Puces : pourquoi l’Europe restera un nain dans la course mondiale


Le récent rapport de la Cour des comptes européennes crucifie la prévision du Chips Act d’arriver à représenter 20% de la production mondiale des puces. Le Vieux continent dépassera à peine la moitié de ses ambitions…
Pour l’Europe, il fallait arriver à prendre une place sur le marché des semi-conducteur. Pas de choix étant donné le contexte : Smartphones, véhicules autonomes, satellites, infrastructures énergétiques ou encore intelligence artificielle : tout repose désormais sur les semi-conducteurs. Un domaine où l’Europe pèse peu face aux géants asiatiques (TSMC, Samsung) et américains (Intel, Micron). En 2020, notre continent représentait seulement 10 % de la production mondiale. Malgré la prise de conscience et les milliards promis, le retard semble impossible à combler. Alors, lorsqu’en 2022, la Commission européenne présentait son Chips Act, l’ambition était forte et affirmée : le Vieux-Continent allait porter sa part de marché dans la production mondiale de semi-conducteurs à 20 % d’ici 2030 en venant de loin de 10%.
Mais aujourd’hui, deux ans plus tard, à la lumière d’un rapport sévère de la Cour des comptes européenne, il y a de quoi déchanter: l’Union européenne devra plus que probablement se contenter d’à peine 11,7 % de parts de marché. Pourquoi ?
Une ambition louable, mais pas suffisante
D’abord, parce que l’ambition, louable, n’était pas suffisante. Le Chips Act devait mobiliser 86 milliards d’euros d’investissements publics et privés d’ici 2030. Impressionnant sur papier, mais à titre de comparaison, les acteurs mondiaux de l’industrie, eux, ont prévu d’investir 405 milliards d’euros entre 2020 et 2023. Même les États-Unis, avec leur propre Chips and Science Act, débloquent 52 milliards de dollars d’aides fédérales. Surtout que sur ce montant européen, la Commission européenne n’en contrôle directement que 5 %. Le reste dépend d’États membres aux moyens inégaux et d’entreprises privées peu enclines à investir massivement sans garanties solides.
De plus, dans la course à l’augmentation de la production, l’Europe a subi des revers et de grands projets peinent à se concrétiser. Intel, par exemple, a suspendu ses plans de méga-usine en Allemagne. D’autres investissements sont encore au stade de l’annonce, dépendant lourdement de subventions publiques.
Selon la Cour des comptes, pour tenir les ambitions, il aurait fallu une quadruple augmentation de la capacité de production pour tenir ses promesses. À ce rythme, il faudrait revoir l’agenda : non pas 2030, mais 2050.
Bref, le Chips Act aura certes permis de lancer quelques projets et de soutenir des centres de recherche comme l’Imec à Louvain, mais d’après la Cour des comptes européenne, croire que l’Europe rattrapera son retard sur l’Asie ou l’Amérique relève désormais plus de la communication politique que d’une analyse industrielle sérieuse.
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