Assureurs européens : deux nouvelles opportunités
Toutes les actions des compagnies d’assurances européennes n’ont pas progressé autant qu’Allianz récemment. Mais plusieurs groupes n’en sont pas moins intéressants. Voici deux suggestions résolument dignes d’intérêt.
L’envolée d’Allianz
Le titre Allianz s’est apprécié de 20 % en deux mois. Cette envolée fait suite à la publication des trimestriels de l’assureur allemand : le 8 août, celui-ci annonçait que son encaissement avait progressé de 8 %, pour atteindre 42,6 milliards d’euros. Son bénéfice d’exploitation (Ebit) a, lui, augmenté un peu plus lentement (de 4 %, à 3,9 milliards d’euros). En cédant 3 % – à cause, exclusivement, des colossales indemnités dues par suite de catastrophes naturelles –, à 1,9 milliard d’euros, l’activité Non-Vie a freiné la croissance. Ce qui n’a pas empêché son encaissement d’augmenter de plus de 9 %, pour s’établir à 19,3 milliards d’euros.
Rachats d’actions
Le gain de 15 %, à 1,4 milliard d’euros, du bénéfice d’exploitation de la branche Vie, a largement compensé le tassement des activités Non-Vie. Dans le segment de la gestion d’actifs, la croissance, portée par la conjoncture boursière, entre autres, s’est établie à 6 %, à 742 millions d’euros. Au bilan, le bénéfice net a bondi de 7 %, pour atteindre 2,7 milliards d’euros.
Mais les investisseurs sont surtout attentifs aux capitaux générés par l’exploitation, lesquels ont également grossi de 7 %, pour s’établir à quatre milliards d’euros. Ses capitaux propres permettent au groupe de faire passer très aisément à 1,5 milliard d’euros (+500 millions) les rachats d’actions prévus pour 2024. A 206 %, sa solvabilité est bien supérieure à l’objectif de 180 % qu’il s’est lui-même fixé dans le cadre de Solvency II.
Prendre ses bénéfices
Le titre s’est apprécié de plus de 75 % depuis la fin septembre 2023. Allianz se négocie à 12 fois environ son Ebit par action, contre 8 fois il y a 12 mois. La valorisation ne semble plus pouvoir progresser beaucoup, si bien que le potentiel de hausse est constitué du rendement en dividende (5 %) et de la croissance des bénéfices (+5-6 %, à moyen terme) .
Compte tenu de la dynamique du cours, conseiller de vendre n’est pas (encore) de mise. L’investisseur envisagera en revanche sérieusement de prendre une partie de ses bénéfices, sans pour autant quitter le secteur – le secteur européen de l’assurance a en effet beaucoup à lui offrir.
Opportunité 1 : Zurich Insurance
Les lecteurs en quête d’une source de revenus (en dividendes) prévisibles et en croissance constante peuvent par exemple envisager d’investir une partie des fonds ainsi libérés dans Zurich Insurance. Comme son nom l’indique, cette action se négocie en Bourse suisse. Dans ce pays, les dividendes sont soumis à un précompte mobilier de 35 % : il faudra donc accomplir les démarches pour éviter la double imposition. Mais les personnes prêtes à consentir cet effort pourront se positionner dans un assureur doté d’un modèle d’exploitation intéressant et très bien placé sur son marché. Zurich assure des industries très diverses, qui vont des entreprises de construction aux chaînes hôtelières et à l’industrie agroalimentaire, en passant par des studios de cinéma. La nature spécifique de ses produits lui permet souvent de réclamer des primes relativement élevées.
Au cours du premier semestre, son ratio combiné (le rapport entre les encaissements et les indemnités versées) s’élevait à 91,4 % dans le segment professionnel. S’il n’y avait pas eu les catastrophes naturelles, il aurait été inférieur de trois points de pourcentage encore. Son Ebit a progressé de 7 %, pour atteindre quatre milliards de dollars, entre janvier et juin 2024 ; simultanément, son bénéfice net bondissait de 21 %, à trois milliards de dollars. L’assureur doit ces résultats non seulement à son positionnement dans des segments particuliers du marché, mais aussi à son utilisation intelligente de la technologie. Il a investi 1,8 milliard de dollars dans la transition numérique au cours des trois dernières années – le déploiement de l’intelligence artificielle accroît la productivité des employés et améliore l’évaluation des risques.
