Benoît van den Hove: “Le marché à IPO devait être positif en 2025” 

Benoît van den Hove (CEO d’Euronext Brussels) © BELGAIMAGE
Olivier Mouton
Olivier Mouton Chef news

Le CEO de la bourse de Bruxelles, désormais intégrée avec sept pays européens, se réjouit d’une progression de 15% en 2024 et se prépare à l’arrivée d’I-Care ou d’EnergyVision. “L’engouement des jeunes pour l’investissement est formidable”, se félicite-t-il. 

Benoît van den Hove est CEO d’Euronext Brussels, la place belge devenue une des pièces d’une bourse regroupant sept entités nationales. Depuis le 1er juillet 2023, il accompagne le développement de cet embryon de bourse paneuropéenne. En ce début d’année, il évoque la santé de l’institution en ce début 2025. 

Comment s’est comportée la bourse de Bruxelles en 2024? 

L’année 2024 s’est terminée sur une très belle performance de l’indice Bel 20 avec une progression de quelque 15%, portée par les valeurs qui font la beauté de la bourse de Bruxelles. On a le secteur biopharma avec UCB qui a fait plus de 140%, Argenx qui continue à montrer sa force et sa puissance, sans oublier l’action Lotus qui reste le chouchou des Belges. 

Mais au fond, parle-t-on encore de la “bourse de Bruxelles”? 

C’est une bonne question. Dans le contexte actuel, au vu du programme d’Ursula von der Leyen pour la mandature de la Commission européenne, on se dit qu’il est vital de travailler à la compétitivité de l’économie européenne et une des clés pour y arriver, c’est la création d’une union des capitaux. Tout le monde se souvient du rapport de Mario Draghi affirmant qu’il faut investir 800 milliards d’euros, mais on oublie souvent son appel à cette évolution importante. C’est que nous essayons de faire avec Euronext: ce sont sept bourses complètement connectées avec une seule plateforme informatique. C’est une évolution majeure. 

Le marché des capitaux est donc en marche? 

Exactement et le fait d’avoir créé cette taille nous permet d’avoir un impact fort. Une action sur quatre échangée en Europe sur une plateforme l’est sur Euronext. Nous faisons deux fois la taille de la bourse de Londres en termes de capitalisation boursière des sociétés cotées et trois fois la taille de la bourse allemande. Mais la magie d’Euronext, c’est que nous sommes complètement intégrés, mais avec un modèle fédéral et une bourse dans chacun des pays membres. Les volumes échangés à la bourse de Bruxelles sont restés très corrects pour 2024. La seule chose qui a manqué, ce sont opérations de transactions, que ce soient de nouvelels introductions ou des levées de fonds. 

Ce sera pour 2025, non? 

Ce sera pour 2025, oui. Galapagos a annoncé son intention de se diviser en deux, ce qui générera une nouvelle cotation. Ces dernières années, on constate d’ailleurs que pas mal de création de valeurs se fait par des spin-offs en Belgique: il y a eu Solvay – Syensqo, CFE – Deme… En France, un Vivendi s’est divisé en trois. 

L’idée, c’est de profiter de ces investissements pour créer des entités qui innovent? 

Exactement. Il s’agit aussi de créer des structures plus cohérentes parce qu’au fur et à mesure du temps se créent des conglomérats avec plusieurs divisions, ce qui ne donne pas nécessairement une bonne visibilité pour l’investisseur et donc la meilleure valorisation. Ces évolutions créent des entités très distinctes qui auront une valorisation plus juste. 

L’année prochaine, il y aura également l’entrée en bourse de I-Care et d’EnergyVision, c’est une bonne nouvelle, non? 

Ce sont deux très belles sociétés technologiques belges qui envisagent une cotation en bourse. Quand on regarde les IPO qui ont eu lieu en 2024, on a eu de très bons résultats: elles ont eu un after market positif. C’est ce dont on a besoin pour attirer les opérations suivantes. Le marché à IPO devrait être positif en 2025. 

L’investissement redevient à la mode chez les jeunes, est-ce quelque chose que vous percevez? 

