Après une lettre courroucée des actionnaires, Tesla a annoncé une date d’assemblée générale. Mais elle est fortement en retard sur les délais légaux. La saga ne fait qu’ajouter aux inquiétudes des investisseurs.
Tesla n’est pas une entreprise comme les autres, dit-on souvent. Elle vend des voitures mais compte, et est valorisée, comme une Big Tech. Son CEO est l’homme le plus riche du monde et fut même une sorte de ministre, avant sa dispute avec le président Trump… et fait chuter ou partir en flèche le cours de l’entreprise avec ses frasques.
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Elle n’est pas non plus une entreprise comme les autres en ce qui concerne le respect de certaines réglementations boursières. Tesla n’avait par exemple pas encore annoncé de date pour l’assemblée générale des actionnaires, pour l’année 2025, alors que la date limite approchait.
AG
Des actionnaires courroucés lui ont donc envoyé une lettre, ce mercredi, pour que l’entreprise fixe enfin une date. Tesla a obtempéré, en annonçant ce jeudi son AG… pour le six novembre. Ce qui pose problème. Car selon la loi du Texas, où se trouve le siège social de l’entreprise, une société doit tenir une AG au moins une fois tous les 13 mois. Et la dernière était en juin 2024. L’AG de novembre est donc quatre mois en retard sur le délai légal (et il reste à voir si cela peut avoir des implications juridiques).
Les actionnaires en ont gros, en tout cas. Tesla les avait habitués à une croissance stellaire, autant des ventes (en hausse de 50% sur un an, en moyenne) qu’en bourse. Mais les ventes sont en baisse pour une première fois, sur l’année 2024, et continuent de baisser cette année (dont surtout en Europe). Le cours en bourse est très volatil et aurait été dans le rouge depuis fin 2021, s’il n’y avait pas eu la hausse due au soutien de Musk à Trump durant la campagne… mais le passage de Musk en politique a néanmoins fini par plomber le cours de nouveau. L’homme était beaucoup moins disponible pour gérer les affaires du constructeur automobile et la création d’un nouveau parti par Musk n’aide pas les perspectives en la matière.
Le fait que Tesla tergiverse autant pour annoncer une date d’AG, puis l’annonce pour si tard, ne fait que jeter de l’huile sur le feu. “Ce retard est particulièrement préoccupant compte tenu de la surveillance croissante à laquelle Tesla est soumise de la part des investisseurs”, peut-on lire dans la lettre, que CNN a pu consulter. Des élus démocrates, à la tête de fonds de pension détenant des actions de Tesla, font notamment parti des signataires.
Des experts se posent aussi des questions, à l’image du spécialiste Dan Ives, de Wedbush Securities. “Nous pensons que nous sommes à un point de basculement dans l’histoire de Tesla et que le conseil d’administration doit agir dès maintenant et fixer les règles de base que Musk devra respecter à l’avenir en ce qui concerne ses ambitions et ses actions politiques”, s’exprimait-il dans une note, avant l’annonce de la date.
Quel poids ?
Pourquoi tout ce retard ? Tesla ne l’a pas indiqué dans ses documents remis à la bourse et ne s’exprime pas sur le sujet. Il reste à voir si on en saura plus, un jour. Mais les actionnaires indiquent qu’ils attendent Tesla au tournant.
“L’annonce par Tesla de sa réunion annuelle des actionnaires est une reconnaissance bienvenue, bien que tardive, du fait que la loi s’applique à tous, même à l’homme le plus riche du monde et à son entreprise. Les règles fondamentales de la gouvernance d’entreprise ne sont pas facultatives ; elles constituent des protections essentielles pour les actionnaires et les marchés publics. Avec d’autres investisseurs à long terme, nous resterons vigilants et demanderons des comptes à Tesla devant ses actionnaires”, réagit par exemple un des signataires, Brad Lander (contrôleur financier à la ville de New York), dans les pages de CNN.
Mais en fin de compte, le pouvoir des actionnaires lors de l’AG reste plutôt limité. Ils peuvent voter pour ou contre des mesures, certes, mais il est moins évident de par exemple poser des questions directement à la direction. Celle-ci garde le choix de sélectionner les interlocuteurs, et préfère généralement éviter les questions qui fâchent.