Enfin, Zurich se distingue également par l’importance de ses fonds propres. Sa solvabilité (Solvency II) s’élevait à la mi-2024 à 232 %, alors que l’entreprise s’impose un ratio de 160 %. D’où la décision prise par la direction de distribuer les trois quarts des bénéfices sous la forme de dividendes. Un montant de 27,50 dollars par action est annoncé pour cette année (en raison de son caractère international, l’entreprise présente ses comptes en dollars) ; à cela correspond un rendement en dividende de 5,3 %, qui pourrait augmenter prochainement au même rythme que les bénéfices (+5-8 %).
Compte tenu de la spécificité de son activité et de sa large marge bénéficiaire, Zurich présente une valorisation historiquement un peu plus élevée que celle d’autres assureurs. Son ratio cours/bénéfice dépasse 14 %, mais la hausse du titre durant ces 12 derniers mois (environ 20 %) est moins marquée que chez Allianz, par exemple.
Opportunité 2 : Admiral Group
L’action du britannique Admiral Group s’est elle aussi appréciée de 20 % en 12 mois. Une grande partie de cette ascension est intervenue mi-août, juste avant la publication des résultats semestriels, quand la direction a annoncé que le nombre d’assurés avait augmenté de 12 %, à 10,5 millions de clients, en 12 mois.
Ces dernières années, Admiral s’est surtout développée sur le marché britannique de l’assurance automobile, au sein duquel elle s’est concentrée sur des segments spécifiques, comme les flottes d’entreprises et les tout jeunes conducteurs. L’assureur s’est d’ailleurs très intelligemment associé au plus grand organisateur de cours théoriques et pratiques destinés à un public adolescent (de 11 à 17 ans). Avec une part de marché de près de 11 %, il domine le segment automobile britannique.
Cela fait par ailleurs quelques années que la compagnie s’ouvre à l’international et élargit sa gamme de produits. Elle propose par exemple désormais des assurances habitation et des polices couvrant les animaux domestiques. En combinant relèvements des primes et élargissement de son éventail de produits, elle a réussi à faire progresser son encaissement plus rapidement encore que son fichier de clientèle : l’encaissement a bondi de 38 %, à 2,2 milliards de livres sterling, et le bénéfice par action, de 35 %, pour atteindre 77,50 pence. La majeure partie des bénéfices refluera vers les actionnaires, puisque l’acompte sur dividende va être porté de 51 à 71 pence. Si le dividende final reste au même niveau, le rendement en dividende atteindra 5 % en 2024. Compte tenu de sa solvabilité, Admiral va pouvoir laisser le dividende augmenter à la même allure que les bénéfices (+10 à 20 %) au cours des années qui viennent.
Outre la vigoureuse croissance de ses bénéfices, le groupe se distingue par un profil de risque légèrement supérieur à la moyenne. Le marché britannique de l’automobile, dont l’assureur dépend largement, ne connaît pratiquement pas de barrières à l’entrée, et sa croissance internationale soumet Admiral à un certain nombre de risques opérationnels.
Conclusion
Un abaissement de la recommandation à “conserver” s’impose dans le cas d’Allianz. Zurich Insurance et Admiral Group, aux perspectives plus encourageantes, méritent en revanche le conseil “acheter”.
Plus près de chez nous
Nul besoin d’aller très loin pour trouver de quoi remplacer Allianz : des assureurs affichent de bons résultats et des rendements en dividendes élevés, y compris dans nos contrées. A commencer par notre Ageas national, qui envisage de procéder à une nouvelle acquisition au Royaume-Uni, ce que le marché apprécie généralement peu. Mais un rendement en dividende de plus de 6,5 % reste un argument.
Les Pays-Bas offrent des rendements en dividendes bruts plus élevés encore. Nous citerons ceux d’ASR (7,2 %) et de NN Group (8 %), tout en notant qu’au sein de ce marché concurrentiel, ces deux entreprises s’orientent surtout vers la branche Vie, ce qui explique leur rythme de croissance nettement inférieur à celui de Zurich Insurance et, surtout, d’Admiral Group.
Hélène et Milton
La Floride a beaucoup souffert du passage des ouragans Hélène, puis Milton. Ce dernier a provoqué une panique particulièrement intense, car il se disait qu’il pourrait être l’ouragan le plus ravageur que la région ait jamais connu en un siècle. Les assureurs estimaient que ce phénomène de catégorie 5 (la plus élevée) allait provoquer pour 150 à 200 milliards de dollars de dégâts. Heureusement, il a perdu en intensité juste avant d’atteindre la côte et si dégâts il y a, on est loin du désastre annoncé – les analystes parlent désormais de 50 à 70 milliards de dollars, comme lors du passage de Ian, qui avait touché la Floride en 2022.
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