La valse des milliards chez D’Ieteren Group : le petit investisseur n’en tire pas forcément profit
Pour financer l’accord entre les actionnaires familiaux, D’Ieteren Group doit mettre 4 milliards d’euros sur la table sous la forme d’un superdividende. Le petit investisseur n’en tire pas nécessairement profit.
Il n’est pas courant qu’une entreprise belge cotée en bourse annonce la distribution d’environ un tiers de sa valeur boursière sous forme de superdividende. D’Ieteren Group versera un dividende de 74 euros par action à ses actionnaires au cours du quatrième trimestre. De cette manière, 4 milliards d’euros sortiront de la holding familiale. Le petit investisseur ne profite pas nécessairement de cette distribution, car une retenue à la source de 30 % s’applique, ce qui représente un coût de 22,2 euros par action. En outre, cette distribution augmente le niveau d’endettement de la holding, laissant moins de ressources pour investir dans une nouvelle participation. La position de trésorerie nette de près d’un milliard d’euros se transforme en une dette nette d’environ un milliard d’euros. Cela réduit la capacité de réaliser de nouveaux deals, tels que les investissements réussis dans TVH et PHE.
Cette distribution de milliards s’inscrit dans une réorganisation profonde de la structure actionnariale familiale. D’Ieteren parle d’une opération “qui n’arrive qu’une fois par génération” et qui bétonne la structure actionnariale pour des décennies. Concrètement, Nicolas D’Ieteren, qui détient déjà 33,4 % de la holding, rachète une participation de 16,7 % à son cousin Olivier Périer. Nicolas D’Ieteren détient ainsi une participation majoritaire de 50,1 % dans D’Ieteren Group. La participation d’Olivier Périer chute à 10,6 %, avec l’intention de vendre progressivement cette participation au cours des cinq prochaines années. Le free float (ou flottant) en bourse reste inchangé à 38,1 %.
Belron, une vache à lait
Nicolas D’Ieteren paie à son cousin un prix d’acquisition de 223,75 euros par action, soit un total d’environ 2 milliards d’euros. Pour financer cette transaction, Nicolas D’Ieteren peut faire appel au superdividende, qui lui rapportera, au prorata de sa participation dans la holding, 1,3 milliard d’euros. Pour D’Ieteren Holding, la distribution de dividendes est un coup dur. Le coût de 4 milliards d’euros est financé par la trésorerie d’environ 800 millions d’euros, un emprunt de 1 milliard d’euros et 2,2 milliards d’euros de dividendes prélevés auprès de la filiale Belron. Le réparateur de vitrages automobiles doit emprunter 3,8 milliards d’euros supplémentaires pour verser ce dividende à D’Ieteren Holding et aux autres actionnaires de Belron.
Au final, c’est Belron qui finance en grande partie l’accord entre les actionnaires en s’endettant davantage. Le ratio d’endettement de Belron s’élève à 5,5 fois le cash-flow opérationnel. C’est élevé, mais grâce à la forte génération de flux de trésorerie disponible (free cash-flow (FCF)), ce ratio devrait rapidement diminuer. Depuis 2017, D’Ieteren Group utilise Belron comme une vache à lait. Dès que le ratio d’endettement tombe en dessous de 3 fois le cash-flow opérationnel, Belron contracte de nouvelles dettes pour financer un flux important de dividendes vers les actionnaires. Un procédé qui est répété ici, mais de manière exponentielle.
De bons résultats
Dans l’ombre de cette distribution de milliards, l’entreprise a également publié ses résultats semestriels conformes aux attentes. Le bénéfice ajusté du groupe avant impôts a augmenté de 6,4 %, atteignant 585 millions d’euros. Le bénéfice de Belron a légèrement diminué en raison d’une surcapacité limitée aux États-Unis, qui a pesé sur la marge bénéficiaire. Cette marge devrait se redresser d’ici 2025 avec une croissance continue des revenus. Les autres filiales ont également bien performé. Les prévisions pour cette année ont été confirmées, avec une croissance des bénéfices prévue entre 5 et 9 %.
Conclusion:
Pour financer l’accord entre les actionnaires familiaux, D’Ieteren Group doit mettre 4 milliards d’euros sur la table sous forme de superdividende. Le petit investisseur n’en tire pas nécessairement profit, car une retenue à la source de 30 % s’applique et la holding dispose de moins de ressources pour de nouvelles acquisitions. Les résultats sont conformes aux attentes. L’évaluation reste raisonnable avec un ratio cours/bénéfice de 15 pour un groupe qui peut compter sur une croissance régulière des bénéfices. Nous maintenons la recommandation d’achat.
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