Les 10 risques qui pèsent sur la bourse cet été

Investir en été, image d’illustration. © Getty Images
Charly Pohu

Trump, euro, dollar, droits de douane, plan de relance allemand, économie chinoise… il y a autant de risques qui continuent à peser sur les marchés, même si c’est l’été et que les investisseurs sont en congé. ODDO BHF fait le point ce qu’il faut garder en tête.

Nous y sommes ; la période creuse de l’été, entre le 21 juillet et le 15 août, où de nombreuses personnes prennent leurs congés et où on peut avoir l’impression que le temps ralentit. Or, la bourse ne prend pas de vacances.

Au contraire, les marchés continuent et les risques ne sont pas moindres. Ils peuvent donc, d’autant plus, être un piège, car les investisseurs peuvent être moins aux aguets en temps de torpeur estivale.

L’été peut d’ailleurs être riche en coups de stress sur les marchés, comme l’a montré le mois d’août de l’année passée. Les marchés ont soudain commencé à chuter fortement, après une résurgence des craintes de récession aux États-Unis et un différentiel des taux américains et japonais, qui a fait s’écrouler une pyramide de carry-trades. Ou en août 2022, un discours stricte de Jerome Powell a aussi fait tomber les cours.

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Les dix risques de l’été 2025

Dans une note, ODDO BHF Asset Management pointe les dix risques qui pourraient hanter la bourse et les investisseurs cet été. Voici ce à quoi il faut faire attention.

  • Droits de douane américains

Même si de gros accords viennent de tomber récemment, comme avec le Japon ou l’Europe, d’autres restent à parapher. Et la date d’entrée en vigueur des taxes plus élevées approche à très grands pas : c’est le premier août. Ou le 12, pour la Chine (mais les deux pays négocient pour reporter la date). “Qui sera le prochain à être taxé ? Et à quel niveau ? Personne ne le sait. La seule certitude, c’est que l’incertitude persiste, comme en témoignent les effets d’annonce contradictoires, et l’impact sur l’économie est sans doute loin d’être totalement absorbé”, peut-on lire.

  • Résultats

La saison des résultats bat son plein, et c’est particulièrement le cas à la bourse de Bruxelles cette semaine. La publication des chiffres trimestriels (ou semestriels, c’est selon) est toujours l’occasion de prendre la température des entreprises. Le focus sera donc ici mis sur lesdits droits de douane, pour jauger s’il y a déjà eu un impact sur les entreprises qui exportent aux États-Unis et/ou entreprises américaines qui importent. De ces droits de douane élevés découle aussi un euro fort et un dollar faible, qui peut aussi peser sur les entreprises européennes.

“L’Europe mérite une attention toute particulière. Le consensus anticipe un recul de 2% des bénéfices par action (BPA) au deuxième trimestre, un plus bas depuis cinq trimestres, sous l’effet de chiffres d’affaires plus faibles et d’un euro fort”, prévient ODDO BHF. Il faudrait donc faire attention à deux choses : observer l’impact sur les secteurs les plus exposés aux Etats-Unis (comme les services aux consommateurs, la pharmaceutique, les médias, les logiciels, la construction) et suivre les révisions des prévisions de bénéfices pour 2025 – à la baisse, notamment. Les experts s’attendent d’ailleurs à une baisse des bénéfices en 2025, là où le consensus table encore sur +2%. Ce qui “pourrait bien mettre un coup d’arrêt à l’appétit des investisseurs pour la zone Europe.”

  • Chiffres macro-économiques américains

Autre jauge pour voir l’impact des droits de douane, notamment aux États-Unis : les données macro-économiques. “La résilience de l’économie américaine surprend. L’indice de surprises économiques de Citi montre que les données officielles, qui mesurent l’activité passée, sont meilleures que prévues. En revanche, les indicateurs avancés signalent une détérioration continue de l’activité économique. Les statistiques publiées ces prochaines semaines pourraient contribuer à réduire cet écart”, selon la note. Il y a ainsi notamment l’évolution de l’inflation (qui tombe entre le 10 et le 15 du mois aux États-Unis) qui est à suivre. Une éventuelle hausse, à cause des droits de douane qui devraient être répercutés sur les consommateurs, pourrait redistribuer les cartes pour la Fed et faire reculer les prévisions de baisses des taux d’intérêt.

  • Obligations US et Jerome Powell

Autre saga trumpienne de l’été : le président américain va-t-il virer le président de la Banque centrale (Fed), Jerome Powell ? Ce serait un signal très grave, mettant en question l’indépendance de l’institution monétaire, arbitre de la stabilité des prix et donc aussi des finances publiques. La réforme fiscale de Trump vient en tout cas de passer et elle devrait fortement creuser le déficit du budget du gouvernement. Le plafond de la dette a aussi été relevé, ce qui veut dire que Washington va davantage s’endetter et revenir récolter de l’argent sur les marchés financiers : “D’importants volumes d’émissions à court terme pourraient ainsi inonder les marchés dans les semaines à venir.”

