Pourquoi il faut combattre les djihadistes sur les réseaux sociaux
Si c’est dans nos rues que Daech commet ses attentats, c’est en bonne partie sur le Web qu’il les prépare. Propagande, recrutement, communication et préparation de ses activités criminelles : le numérique intervient à toutes les étapes du processus. Mais c’est aussi du numérique et de tous les acteurs du Web qu’on attend une bonne partie de la riposte.
Les jeunes djihadistes utilisent les technologies modernes : smartphones, Web, réseaux sociaux, consoles de jeu, applications et toutes les solutions de communication modernes. Pas étonnant, dès lors, que le ministre américain de la Défense considère le Web comme le “cinquième terrain d’opération militaire” pour le Pentagone, après la terre, la mer, l’air et l’espace.
Autres temps, autres moeurs, c’est notamment sur les réseaux sociaux que Daech organise sa propagande et le recrutement de “combattants”. Pour Bernard Cazeneuve, ministre français de l’Intérieur, une grande part des nouveaux combattants sont enrôlés par l’intermédiaire de l’Internet et notamment via les réseaux sociaux classiques, comme Twitter et Facebook. Selon Gabriel Weimann, professeur à l’Université de Haïfa en Israël, “90% de l’activité terroriste sur le Net passe par les réseaux sociaux”. Une étude de l’institut américain Brookings évaluait à 46.000 le nombre de comptes Twitter soutenant ouvertement l’Etat islamique.
Daech réplique sa hiérarchie du monde réel sur le terrain numérique
Jared Cohen, responsable chez Google Ideas, a récemment partagé, dans la revue Foreign Affairs, sa vision de l’organisation des terroristes sur les réseaux sociaux où ils mènent propagande et recrutement. A ses yeux, l’organisation réplique sa hiérarchie du monde réel sur le terrain numérique. Elle prend la forme d’une pyramide à quatre étages (voir schéma ci-dessus). Au sommet : le commandement central, très organisé autour de quelques comptes Twitter, souvent sécurisés (seul les followers acceptés peuvent lire leur contenu), utilisant une image de profil neutre et avec peu de followers.
C’est de là que le “matériel marketing” de Daech est disséminé sur le Web. Il l’est au travers d’un autre niveau hiérarchique avec qui il est en contact. Celui-ci comprend des membres de l’organisation qui ont, au passage, acheté des followers pour donner à leur compte Twitter une allure d’influenceur. Ils utilisent les techniques de guérilla marketing “classiques” : hashtags ciblés ou détournement de hashtags populaires. Comme lors de la dernière coupe du monde de football, pour étendre leur propagande vers les fans de foot. Ils visent large car leur taux de conversion n’est pas très élevé : selon certaines estimations 0,00001% des personnes qui regardent la propagande des groupes terroristes décident de véritablement passer à l’action.
Le message parvient ensuite à toute une série de sympathisants, pas forcément membres de l’armée, qui répercutent les théories djihadistes autour d’eux. Tout ceci étant amplifié par des “bots”, des comptes robots sur Twitter, qui partagent automatiquement les messages et leur donne une nouvelle caisse de résonance.
Le responsable de Google Ideas suggère d’ailleurs une série de pistes pour assécher l’Etat islamique sur les réseaux sociaux, que vous pouvez découvrir dans le dossier complet de Trends-Tendances cette semaine : “Comment le numérique peut aider à éradiquer le terrorisme”, détaillant notamment le rôle – et les obligations – des géants du Net comme Twitter, Facebook, Google… mais aussi des Big Data dans la riposte numérique.
Cet article est un extrait d’un dossier plus complet paru dans le numéro de Trends-Tendances daté du 26 novembre 2015.
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