Cela m’enthousiasme très fort ces derniers temps. En Belgique, on voit les plateformes d’investissements se multiplier, que ce soit chez Belfius, KBC ou de nouveaux arrivants comme Saxo. Une guerre des prix commence à se créer. Il y a une volonté d’attirer les nouveaux arrivants et de profiter de cet engouement. On le voit singulièrement pour les ETF, ces trackers qui suivent les indices géographiques ou sectoriels. 

La presse flamande a d’ailleurs consacré comme expression de l’année 2024 “investir dans son hamac”… 

Exactement. Ce que ce concept illustre, c’est que l’on investit chaque mois un petit montant dans un tracker qui suit un indice mondial et on devient riche en ne faisant rien, en restant dans son hamac. 

Mais l’engouement des jeunes est-il mesurable? 

On voit pas mal de “finfluenceurs” pousser en faveur de cette gestion passive. J’étais invité il y a quelques mois dans un club d’étudiants et je voyais vraiment cet intérêt pour l’investissement dans l’économie réelle – au-delà de l’intérêt des jeunes pour les cryptos… Oui, les jeunes sont à bord, grâce à des solutions qui rendent cela accessible avec des mises de 10 ou 15 euros. 

La bourse est-elle une réponse aux défis de notre temps, qui nécessitent de gros investissements? 

La promotion de l’investissement diversifié sur le long terme peut être une solution pour générer des richesses. Quand des jeunes me parlent des cryptos, je leur demande toujours ce à quoi ils veulent que leur argent serve. S’agit-il d’entrer dans une démarche spéculative dont on ne sait pas très bien les tenais ou de financer les transitions économique et énergétique dont on a besoin? Cette conscientisation est vraiment très importante. On voit qu’une société comme Elia a annoncé une très grosse levée de fonds pour cette année… 

Elia, qui doit construire les réseaux énergétiques du futur… 

Exactement, c’est très concret, très proche de nous et c’est avec l’argent de chacun que ces projets pourront être financés. 

Y a-t-il un récit à construire parce que certaines entreprises souffrent avec leur cotation en bourse? 

On voit toute l’importance des investisseurs particuliers. Chez Euronext, nous insistons beaucoup sur la nécessité de garder cet ancrage. On a toujours parler du “dentiste belge”, un particulier qui investit directement dans une entreprise. Il faut continuer à garder ce lien, aller dans des foires pour rencontrer les investisseurs. Il faut en effet raconter une histoire qui fait du sens. Lors de notre événement de nouvelle année, nous avons précisément mené une réflexion sur l’avenir de l’industrie en Europe. C’est un enjeu majeur. 

Quelle est la stratégie d’avenir d’Euronext? 

Nous l’avons développée voici quelques semaines. L’idée consiste à grandir de façon organique sur un certain nombre de sujets et un de ceux sur lesquels nous souhaitons avancer, ce sont les CSD, les dépositaires, c’est-à-dire là où les actions sont détenues, pour offre de nouveau services aux émetteurs, mais aussi aux banques qui utilisent nos services. 

Qu’attendez-vous du monde politique en 2025? 

J’attends du politique qu’il soutienne l’entrepreneuriat, les personnes qui veulent créer de la richesse et de l’emploi pour la Belgique, mais également les investisseurs, ceux qui mettent de l’argent sur la table et qui prennent des risques. En 2024, le bon d’Etat a, en réalité, subsidié un investissement sans risque. Ce qui a beaucoup plus de sens, c’est de soutenir ceux qui risquent de tout perdre. Dans ce cadre, nous plaidons pour la suppression de la TOB (taxe sur les opérations boursières) pour les PME qui sont cotées en bourse. 

Le retour de Donald Trump à la Maison Blanche risque-t-il d’accentuer l’écart entre les marchés américains et européens? 

Je n’ai pas de boule de cristal, mais on a pu percevoir sur Euronext Brussels qu’un certain nombre de champions, quand on les choisit bien, peuvent réaliser une très belle performance. On parle souvent des “Magnificent Seven” aux Etats-Unis, mais si on enlève ces sept valeurs, la performance américaine n’est pas si terrible que cela par rapport à la performance européenne. 

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