Accords commerciaux et euphorie boursière : un feu de paille ?

Wall Street dans l’euphorie grâce aux accords commerciaux. (Photo by CHARLY TRIBALLEAU/AFP via Getty Images) © AFP via Getty Images
Charly Pohu

Wall Street, entre autres, est partie en flèche ce lundi après les annonces d’un accord commercial entre les États-Unis et la Chine. D’autres accords commerciaux devraient suivre… Mais peuvent-ils faire perdurer ce rallye ? Bank of America a des doutes.

Feu d’artifices en bourse ce lundi, à Wall Street notamment, après l’annonce d’un accord commercial entre les États-Unis et la Chine. Il porte surtout sur une baisse temporaire des taxes d’importation réciproques, qui dépassaient largement les 100% et affichent maintenant 10% (importations américaines en Chine) et 30% (importations chinoises aux États-Unis).

Ce qui a mené à quelques chiffres fous.

  • Le Nasdaq, indice avant tout composé de valeurs technologiques, est de retour en territoire de marché haussier, après son gain de 4% lundi. Cela veut dire que depuis son dernier point bas, qui était le 8 avril, l’indice a gagné 20% ou plus.
  • Les Sept Magnifiques notamment ont gagné près de 840 milliards de dollars de valorisation en une journée. Apple a notamment gagné 6%, car l’entreprise produit l’immense majorité de ses smartphones en Chine. Amazon a gagné 8% : de nombreux vendeurs sur la plateforme travaillent avec des producteurs chinois.
  • Le secteur du jouet a aussi été un grand gagnant. Mattel a gagné 10%, Hasbro a gagné 6,5%, Jakks 15% et Funko même 46,4%.

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Accords commerciaux… est-ce assez ?

Ce n’est d’ailleurs pas le seul accord commercial qui a été signé. Les États-Unis ont également ratifié un accord avec le Royaume-Uni, la semaine dernière. Et d’autres pourraient suivre dans les semaines à venir, pour éviter les droits de douane élevés du 2 avril, mis sur pause pendant 90 jours.

Mais ces accords peuvent-ils être le moteur d’une grande croissance, durable, des cours en bourse ? Michael Hartnett, stratégiste en chef des investissements de Bank of America a des doutes. Alors oui certes, les cours sont en hausse depuis la mi-avril sur base des perspectives de signatures d’accords. Mais ces espoirs seraient donc déjà en grande partie inclus dans les prix, estime le spécialiste dans une note.

Il remarque qu’on assiste ainsi à un phénomène de “buy the expectation, sell the fact” (achetez les attentes, vendez les faits). Ce dernier veut que ce sont les attentes qui font augmenter les cours, par spéculation, et une fois que les accords sont annoncés, les cours pourraient faire “pschitt” et ralentir ou rechuter. Car les investisseurs revendent leurs parts pour prendre leurs gains après cette hausse. De nouvelles annonces d’accords ne devraient donc pas forcément faire rallier davantage les cours, au contraire.

Hartnett a rédigé sa note la semaine dernière, avant la rencontre sino-américaine à Genève de ce weekend. Les cours sont finalement partis à la hausse suite à l’annonce d’un accord, après cette rencontre. L’annonce était une surprise (et l’anticipation de ce fait n’était donc pas encore incluse, entièrement du moins, dans les prix), ce qui a contribué à pousser les cours vers le haut.

Mais l’expert se penche aussi sur le contexte macro-économique plus large que ces accords commerciaux. Il y voit des risques de ralentissement pour l’économie américaine à cause de “nouvelles politiques populistes qui prônent des droits de douane plus élevés, un gouvernement plus petit, une immigration plus faible et moins de guerres”. Ce qui devrait donc freiner la bourse. Un coup serait également porté à “l’exceptionnalisme américain”. L’expert indique d’ailleurs qu’il préfère actuellement les actions internationales, tout comme les obligations et l’or, aux actions américaines.

Droits de douane toujours élevés

Un autre point qui pourrait mettre à mal ce rallye boursier sont les droits de douane. Ils ont été baissés certes, mais ce n’est que temporaire. Et ils restent élevés. “On parle encore de 40% en moyenne sur les importations chinoises. C’est énorme. Et si aucun accord n’est trouvé d’ici trois mois, Trump a déjà annoncé la couleur : il remettra une couche. Ce n’est pas un rétropédalage, c’est un demi-tour en marche arrière. Mais le plus ironique, c’est ça : il y a quelques mois, les économistes les plus pessimistes imaginaient un scénario catastrophe, avec des droits de douane à 20 %, peut-être 60 % dans le pire des cas. Aujourd’hui, Trump menace avec du 145 %… et quand il revient à “seulement” 40 %, les marchés crient au génie”, écrit le rédacteur en chef de Trends-Tendances et Canal Z, Amid Faljaoui, dans sa chronique boursière de ce mardi.

Puis trouver un accord entre les États-Unis et la Chine ne sera pas facile. Les tensions commerciales ont été fortes ces dernières années, entre autres durant le premier mandat de Trump. Elles ont concerné toute une série d’éléments : panneaux solaires, puces électroniques, actifs financiers, données, matériaux critiques et terres rares… Cela ne se résoudra pas en un claquement de doigts.

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