Le moins que l’on puisse dire c’est que les négociations express entre les deux patrons de l’IA auront été fructueuses.
Dans un ballet diplomatique mêlant technologie et géopolitique, Jensen Huang (société) et Sam Altman (société) ont scellé lundi un partenariat de 100 milliards de dollars qui redéfinit les équilibres de l’intelligence artificielle mondiale. L’accord marque en effet un tournant pour l’industrie technologique, où capital et influence se concentrent désormais entre deux acteurs clés de la révolution de l’IA. Huang a qualifié l’opération de « monumentale » sur CNBC. « Attendez-vous à beaucoup de notre part dans les mois à venir », a de son côté confié Altman toujours à CNBC.
Un timing parfait orchestré depuis Londres
Une alliance stratégique négociée semble-t-il dans l’urgence, entre les couloirs de Windsor et les bureaux de Silicon Valley. L’accord trouve ses racines dans une rencontre fortuite lors de la visite d’État de Donald Trump au Royaume-Uni, une semaine avant l’annonce officielle. Les deux PDG, présents au château de Windsor, ont profité de cette proximité géographique pour amorcer des discussions qui se révéleront décisives. “Le fait que Huang et Altman fassent partie de la visite d’État du président Trump au Royaume-Uni a été utile”, confirment des sources proches du dossier à CNBC.
Les négociations se sont intensifiées dans les jours suivants, mêlant réunions virtuelles, appels nocturnes et face-à-face dans trois capitales : Londres, San Francisco et Washington. Particularité notable : aucune banque d’investissement n’a été impliquée dans ces tractations, les deux dirigeants ayant préféré négocier directement.
Une architecture financière innovante
Le financement s’étalera sur dix tranches de 10 milliards de dollars chacune, progressivement débloquées à mesure du déploiement des gigawatts de puissance de calcul. La première tranche, valorisée à 500 milliards de dollars pour OpenAI, devrait être bouclée “dans le mois“.
Cette structure évite une dilution massive du capital d’OpenAI, chaque tranche successive étant valorisée au prix du marché au moment de son déploiement. Une approche qui témoigne de la confiance mutuelle entre les deux entreprises, mais aussi de l’explosion attendue des valorisations dans le secteur.
Et si Nvidia devient le partenaire privilégié d’OpenAI, l’accord n’est pas exclusif : la start-up souhaite conserver des relations avec d’autres géants du cloud et fabricants de puces pour ne pas dépendre d’un seul acteur.
Microsoft pris de court
L’accord révèle également les tensions croissantes dans l’écosystème d’OpenAI. Microsoft, principal actionnaire et fournisseur cloud historique de la startup, n’aurait été informé qu’une journée avant la signature. Une communication tardive qui illustre la volonté d’émancipation d’OpenAI vis-à-vis de son partenaire de Redmond. Plus tôt cette année, Microsoft a perdu son statut de fournisseur exclusif de capacité de calcul pour OpenAI.
Cette prise de distance s’inscrit dans une stratégie plus large : OpenAI envisage de devenir un fournisseur cloud de première main, sur un marché dominé par Amazon Web Services, suivi par Azure, Google et Oracle. “Une offre cloud commerciale pourrait émerger dans un ou deux ans”, confient des dirigeants d’OpenAI.
On rappelle aussi, qu’en 2024, Nvidia avait déjà pris une participation lors d’un tour de table de 6,6 milliards de dollars, valorisant OpenAI à 157 milliards.
L’ombre du projet Stargate
Ce partenariat s’inscrit dans l’ambitieux projet Stargate, une initiative de 500 milliards de dollars sur quatre ans pour développer l’infrastructure IA américaine, annoncé en janvier dernier par Donald Trump aux côtés d’Altman, du PDG de SoftBank Masayoshi Son et du président d’Oracle Larry Ellison. Parallèlement aux négociations avec Nvidia, l’équipe infrastructure d’OpenAI rencontrait Son à Tokyo pour discuter financement et support manufacturier. Cette diplomatie parallèle illustre l’ampleur des ambitions d’Altman et la complexité de l’écosystème financier désormais nécessaire aux projets d’IA de pointe
L’accord intervient moins de deux semaines après la révélation d’un contrat de 300 milliards de dollars entre OpenAI et Oracle, étalé sur cinq ans à partir de 2027. Une accumulation d’engagements colossaux qui interroge tout de même sur la capacité réelle d’OpenAI à honorer de tels montants.
Un accord circulaire parfaitement orchestré
“Nvidia investit 100 milliards dans OpenAI, qui retourne ensuite donner cet argent à Nvidia”, analyse Bryn Talkington, associé gérant chez Requisite Capital Management. Il note ici la mécanique particulièrement astucieuse de ce mégadeal.
Nvidia investit 100 milliards dans OpenAI, mais cette somme reviendra largement dans ses propres caisses. En effet, OpenAI utilisera cet argent pour louer les processeurs GPU de Nvidia et construire ses infrastructures avec la technologie du géant des semi-conducteurs.
Pour Jensen Huang, c’est un coup de maître : Nvidia prend une participation dans l’entreprise d’IA la plus prometteuse au monde, récupère son investissement via les commandes massives d’OpenAI, et s’assure un client captif pour ses futurs produits. Un modèle où l’investisseur finance son propre client, créant une dépendance mutuelle particulièrement profitable.
Et ou Nvidia parvient à être à la fois le financeur et le principal bénéficiaire des projets les plus ambitieux du secteur.
Une relation historique consolidée
Ce mégadeal couronne une collaboration entamée en 2016, quand Huang livrait personnellement le premier superordinateur DGX de Nvidia dans les bureaux d’OpenAI, alors simple laboratoire de recherche à but non lucratif installé dans le Mission District de San Francisco. Un bâtiment qui abrite aujourd’hui xAI, la startup IA d’Elon Musk.
Près d’une décennie plus tard, les deux hommes président aux destinées des deux entreprises les plus influentes de l’IA : Nvidia, devenue l’entreprise publique la plus valorisée au monde avec 4,5 trilliards de dollars, et OpenAI, première startup planétaire évaluée à 500 milliards.
Défis logistiques et énergétiques
Le premier gigawatt de systèmes Nvidia sera déployé au second semestre 2026 sur la plateforme Vera Rubin de Nvidia. Les entreprises ont passé au crible entre 700 et 800 sites potentiels depuis janvier, critères à l’appui : disponibilité énergétique, calendriers d’autorisation et conditions de financement. L’ampleur du projet pose des défis inédits.
Pour OpenAI, l’enjeu dépasse la simple puissance de calcul : “Il y a trois choses qu’OpenAI doit bien faire”, résume Altman. “Faire de la grande recherche en IA, créer des produits que les gens veulent utiliser, et résoudre ce défi d’infrastructure sans précédent.”
Et c’est vrai qu’avec 10 gigawatts prévus, l’infrastructure consommera autant d’électricité qu’une grande métropole, soulevant des questions sur l’approvisionnement énergétique et l’impact environnemental de cette course à l’armement computationnel.