Les nouvelles aventures des fondateurs de myShopi
Six ans après avoir revendu leur application mobile de listes de courses et de coupons de réduction au groupe BD, le duo d’entrepreneurs belges à l’origine notamment de myShopi s’associe au patron du groupe informatique Advensys. Le trio veut numériser la prise de commandes dans la restauration rapide.
Difficile de ne pas lancer de nouveaux projets quand on a l’entrepreneuriat dans le sang. C’est en tout cas ce qu’on peut se dire en découvrant que les deux anciens fondateurs de myShopi (qui, avec cette appli, n’en étaient pas à leur coup d’essai) se relancent avec une nouvelle idée. Renaud Gryspeerdt et Philippe Van Ophem font partie des entrepreneurs francophones du digital qui comptent. Après la vente réussie de myShopi au groupe BD, voici déjà six ans, les revoilà à la tête d’une nouvelle start-up : Picker. Cette fois, ils ont embarqué Jan-Charles Van Hall, managing partner des firmes Advensys et Modullo qui proposent, notamment, un système ERP destiné au secteur de l’horeca. Une association qui fait sens puisque c’est dans cet univers-là que Picker va évoluer.
Cette start-up logée à Wavre s’est fixée comme mission de proposer le meilleur système de bornes numériques de commandes pour les chaînes de restaurants. ” C’est une demande de plus en plus présente parmi les clients d’Advensys, avance le trio d’entrepreneurs. Mais intégrer une option supplémentaire dans l’offre existante ne nous semblait pas une bonne option et nous avons décidé de partir de zéro pour parvenir à développer un produit qui répond parfaitement aux besoins des clients. ”
Prise de commande intelligente
Concrètement, Picker a développé un logiciel de prises de commandes pour les restaurants depuis une borne à écran tactile. Lorsqu’un client arrive dans l’établissement, il peut se diriger vers l’écran et sélectionner ce qui l’intéresse, étape par étape. Chez Woké, par exemple, l’un des premiers clients de Picker, le consommateur peut sélectionner le type de féculent (riz, nouilles, etc.) et y ajouter progressivement chacun des ingrédients (légumes, viande, volaille, etc.). Il voit, sur son écran, un visuel du plat qui se construit progressivement. Le prix s’affiche et s’adapte en fonction des options commandées et des différents suppléments : boissons, desserts, etc. Pratique, mais pas franchement très différent de ce qui existe chez McDonald’s depuis quelque temps déjà. ” Nous faisons le pari d’arriver au bon moment sur le marché, répond Renaud Gryspeerdt. En effet, le public connaît à présent le concept de commande sur des bornes grâce aux exemples de McDonald’s et d’autres. Par contre, le budget pour développer en interne ce type de logiciel est impayable pour les petites chaînes et les petits restos. ”
Les chaînes pourraient pousser leurs clients à passer commande depuis leurs propres smartphones.
Picker ambitionne, très clairement, de devenir le leader du développement de ce type de solution. ” Si, en apparence, cela paraît très simple comme software, il se révèle en réalité assez complexe, intervient Philippe Van Ophem, cofondateur de Picker. Il faut être capable de connecter le logiciel à plus d’une trentaine de systèmes de caisse. Par ailleurs, nous misons sur un dispositif qui intègre de l’intelligence artificielle. ” Concrètement, cela signifie que Picker affichera ses propositions en fonction du contexte. ” On pourra prioritairement proposer des desserts au client qui entre à l’heure du goûter et des mojitos à celui qui arrive à l’heure de l’apéro “, détaille Renaud Gryspeerdt qui évoque aussi des possibilités d’adapter l’offre en fonction de la météo (boissons chaudes/froides) ou d’une série d’autres facteurs. La start-up peut, par exemple, se mettre au service de la stratégie de vente des établissements : pousser la vente de certains produits en les affichant très en avant si le resto doit écouler certains stocks ou souhaite favoriser des produits du moment.
Ces options n’ont rien d’anodin. A en croire les fondateurs de Picker, ” on constate que l’utilisation des bornes dans les McDo augmente leur chiffre d’affaires de 10 à 20%. Cela s’explique, d’une part, par le fait qu’il y a moins de file à la commande, ce qui rend le client moins stressé. Et, d’autre part, par les possibilités étendues d’ upselling ( proposer un produit plus cher que celui choisi initialement, Ndlr). ” Par ailleurs, Picker peut aussi afficher les informations nutritionnelles détaillées, les allergies voire des alternatives saines au sein des menus.
Le logiciel mais pas le matériel
La start-up Picker se spécialisera dans le développement du logiciel, lequel devra être intégré dans des bornes à écran tactile. ” Nous ne fournissons pas le matériel, précise Jan-Charles Van Hall. Nous développons l’application et ce sont les revendeurs de caisses pour l’horeca qui les intègrent dans le matériel et le proposent aux patrons de chaînes. ” Les clients de Picker seront donc les revendeurs et non les restaurateurs en direct. Pas un souci pour les fondateurs de Picker qui évitent, ainsi, de devoir embaucher des tas de commerciaux pour démarcher les établissements belges, puis français et néerlandais. Car la jeune pousse se voit rapidement à l’étranger, étant donnée l’intérêt qu’elle aurait obtenu des professionnels lors des récents salons où étaient présents les responsables de Picker.
Quant au business model, il s’agit d’un SaaS ( software as a service). Comprenez que les restos s’acquittent d’une licence pour l’utilisation du logiciel qui tourne sur le Web : 75 euros pour l’usage du logiciel dans la première borne, puis 50 euros pour les suivantes. L’idéal, pour un resto, étant d’avoir entre trois et sept bornes de commandes numériques. Si, à ce stade, la start-up wallonne développe son logiciel pour des bornes, elle n’exclut pas un système de prises de commandes depuis le smartphone des clients. En effet, rien n’empêcherait les chaînes à pousser leurs clients à passer commande depuis leurs propres smartphones, pour autant qu’ils paient à la commande bien sûr. ” Pour l’instant, il ne s’agit que d’une vision à long terme, indique Philippe Van Ophem. Rien n’est fait et il faudrait encore voir si les gens sont prêts à télécharger des applis pour cela, s’il en faut une générale ou une par resto, etc. ”
La jeune pousse n’en est encore qu’à ses débuts. L’appli, développée en quelques mois, a déjà trouvé ses premiers clients, mais ceux-ci se comptent encore sur les doigts de la main. Toutefois, le produit vient à peine d’être commercialisé. Pour l’instant, Picker, qui occupe déjà trois personnes en plus des trois fondateurs, est développée sur fonds propres. La start-up se lancera, dès le début de l’année, dans son premier tour de table. Objectif : lever un million d’euros pour rapidement passer à la vitesse supérieure en termes de développement et s’imposer comme le spécialiste absolu de ce créneau de marché, tant en Belgique qu’à l’étranger.
Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici