Bourse nippone : fin de la remontée

Kazuo Ueda, l’actuel gouverneur de la Banque du Japon. © AFP via Getty Images
Danny Reweghs
Danny Reweghs Journaliste

A présent que les salaires augmentent, la Banque centrale japonaise veut normaliser sa politique monétaire. Elle remonte donc ses taux d’intérêt, permettant au yen de considérablement s’apprécier pour la première fois depuis 10 ans.

Le Japon ne manque pas de singularité. Même en matière de politique monétaire, le pays du Soleil levant vit isolé du reste du monde. Entre la Banque du Japon (BoJ), sa banque centrale, et ses pendantes occidentales, l’histoire s’inscrit dans des sens radicalement différents.

Les baisses de taux d’intérêt pratiquées par les banques centrales européenne et américaine enflamment les marchés financiers européens et américains depuis une quinzaine de jours. Alors qu’au Japon, au contraire, des relèvements de taux plongent les marchés financiers dans la tourmente. Pendant les 10 années durant lesquelles il a gouverné la BoJ, Haruhiko Kuroda a obstinément refusé de prendre une décision allant dans ce sens. Y compris en 2022-2023, alors que l’inflation s’envolait. A présent que les salaires augmentent, Kazuo Ueda, l’actuel gouverneur de la BoJ, veut normaliser la politique monétaire. Il remonte donc les taux d’intérêt, permettant au yen de considérablement s’apprécier pour la première fois depuis 10 ans. Entre 2012 et le début de cette année en effet, la devise avait perdu la moitié de sa valeur face au dollar américain (elle était tombée de 80 à 160 yens pour un dollar). La poussée inflationniste de 2022 avait été particulièrement pénible pour elle (de 120 à 160 yens). Mais depuis le début de cet été, donc, les Japonais ne paient plus que 140 yens pour un dollar.

Sommet franchi

Au printemps, le Nikkei, le principal indice de la Bourse de Tokyo, avait atteint un nouveau sommet historique. Rien d’extraordinaire, penserez-vous, à ceci près que son dernier record remontait à près de 35 ans. C’est en 1989 que l’indice avait culminé à 38.957 points, une barre qu’il a donc dû attendre février 2024 pour pouvoir franchir. Les années passées ont été fastes pour la Bourse japonaise, que soutenaient des taux d’intérêt ultrabas et une monnaie atone. Ce qui a évidemment profité aux multinationales du pays également. L’absence totale de protection contre l’inflation offerte par les obligations japonaises à 10 ans a été déterminante elle aussi : les taux d’intérêt réels ayant plongé profondément dans le rouge, les investisseurs avaient plutôt tendance à miser sur les actions pour tenter de contrer la flambée des étiquettes.

Avec la hausse du yen, tout change. L’indice Nikkei est de 15 % environ inférieur au sommet (plus de 42.000 points) atteint début juillet ; début août, c’est d’un quart qu’il a plongé par rapport à ce record. L’ascension nous semble par conséquent terminée, pour une durée indéterminée. Les investisseurs qui ont misé sur le Japon en acquérant des ETF feraient bien de prendre leurs bénéfices. Alors que, très longtemps, les actions japonaises ont été préférables au yen, la situation nous paraît désormais totalement inversée.

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