LN24 : stop ou encore ?

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Frederic Brebant Journaliste Trends-Tendances  

Flirtant avec les 4 millions de pertes pour l’année 2023, la chaîne d’information du groupe IPM est contrainte de licencier une partie de son personnel et de revoir quelque peu son business model. Si le marché semble sceptique quant à l’avenir de LN24, ses responsables croient en revanche, plus que jamais, en son réel potentiel.

C’était il y a un peu plus de quatre ans. Le 2 septembre 2019, très exactement, une toute nouvelle chaîne d’information voyait le jour en Belgique francophone sous le nom de LN24. Portée par un capital de départ de 4,5 millions (principalement fourni par les sociétés Besix et Belfius Insurance qui ont mis chacun 1,8 million dans l’aventure), cette nouvelle fenêtre télévisuelle était incarnée par un trio de cofondateurs : l’entrepreneur Boris Portnoy associé aux journalistes Joan Condijts et Martin Buxant.

Depuis, les trois ex-complices ont quitté le navire et LN24 est majoritairement passée sous pavillon IPM, le groupe média qui possède entre autres La Libre, La DH, L’Avenir, Moustique et Paris Match. Un transfert qui s’est opéré il y a tout juste deux ans, alors que la chaîne d’information était déjà méchamment dans le rouge avec 7 millions de dettes cumulées en deux ans d’existence à peine…

La bouée IPM

Renflouée par IPM qui a injecté à l’époque 3 millions d’euros dans le capital de LN24 pour en devenir l’actionnaire principal (à hauteur de 68%), la chaîne n’a toujours pas trouvé sa vitesse croisière en termes d’audience et peine à tendre vers la rentabilité. Pour l’année 2023, son directeur général Denis Pierrard confirme d’ailleurs une perte de 3,9 millions d’euros (chiffres avancés hier par le journal Le Soir), mais rectifie toutefois d’autres informations divulguées par L’Echo : « Ce ne sont pas 15 personnes qui sont touchées par notre plan d’économies, mais bien 12 personnes qui sont loin d’être toutes des équivalents temps plein, précise Dennis Pierrard. En réalité, ce sont 7 ETP, au total, dont nous nous sommes séparés. »

Cette restructuration de LN24 qui compte une vingtaine d’employés s’inscrit dans une stratégie qui vise à transformer le site web de la chaîne en une plateforme d’émissions déjà diffusées (à l’instar d’Auvio pour la RTBF et non plus comme un site purement news) et de miser davantage sur les sites d’infos de L’Avenir, de La Libre et de La DH qui génèrent, eux, beaucoup lus de trafic. L’idée étant de renforcer encore ces marques déjà puissantes avec des vidéos de reportages tournés par LN24. « Aujourd’hui, LN24 fournit déjà 25% du contenu vidéo du groupe IPM, soit environ 650 vidéos sur les 2.500 qui sont produites chaque mois, détaille Sébastien Desclée, nouveau directeur général du groupe média. LN24 doit jouer le rôle d’accélérateur de ce type de contenu et il n’est pas question que la chaîne disparaisse. LN24 doit et va continuer. »

Un marché compliqué

Le directeur général d’IPM réagit ainsi aux commentaires de certains acteurs du marché qui voient la fin, à moyen terme, de la chaîne d’information dans le paysage médiatique belge. « C’est la chronique d’une mort annoncée, commente cet expert des médias. Le marché publicitaire stagne fortement et LN24 ne parvient toujours pas à décoller pour être rentable dans ce paysage qui est très concurrentiel. Les élections chez nous et d’autres grands événements comme les élections américaines vont sans doute l’aider à tenir, mais je ne vois pas comment la chaîne pourrait survivre dans les deux ans qui viennent, dans une situation financière déjà compliquée pour IPM. »

Pourtant, du côté de certaines régies publicitaires, on  croit encore au projet LN24 en raison de sa spécificité et de son éventuelle faculté à pouvoir attirer de nouveaux annonceurs, par exemple dans l’univers du luxe, du voyage et du secteur bancaire. « Bien sûr, on se heurte à un marché publicitaire compliqué, enchaîne Denis Pierrard, directeur général de LN24, mais en deux ans, la notoriété de la chaîne est montée en puissance et elle a bien progressé en termes d’audience puisqu’on est passé de 0,8% de parts de marché au moment du rachat à 1,5% aujourd’hui. »

Toutefois, pour les acteurs du secteur de la pub, cette audience devrait idéalement encore doubler et atteindre au minimum les 3% de parts de marché « pour disposer d’un matelas plus confortable d’audience et donc attirer plus de budgets. » Ce qui est loin d’être évident…

Maintenir l’équilibre

Dans cette logique, LN24 a donc décidé de jouer désormais davantage la carte d’une « chaîne de rendez-vous spécifiques et de documentaires » plutôt que celle d’une chaîne d’info en continu, qui était l’ambition de ses débuts. « Nous fournissons déjà, chaque jour, entre 6 et 7 heures de production propre, ce qui est énorme, conclut Dennis Pierrard. Aujourd’hui, notre souhait est de maintenir les émissions phare de la chaîne, mais nous devons aussi garantir l’équilibre financier de LN24 en faisant des choix et des économies. »

Parmi ses choix, il y a la transformation du site web et l’arrêt programmé de certaines émissions. Peinant à trouver son public, Le Petit Théâtre de Vrebos passera ainsi à la trappe à la fin de la saison.

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