Bref, différents vents risquent ainsi de souffler sur le marché obligataire américain. Inflation et taux d’intérêt, endettement public incontrôlé et craintes du marché à ce sujet, baisse de confiance des investisseurs dans les bons du trésor qui étaient auparavant une valeur refuge et, le cas échéant, ébranlement de l’indépendance de la Fed… Tout cela aurait un effet haussier sur les taux et baissier sur les prix des obligations.

  • Plan de relance allemand

Il est un des moteurs du rallye boursier européen depuis le début de l’année : le plan de relance allemand, qui prévoit des investissements massifs dans l’infrastructure et la défense. “Les investisseurs doivent suivre de près la mise en œuvre des mesures de relance, le discours des entreprises exposées aux grands plans d’infrastructure et de défense, et les actes concrets des responsables politiques”, peut-on lire, et : “Toute déception sur ce front raviverait toutefois le risque d’une Europe une nouvelle fois décevante.”

  • Les portefeuilles

Un autre risque, plus technique cette fois, est le positionnement des investisseurs. Selon les experts, les investisseurs ont une position neutre sur les actions. “Cela signifie que les marchés restent vulnérables à tout catalyseur négatif.” Ils voient ainsi le fait que les marchés soient à des sommets, et qu’il n’y a pas encore eu de correction dans ce contexte de guerre des droits de douane (à part celle de début avril, mais les cours ont vite retrouvé leur niveau après), comme un risque de chutes en cas de signaux négatifs. La concentration des flux d’investissements en bourse vers les Sept Magnifiques et l’IA américaine, ainsi que les semi-conducteurs, pourraient exacerber ce risque.

  • L’IA et la pluie des milliards

Concernant la Big Tech et l’IA justement, la saison des résultats pourrait être un stress test pour leurs plans d’investissements massifs dans cette nouvelle technologie. Les investisseurs devraient suivre les commentaires des dirigeants sur ces dépenses d’investissement (investissements déjà effectués sur les enveloppes annoncées en début d’année). Le risque : si les entreprises investissent moins que ce qu’elles avaient initialement prévu, ce serait un signal négatif. Elles risquent de se faire dépasser par la concurrence. L’autre risque : les coûts et bénéfices de l’IA, dans les chiffres du trimestre passé. Est-ce que les gains de productivité et/ou la monétisation suivent les projections ?

  • Pétrole

“Un déclencheur potentiel de turbulences estivales serait une forte hausse des prix du pétrole provoquée par un choc géopolitique. Même si le risque immédiat d’un choc majeur semble écarté, il demeure une menace pour les marchés”, écrivent les analystes. Le prix du baril est déjà passé par tous ses états cette année. D’abord, il a lourdement chuté à cause des droits de douane (qui risquent de freiner l’activité économique, et donc la demande d’or noir) et d’une hausse de la production de l’OPEP+. Ensuite, il est reparti en flèche après le conflit entre Israël et l’Iran.

  • Euro vs dollar

Comme déjà mentionné plus haut, l’euro est en hausse par rapport au dollar. Au-delà de l’impact du taux de change sur les exportateurs européens, les importations deviennent aussi plus chères pour les Américains, ce qui représente une pression sur les prix… ce qui nous ramène à l’inflation. Et à plus long terme, les experts estiment que “le marché baissier ne fait que commencer pour le dollar.”

  • Chine

Pour l’économie chinoise, qui continue de croître pour l’instant, les experts s’attendent à un ralentissement progressif de la demande intérieur. Le gouvernement devrait donc dégainer des mesures de soutien pour relancer l’économie. Dans l’immobilier, enfant malade de l’économie chinoise depuis l’effondrement d’Evergrande, il y a également des risques. “Un nouveau repli du secteur nuirait fortement à la croissance, et jetterait le doute sur la capacité des autorités chinoises à redresser son marché immobilier. À ce titre, l’absence de mesures de soutien claires au secteur immobilier pourrait peser sur les actions chinoises”, indique la note.

Rester prêt à agir

Bref, il y a donc de nombreux risquent qui pèsent sur les marchés… même si les investisseurs pensent moins à leurs placements durant les mois de l’été. “Aucun de ces éléments ne déclenchera sans doute à lui seul une correction majeure, mais la combinaison d’un affaiblissement des données économiques, et de surprises politiques, économiques, ou commerciales pourrait amplifier la réaction des marchés. L’investisseur avisé profitera donc de la trêve estivale tout en se tenant prêt à agir rapidement. Car bien souvent, le calme de l’été est celui qui précède la tempête”, conclut ODDO BHF.

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