer qu’eux. Plus de la moitié de son chiffre d’affaires est issue du segment résidentiel ; les commerces et l’industrie en assurent 40 autres pour cent et le solde provient de la vente d’accessoires, de pièces détachées et de services. C’est dans le segment résidentiel surtout que la demande monte en flèche. Selon Aaron Jagdfeld, le CEO du groupe, de nombreux produits ont été épuisés entre le passage d’Helene et celui de Milton.
Generac ouvrira prochainement, à proximité de Milwaukee, une usine qui emploiera 350 à 400 personnes. La croissance du chiffre d’affaires du groupe devrait à partir de là passer à 10 %, contre 5 % environ cette année. Le flux de trésorerie disponible (500 millions de dollars approximativement en 2024) devrait évoluer au même rythme. L’action s’est appréciée de 8 % depuis la fin août (le début de la saison des tempêtes), mais son cours est inférieur de près de 70 % au sommet atteint en 2021. Il faut dire qu’en 2022, au sortir de la pandémie, Generac a eu à subir un déstockage massif dans la chaîne, à quoi est venue s’ajouter la faillite d’un client important. Depuis, elle a assaini ses finances, et l’ouverture de la nouvelle usine marquera son entrée dans une nouvelle ère de croissance. Avec une dette nette de 1 milliard de dollars fin 2024 (1,3 fois seulement l’Ebitda), elle a de quoi renforcer sa position, y compris par le biais d’acquisitions.
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